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Dossier Paru le 23 janvier 2024
L’ACTION RÉPRESSIVE DE L’AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

AMF : Regard sur 20 ans de sanctions administratives et disciplinaires des infractions boursières (1)

Le Doyen Joseph Hamel avait déjà relevé en 1955(2), dans une formule saisissante, l’intervention de plus en plus fréquente de « l’appareil, toujours effrayant » de la répression dans la vie des affaires. L’action répressive de l’AMF en est l’une des manifestations contemporaines (certains diraient un avatar). Elle met en évidence une mission majeure du régulateur, avec l’ensemble des pouvoirs qui y sont associés : assurer la bonne information du public et la protection des investisseurs et de l’intégrité des marchés financiers (article L. 621-1 du Code monétaire et financier). À cet effet, il s’agit de mettre au jour les infractions à la réglementation boursière, et notamment les abus de marché, qui sont les plus graves, d’en identifier les auteurs (ce qui est parfois très délicat), de les poursuivre et de les sanctionner.

© Duka Mer-stock.adobe.com

Cette double mission de protection des investisseurs et de l’intégrité des marchés participe de l’image du régulateur financier, qui est souvent présenté dans la grande presse comme le « gendarme de la bourse ». Cette formule souligne bien les pouvoirs d’investigation dont est investi l’AMF (articles L. 621-9 et suivants du Code moné­taire et financier), qui se prolongent par des pouvoirs de poursuite et de sanction des auteurs d’infractions boursières (article L. 621-15 du Code monétaire et financier). L’AMF est en vérité ici policier, en charge des enquêtes et contrôle, et juge des infractions financières. Cependant, pour respecter les droits fondamentaux, en particulier dans la sphère punitive, l’action répressive de l’AMF se déploie en associant successivement les différentes composantes du régulateur : le service des enquêtes et les deux formations que sont le collège, autorité de poursuite, et la commission des sanctions, qui statue sur la culpabilité des personnes mises en cause et leur inflige s’il y a lieu les peines encourues. C’est ici qu’il apparaît nettement qu’il y a deux autorités en une, avec les points de tension qui peuvent exister dans la plupart des ménages. Il sera souvent question des droits fondamentaux, dans la suite de cette présentation d’ensemble puis des différents volets de ce dernier thème du colloque. Avant de les aborder, il me paraît intéressant de dresser un constat (I) concernant l’action répressive de l’AMF pendant ses vingt premières années avant d’envisager quelques perspectives et propositions (II).

I) Constat : un gendarme boursier lourdement armé

La proposition doctrinale d’instaurer un tribunal des marchés financiers3, séduisante, mais difficile à mettre en œuvre pour di­verses raisons, plus ou moins bonnes, n’ayant pas été retenue, la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers fait aujourd’hui office d’autorité de sanction administrative et disciplinaire des infractions boursières. Elle peut ainsi infliger de lourdes peines aux professionnels des marchés financiers et aussi, au-delà, à tous les auteurs d’infractions boursières, qu’il s’agisse des émetteurs cotés et de leurs dirigeants, des investisseurs ou de simples particuliers ayant transgressé la réglementation (par exemple en matière d’opérations d’initiés). Il est constant que ces sanctions disciplinaires et administratives ont un caractère punitif et relèvent en conséquence de la matière pénale au sens de la Convention européenne des droits de l’Homme4.

Il y a quinze ans, à l’occasion de l’une des premières grandes affaires d’initiés (affaire Péchiney 2), dans laquelle la Commission des sanctions avait exceptionnellement tenu sa séance (par né­cessité eu égard au nombre des personnes mises en cause et de leurs conseils…) dans une grande salle du Tribunal de commerce de Paris, l’un des avocats, qui ne manquait pas d’humour, avait relevé que la commission se donnait ainsi l’apparence d’une juri­diction, alors qu’elle n’en était pas une. Il avait ajouté que sa seule dénomination était en-elle-même une atteinte à la présomption d’innocence garantie par l’article 6, § 2 de la Convention euro­péenne des droits de l’Homme (avec l’idée que toute personne mise en cause devant la commission serait ainsi inéluctablement sanctionnée à l’issue de sa séance).

