Droit Paru le 02 septembre 2022
ACTUALITÉ IMMOBILIÈRE

PROFESSIONNELS DE L’IMMOBILIER

Tour d’horizon des derniers textes et jurisprudences

Agent commercial

Le mandat doit-il indiquer les nom et qualité de l’agent commercial habilité par l’agent immobilier ?

Lorsqu’elles interviennent dans la conclusion d’un mandat, les personnes habilitées par le détenteur de la carte doivent mentionner leurs nom et qualité sur la convention (Décret 72-678 du 20-7-1972 art. 9, dernier al.). En conséquence, il a été jugé que le mandat de vente que l’agent commercial conclut, au nom et pour le compte de l’agent immobilier qui l’a habilité, doit mentionner ses nom et qualité à peine de nullité. En effet, le mandat doit pouvoir s’assurer que la personne à qui il confie le mandat est habilitée, est titulaire de l’attestation légale et dispose des pouvoirs nécessaires (Civ. 1, 12 nov. 2020, n°19-14025).

Carte professionnelle

Quel est le tarif des cartes professionnelles des agents immobiliers ?

Depuis le 1er mars 2020, la rémunération due aux chambres de commerce et d’industrie territoriales ou de région pour la délivrance des cartes professionnelles aux personnes soumises à la loi Hoguet a augmenté. En effet, l’arrêté du 10 février 2020 (JO 14 texte n° 20) fixe, pour les demandes déposées depuis le 1er mars 2020, le paiement dû en rémunération des diverses procédures prévues par le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 :

Carte professionnelle initiale ou avec nouvelles mentions d’activité (article 1er du décret de 1970) : 160 €

Modification de la carte professionnelle (article 6 du décret de 1970) : 68 €

Renouvellement de la carte professionnelle (article 80 du décret de 1970) : 130 €

Récépissé de déclaration préalable d’activité (article 8 du décret de 1970) : 96 €

Attestation d’habilitation du collaborateur par le titulaire de carte professionnelle (article 9 du décret de 1970) : 55 €

Convention collective nationale de l’immobilier

Est-ce que l’accord national interprofessionnel des VRP de 1975 s’applique aux négociateurs immobiliers ?

Pour la Cour de cassation, l’accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 ne s’applique pas aux négociateurs salariés des agences immobilières, même s’ils en ont le statut. En effet, ceux-ci relèvent exclusivement de la convention collective de l’immobilier (Soc., 30 sept. 2020, n°18-18266 ; cf. aussi SCE, 17 janv. 1986, n°55717 annulant l’élargissement de l’ANI des VRP aux salariés relevant de la branche des agents immobiliers et des mandataires en vente de fonds de commerce).

L’avenant révisant la CCN de l’immobilier est étendu

L’avenant 83 actualisant la convention collective nationale (CNN) de l’immobilier, qui s’applique notamment aux agents immobiliers salariés, est étendu à tous les employeurs de la branche, y co-pris ceux qui n’adhèrent pas aux syndicats signataires, depuis le 15 juillet 2021 (Avenant 83 du 2-12-2019, Arrêté du 2 juillet 2021, JO 14 juil., texte n°89).

Congé pour PACS

Le salarié qui conclut un Pacs bénéficie désormais de 6 jours de congés (Avenant 83 du 2-12-2019, Arrêté MTRT2118962A du 2 juillet 2021, JO 14 juil. texte n°89).

Discrimination

La lutte contre les discriminations au logement est intégrée à la formation continue des agents immobiliers.

Les agents immobiliers et les personnes habilitées à négocier pour leur compte, ainsi que les directeurs d’établissement, de succursale, d’agence ou de bureau, sont soumis à une obligation de formation continue d’une durée de 14 heures par an ou de 42 heures au cours de 3 années consécutives d’exercice. Depuis le 1er janvier 2021, la formation continue des professionnels de l’immobilier soumis à la loi Hoguet de 1970 comprend, en sus des deux heures obligatoires sur la déontologie, deux heures obligatoires portant sur la non-discrimination à l’accès au logement.

Garantie financière

Les missions de contrôle des garants financiers des agents immobiliers sont (enfin) précisées

Depuis la la loi Alur du 24 mars 2014, un décret doit préciser les missions de contrôle des garants financiers sur les fonds des professionnels de l’immobilier soumis à la loi Hoguet qu’ils garantissent. En effet, l’article 3, 2o de la loi Hoguet du 2 janvier 1970, dans sa rédaction de la loi ALUR, prévoit que seuls les garants financiers ayant mis en place des procédures de contrôle internes, au moyen d’un référentiel et de modèles de suivi des risques, sont habilités à délivrer la garantie financière. Le décret de 2021 du 29 oct. 2021, applicable depuis le 1er janvier 2022, définit les procédures et les conditions dans lesquelles les garants exercent leurs missions de contrôle et prévoit que les garants contrôlent les fonds, effets ou valeurs déposés qu’ils garantissent en s’appuyant, notamment, sur des comptes et documents transmis annuellement par les professionnels de l’immobilier (Décret n°2021-1420, 29 oct. 2021, JO 31 oct. ,texte n°10).