Aujourd’hui, il est acquis que la Commission des sanctions n’est pas une véritable juridiction. Ainsi ne peut-elle pas transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (à la différence des juridictions de recours contre ses décisions) et elle ne peut ni pro­noncer une peine d’emprisonnement (qui est l’apanage du tribunal correctionnel de Paris en matière de délits boursiers des articles L. 465-1 et suivants du Code monétaire et financier), ni allouer des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par une infraction financière (ce qui ne signifie pas qu’elle ne puisse pas prendre en considération, d’une autre manière, l’indemnisation des victimes).

Il est cependant admis que la Commission des sanctions a les « qualités d’une juridiction » (comme l’a souligné le Premier président de la Cour de cassation lors du 16ème colloque de la Commission des sanctions le 12 octobre 2023) et est pour le moins une quasi-juridiction répressive. Elle peut poser le cas échéant des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne5. Elle applique aussi certaines méthodes des juridictions pénales, comme celle du faisceau d’indices en matière de preuve des opérations d’initiés qui en offre une illustration remarquable (même s’il ne s’agit pas d’autre chose que l’intime conviction du juge pénal, permettant d’entrer en condamnation lorsque la culpa­bilité est établie par une pluralité d’éléments probatoires au-delà de tout doute raisonnable)6. C’est ce qu’énonce la Commission des sanctions lorsqu’elle considère, dans maintes décisions, qu’une infraction d’initié est établie par un faisceau d’indices graves, précis et concordants et par l’absence de tout autre explication légitime et plausible de l’opération litigieuse7, tout doute devant bénéficier à la personne mise en cause8.

Surtout, la Commission peut prononcer de très lourdes sanctions disciplinaires à l’encontre des professionnels des marchés financiers (prestataires de services d’investissement et conseillers en inves­tissement financier notamment, sanctions disciplinaires pouvant aller aussi jusqu’à une interdiction définitive d’exercer une activité professionnelle, outre des sanctions pécuniaires significatives) et administratives à l’encontre des non-professionnels, assorties d’une publicité de la décision, qui est en soi une sanction redoutée. Les sanctions administratives ont été du reste considérablement aggravées en vingt ans (en dernier lieu par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 décembre 2016 dite Sapin 2). Ce constat contribue à rendre attrayante l’alternative qu’est la voie transaction­nelle offerte par la composition administrative dont le régulateur a été doté et est susceptible de s’appliquer même en matière d’abus de marché depuis la loi n° 2016-1691 (article L. 621-14-1 du Code monétaire et financier).

Si les sanctions pécuniaires de l’AMF n’atteignent pas les sommets de celles que prononce l’Autorité de la concurrence (qui seraient les plus punitives au monde), comme cela a été relevé lors du 16ème colloque annuel de la Commission des sanctions le 12 octobre 2023, elles n’en sont pas moins très élevées et significatives. Elles peuvent ainsi être portées à 15 % du chiffre d’affaires de la per­sonne sanctionnée (article L. 621-15, III bis, issu de la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016, montants qui peuvent aller bien au-delà des plafonds de 100 millions d’euros en l’absence d’avantage retiré du manquement ou du décuple du montant de l’avantage retiré du manquement s’il peut être déterminé, avec en pratique des sanctions de l’ordre de trois à quatre fois le montant de l’avantage retiré de l’infraction).

L’AMF est donc un gendarme lourdement armé et usant en pratique de ses pouvoirs de sanctions administratives et disciplinaires avec de plus en plus de rigueur. Les quinze décisions rendues depuis le début de l’année 2023 en témoignent, avec un total de 126 560 000 € de sanctions pécuniaires administratives et disciplinaires. Des som­mets inédits ont été atteints dans ces deux domaines : sanctions disciplinaires de 75 M € et un blâme à l’encontre d’une société de gestion, outre des sanctions pécuniaires de 15 M et 3 M d’euros à l’encontre de leurs dirigeants et une interdiction d’exercice à l’encontre de l’un d’eux9 ; sanctions administratives de 25 millions d’euros à l’encontre d’un émetteur coté et d’un million d’euros, à l’encontre de son dirigeant pour diffusion d’informations trompeuses, même en l’absence d’avantage retiré de l’infraction10). Des chiffres qui donnent un peu le vertige et laissent à penser que le régulateur connaît une formule de Michel Audiard : « Quand on parle pognon, à partir d’un certain chiffre, tout le monde écoute ».