L’ancien garant doit-il procéder une seconde fois aux formalités de publicité une fois informée du changement de garant financier de l’agent immobilier ?

La cessation de la garantie financière accordée à un agent immobilier :

– prend effet 3 jours francs après la publication par le garant financier d’un avis dans un quotidien du département du lieu de situation du siège de l’agence (D. 1972, art. 44, al. 1) ;

– et donne lieu à une information des créanciers de l’agent immobilier par lettre recommandée avec avis de réception mentionnant le délai de production des créances et son point de départ (D. 1972, art. 44, al. 1) ;

Si la cessation de garantie s’accompagne d’un changement de garant, l’avis précise que le nouveau garant s’est engagé à reprendre, avec tous ses effets, la garantie du précédent garant ; ce dernier est alors dispensé de la formalité de notification aux créanciers (D. 1972, art. 44, al. 1 & 45, al. 21).

Pour la Cour de cassation, si la cessation de la garantie n’est pas concomitante au changement de garant, l’ancien garant, dont la garantie a cessé 3 jours francs suivant la publication de l’avis, n’est pas tenu d’une nouvelle formalité de publication une fois informé du changement de garant. Dès lors, l’ancien garant ayant été informé du changement de garant 2 mois après la publication de l’avis, la cessation de sa garantie a cessé 3 jours francs après cette publication sans qu’il soit tenu d’effectuer une publication complémentaire. L’engagement du nouveau garant de reprendre, avec tous ses effets, la garantie précédente doit donc recevoir application (Civ. 1, 16 mars 2022, n°20-22408).

Honoraire

La clause pénale au mandat est-elle efficace en cas de refus du mandant de conclure la vente ?

Un particulier donne un mandat exclusif de vente d’un immeuble à un agent immobilier qui recueille une proposition d’achat au prix. Le propriétaire résiliant le mandat, l’agent l’assigne en paiement de la clause pénale prévoyant que le mandant s’engage à signer toute promesse de vente aux prix, charges et conditions convenus, avec tout acquéreur présenté par le mandataire. La Cour de cassation confirme l’arrêt de la Cour d’appel déboute l’agence de sa demande de paiement de la clause pénale aux motifs qu’aucune somme d’argent n’est due, à quelque titre que ce soit, à l’agent immobilier avant que l’opération pour laquelle il a reçu un mandat n’ait été effectivement conclue et constatée dans un acte contenant l’engagement des parties (Loi 1970, art. 6, I-al. 3) et qu’un mandat ne permet pas à l’intermédiaire d’engager le mandant pour l’opération envisagée (D. 1972, art. 72). Dès lors, le refus du propriétaire de réaliser l’opération aux conditions convenues au mandat ne constitue pas une faute justifiant sa condamnation à des dommages-intérêts (Civ. 1, 1er juil. 2020, n°19-14381). Autrement dit, Si le vendeur refuse d’accepter l’offre d’achat au prix fixé dans le mandat, l’agent immobilier n’a pas droit à ses honoraires, même lorsque la clause pénale prévoit que la rémunération est due en cas de refus de l’une des parties de régulariser la vente par acte authentique (not. Civ. 1, 16 nov. 2016, n°15-22010 ; Civ. 1, 14 déc. 2016, n°15-25352 ) et alors même que le vendeur aurait accepté dans un premier temps l’offre d’acquisition été transmise par l’agent immobilier avant de se rétracter le lendemain (Civ. 1, 25 nov. 2020, n 19-18144). En effet, sauf clause expresse du mandat lui donnant le pouvoir de représenter le vendeur pour conclure la vente, l’agent immobilier ne peut pas engager son mandant pour l’opération envisagée (not. Civ. 1, 12 déc. 2018, n°17-14009).

Autrement dit, le refus du mandant de réaliser l’opération n’est pas, en soi, constitutif d’une faute justifiant sa condamnation à des dommages et intérêts (Civ. 1, 3 mai 2018, n°17-16657). Pour que l’agent immobilier puisse prétendre, il faudra qu’il rapporte la preuve d’une faute du mandant qui l’aurait empêché de réaliser la vente (Civ. 1, 1er déc. 1987, n°84-17276). Il en sera ainsi s’il est établi que le mandant a conclu l’opération en privant l’agent immobilier de la rémunération à laquelle il aurait pu légitimement prétendre (Civ. 1, 8 sept. 2021, n°20-12171 ; Civ. 1, 28 juin 2012, n°10-20492).

Est-ce que le titulaire du droit de préemption doit payer la commission d’agence indiquée dans la déclaration d’intention d’aliéner ?