Ces sanctions sont prononcées au terme d’une procédure d’une durée ne dépassant pas le plus souvent une quinzaine de mois après la notification des griefs par le Collège. Cette célérité et l’exécution provisoire dont sont assorties les décisions (avec un sursis à exécution subordonné à de strictes conditions11), parti­cipent aussi de l’efficacité de la procédure de sanction de l’AMF et d’une forme de dissuasion. Il s’agit là aussi d’atouts des poursuites administratives face aux poursuites pénales.

À cet égard, la dualité d’incriminations (pénales et administratives) des abus de marché (Règlement abus de marché et délits boursiers des articles L. 465-1 et suivants du Code monétaire et financier) reste une spécificité de la matière. Mais la loi n° 2016-819 du 21 juin 2016 portant réforme du système de répression des abus de marché a mis fin au cumul de poursuites administratives et pénales pour les mêmes agissements, conformément à la règle Ne bis in idem12 et au principe de nécessité des délits et des peines13. Depuis 2016, la technique de l’aiguillage (autrement dit de l’option entre les poursuites pénales et les poursuites administratives : ar­ticle L. 465-3-6 du Code monétaire et financier) n’a guère suscité de difficulté et la question du respect des droits fondamentaux se déplace ces dernières années en amont de la procédure de sanction vers le terrain des enquêtes, en particulier sous l’angle de l’atteinte à la vie privée des personnes.

En pratique, la répression des infractions boursières et des abus de marché est désormais largement assurée par la Commission des sanctions, même si les poursuites pénales n’ont pas disparu pour les abus de marché. Celles-ci sont réservées aux cas les plus graves (délit de manipulation de cours sanctionné récemment à l’égard d’un récidiviste par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 25 mai 202314 ; la presse a aussi fait récemment état d’une autre suspicion de manipulation de cours et de diffusion de fausse information concernant un médicament blockbuster d’une grande société qui est visée par une enquête du Parquet national financier). L’AMF contribue du reste aussi à la répression pénale des abus de marché en se constituant partie civile devant la juri­diction correctionnelle, comme cela a été le cas récemment dans des affaires de manipulation de cours.

Il ressort de l’ensemble de ce constat que l’action répressive du régulateur est très large (des investigations à la procédure répressive proprement dite, avec une alternative), très intense et très redoutée. Avec peut-être parfois un risque d’emballement de la machine qui conduit à réfléchir à des perspectives d’évolution.

II) Perspectives et propositions

Après ses vingt premières années d’activité, l’AMF a clairement affirmé et affiché sa puissance de frappe en matière répressive. Mais qui exercera le pouvoir de sanction des infractions boursières dans dix ans, dans vingt ans ? Comment s’exercera la nécessaire répression des abus de marché ? Il n’est pas simple de répondre à ces questions. Pour l’instant, après avoir imposé son autorité de régulateur, l’action de l’AMF devrait être guidée davantage à l’avenir par deux exigences essentielles : la prévisibilité et la pro­portionnalité des sanctions.

S’agissant, en premier lieu, de la prévisibilité des sanctions ad­ministratives, deux questions délicates sont souvent relevées par les praticiens. D’abord, celle de l’interprétation par le régulateur des dispositions à caractère répressif, qui met en jeu le principe de légalité de la répression et la sécurité juridique, par exemple lorsque le fondement de la sanction réside dans l’incorporation d’une simple instruction à des dispositions du Règlement général de l’AMF, ce qui conduit à élargir une incrimination15. En présence d’incertitudes sur la portée d’une infraction, il n’est pas satisfaisant de restreindre le principe de légalité au détriment des professionnels des affaires en considérant qu’ils peuvent évaluer à un « degré raisonnable les risques encourus, au besoin en s’entourant des conseils de juristes spécialisés »16. Cela revient ni plus ni moins à imposer à ces conseils de retenir une interprétation extensive de normes répressives. Ensuite, la prévisibilité des sanctions elles-mêmes suscite des observations critiques et appelle une réflexion sur des ajustements, et en particulier la pratique de lignes direc­trices pour le calcul des sanctions (à l’instar de celles présentées par l’Autorité de la concurrence).

S’agissant, en second lieu, de la proportionnalité des sanctions, l’Autorité européenne des marchés financiers (European Securities and Markets Authority, ESMA), qui a notamment pour mission de renforcer la protection des investisseurs et de promouvoir la stabilité des marchés financiers dans l’Union européenne, a relevé que l’AMF est le régulateur le plus répressif en Europe en termes de sanctions administratives17. Il y a là un autre sujet de réflexion, et ce d’autant plus que, de son côté, la Commission européenne dans le cadre de ses propositions du 7 décembre 2022 tendant à simplifier le droit des sociétés cotées pour rendre la cotation en bourse plus attrayante (Listing act) souhaite « simplifier et clarifier certaines exigences en matière d’abus de marché, sans compro­mettre l’intégrité du marché ». À cet égard, il est remarquable que la Commission européenne propose à juste titre de rendre plus proportionnées les sanctions pécuniaires administratives en cas de violation des obligations d’information et de publication, en parti­culier pour les petites et moyennes entreprises18, qui maîtrisent mal le plus souvent une réglementation complexe. Au-delà, il convient donc de rechercher un équilibre entre, d’une part, un assouplisse­ment du cadre réglementaire résultant de l’admission à la cote et, d’autre part, la protection des investisseurs et la prévention des abus de marché qui constituent aussi des objectifs contribuant à l’attractivité des marchés financiers. C’est un vaste programme, qui dépasse le cadre de cet exposé.

Notes :

1. Texte d’une conférence prononcée dans le cadre du colloque sur Les vingt ans de l’Autorité des marchés financiers, qui a eu lieu à l’Assem­blée Nationale le vendredi 24 novembre 2023 (organisé par Sébastien Neuville et Nicolas Rontchevsky).

2. Préface à l’ouvrage collectif Le droit pénal des sociétés anonymes, LGDJ, 1955

3. D. Schmidt et A.-V. Le Fur, Pour un tribunal des marchés financiers, BJB janvier 2015, p. 24.

4. V. notamment CEDH, 30 juin 2011, n° 25041/07, Messier c/ France, BJB 2011, p. 634, note N. Rontchevsky.

5. V. par exemple AMF, Comm. sanctions, 25 avril 2019, SAN-2019-5, spéc. n° 165 : « La commission des sanctions de l’AMF doit donc être qualifiée de juridiction au sens de l’article 267 du TFUE ».

6. V. notamment K. Deckert et N. Rontchevsky, La preuve de la détention et de l’utilisation d’une information privilégiée par la méthode du faisceau d’indices in Autour du droit bancaire et financier et au-delà, Mélanges en l’honneur de Jean-Jacques Daigre, Ed. Joly, 2017, p. 271.

7. V. par exemple AMF, Comm. sanctions, 10 novembre 2023, SAN-2023-14.

8. V. notamment CA Paris, 5-7, 2 mars 2023, n° 21/00887, RTDF n° 2/2023, p. 113, obs. F. Bouaziz, jugeant que, au vu des explications et pièces présentées pour justifier l’opération réalisée autrement que par la détention d’une information privilégiée, « il convient donc, au bénéfice du doute, de mettre M. X hors de cause » ; V. notamment D. Martin, E. dezeuze, F. Bouaziz, R. Salomon et M. Françon, avec la collaboration de G. Rivière, Les abus de marché, LexisNexis, 2ème éd., 2021, n° 241 et s.; Lamy Droit pénal des affaires 2024, Chapitre 6, L’utilisation et la communication illicites d’une information privilégiée par F. Stasiak, N. Rontchevsky et K. Deckert , n° 2038.

9. AMF, Comm. sanctions, 30 décembre 2022, SAN-2023-01.

10. AMF, Comm. sanctions, 7 septembre 2023, SAN-2023-13

11. V. notamment Cass. com., 15 février 2023, n° 21-24401 FS-B, jugeant (i) que selon l’article L. 621-30 du Code monétaire et financier, lorsqu’un recours est formé devant le juge judiciaire contre une décision de la commission des sanctions de l’AMF relevant de sa compétence, il peut être sursis à l’exécution de cette décision si celle-ci est susceptible d’entraîner des conséquences manifestement excessives et (ii) que le caractère manifestement excessif des conséquences de l’exécution provisoire d’une décision de sanctions administratives de l’AMF doit être apprécié par rapport à la situation de la personne sanctionnée, sans qu’il y ait lieu d’analyser les chances de succès du recours en annulation ou réformation de cette décision.

12. CEDH, 4 mars 2014, n° 18640/10, Grande Stevens c/ Italie, Rev. sociétés 2014, p. 675, note H. Matsopoulou ; RSC 2014. 110, obs. F. Stasiak ; BJB 2014, p. 209, 111h1, note J. Chacornac ; RTDF n° 2/2014, p. 139, obs. N. R.

13. Cons. constit., 18 mars 2015, n° 2014-453-454 QPC, n° 2015-462, J.C.P. 2015, 368, note F. Sudre et 369, note J.-H. Robert ; BJB 2015, p. 204, note Th. Bonneau ; RD Banc. et fin. 2015, n° 63, obs. P. Pailler ; A.-V. Le Fur et D. Schmidt, La réforme du contentieux financier imposée par le Conseil constitutionnel, D. 2015, p. 894 ; O. Decima, Le fantôme de ne bis in idem, D. 2015, Point de vue, p. 874 ; RTDcom. 2015, p. 317, obs. N. R.

14. BJB juillet-août 2023, p. 19, n° 201h9, note D. Schmidt.

15. V. Cass. com., QPC, 5 avril 2023, n° 22-19127, RTDF n° 2/2023, p. 109, obs. N. R., énonçant qu’en reconnaissant à l’AMF la possibilité de publier des instructions et des recommandations aux fins de préciser l’interprétation de son Règlement général, et notamment des disposi­tions de ce Règlement édictant des obligations dont la violation donne lieu à sanction administrative, l’article L. 621-6 du Code monétaire et financier ne méconnaît pas le principe de légalité des délits et des peines, ni la compétence du législateur.

16. CA Paris, 24 mars 2022, n° 20/08390, spéc. n° 209-210 : « Si la question de la portée du manquement d’entrave, au sens de l’article L.621-15, II, f (du Code monétaire et financier), précité, revêtait, pendant la période des faits reprochés, un caractère relativement inédit, du fait de l’introduction récente de ce manquement en droit interne, il n’en demeure pas moins que cette interprétation dudit article faisait partie des interprétations possibles et raisonnablement prévisibles, au regard de son libellé, et était, de surcroît, cohérente avec la substance même du manquement, eu égard à la sanction administrative qui lui est attachée et à l’objectif d’assurer l’effet utile de ces dispositions, en vue de garantir le bon déroulement des enquêtes, en particulier lorsque celles-ci nécessitent de recourir à la coopération internationale. Il s’ensuit qu’EAUK, en tant que professionnel averti du monde de la finance, était pleinement en mesure, à partir du libellé de l’article L.621-15, II, f, du Code monétaire et financier, d’évaluer à un degré raisonnable, au besoin en s’entourant des conseils de juristes spécialisés, les risques encourus en fonction des suites qu’elle envisageait de réserver aux demandes de commu­nication qui lui avaient été adressées par la FCA sur requête de l’AMF. Dès lors, le moyen pris de la violation du principe de légalité des délits et des peines, d’interprétation stricte de la loi pénale et de prévisibilité du droit n’est pas fondé ».

17. Rapport annuel de l’Autorité européenne des marchés financiers sur les sanctions administratives et pénales et autres mesures adminis­tratives prononcées sur le fondement du Règlement sur les abus de marché en 2021, 18 novembre 2022; sur ce rapport, V. N. Rontchevsky, Analyse de la répression des abus de marché dans l’Union Européenne, RTDcom. 2022, p. 833.

18. Capital markets union : new proposals on clearing corporate insolven­cy and company listing to make EU capital markets more attractive (7 déc. 2022) ; V. N. Rontchevsky, Analyse de la répression des abus de marché dans l’Union européenne, art. préc.

Nicolas RONTCHEVSKY Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l’Université de Strasbourg Co-directeur de la Revue trimestrielle