Dès lors que la DIA indique que la cession doit avoir lieu moyennant le prix de 450 000 €, plus une commission de 40 000 € à la charge de l’acquéreur, conformément au compromis de vente, alors même le mandat prévoit que la commission sera à la charge du vendeur ou de l’acquéreur si celui-ci l’accepte, le titulaire du droit de préemption est tenu au paiement de ladite commission (Civ. 1, 25 nov. 2020, n°16-22616 ; cf. déjà Civ. 3, 26 sept. 2007, n°06-17337).

L’agent immobilier peut-il prétendre à une autre rémunération que celle fixée au mandat ?

Lorsque le mandat de vente prévoit un prix au mètre carré et une commission de 6 % du prix réellement perçu par le vendeur, sans en préciser le montant, l’agent immobilier ne peut prétendre qu’à une rémunération calculée sur le prix effectivement perçu par le vendeur. Ainsi, lorsqu’une offre est réalisée au prix prévu au mandat, mais que le vente, suite à l’exercice du droit de préemption est réalisées à un prix moindre au mètre carré, la rémunération de l’agent immobilier est calculée sur la base du prix de vente au mètre carré (Civ. 1, 16 mars 2022, n 20-17028).

Quels sont les Tarif que les agents immobiliers doivent afficher ?

Depuis le 1er avril 2022, le barème affiché dans les agences immobilières devra mentionner les tarifs « maximums » que les agents immobiliers pratiquent pour les prestations qu’ils assurent et non plus les « tarifs pratiqués » (Arrêt du 26 janv. 2022, art. 1 & 3, JO 4 fév., texte n°6).

Mandat obligatoire

Le mandat est-il obligatoire entre un promoteur et un agent immobilier ?

Il est courant qu’une société de promotion immobilière externalise sa commercialisation. Dans ce cas, la loi Hoguet s’applique aux opérations effectuées, de manière habituelle, par un agent immobilier pour le compte d’un promoteur, que ce dernier soit ou non propriétaire des biens immobiliers en cause. L’agent immobilier doit donc lui faire signer un mandat écrit (Civ. 1,. 1er juil. 2020, n°19- 15009). On le sait, la loi Hoguet s’applique quelle que soit la qualité des participants et peu important la profession du mandant, que ce dernier soit un particulier ou un professionnel de l’immobilier (Civ. 1, 17 déc. 1991, n°90-11935; Civ. 1, 23 janv. 2019, n°18-11677).

TRACFIN

Quels sont les nouvelles obligations des professionnels de l’immobilier concernés par Tracfin ?

Le dispositif de lutte contre le blanchiment a été complété, au niveau européen, par une 5ème directive adoptée le 10 juillet 2018 (Dir. 2018/843 du 10 juil. 2018), transposée en droit interne le 12 février 2020. Ainsi, la liste des professionnels concernés par les obligations de vigilance et de déclaration est modifiée. Sont désormais visées les activités de conseil fiscal réalisées par les professionnels du droit (sauf exceptions liées au secret professionnel), les transactions gérées par la Carpa, ainsi que l’activité des greffiers des tribunaux de commerce. En matière immobilière, la location n’est plus concernée que lorsque les loyers mensuels sont égaux ou supérieurs à 10 000 €. Les syndics sont désormais exclus du dispositif. L’ordonnance de novembre 2020 confirme que les agents immobiliers doivent se conformer à l’ensemble du dispositif, sauf pour les activités de gestion immobilière, de syndic de copropriété, de location lorsque le loyer mensuel est inférieur à 10 000 €, de cession de cheptel ou de vente de fichiers relatifs à l’achat, la vente ou la location.

À noter que le bénéficiaire effectif d’une entité (société, association, fondation, fiducie…) doit fournir des informations plus complètes permettant de l’identifier et inscrites sur le registre des bénéficiaires effectifs. Les professionnels concernés doivent consulter le registre des bénéficiaires effectifs au moment de la vérification de l’identité de ces bénéficiaires, notamment à l’occasion d’une vente immobilière.

Si le professionnel concerné par le dispositif estime que le risque de blanchiment ou de financement du terrorisme est faible, à condition de pouvoir le justifier, il peut se contenter de mettre en place un dispositif de surveillance des opérations adapté aux caractéristiques de leur clientèle et de leurs produits, afin de permettre la détection de toute transaction inhabituelle ou suspecte.

Les mesures de vigilance sont, toutefois, renforcées pour les clients en lien avec un pays à haut risque recensés par la Commission européenne et par le groupe d’action financière.

Lorsque Tracfin s’oppose à la réalisation d’une opération, le professionnel qui suspend l’opération doit garder le secret sur cette opposition, sous peine de sanctions (Ord. n°2020-115 du 12 fév. 2020 , JO 13 fév., texte n°11 ; D. n°2020-118 du 12 fév. 2020, JO 13 fév., texte n 16 ; D. n°2020-119 du 12 fév. 2020, JO 13 fév., texte n°17 ; Ord. n°2020-1342 du 4 nov. 2020, JO 5, texte n 10).

La loi n°2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République(: JO 25 août, texte n°1) modifie les modalités d’exercice du droit d’opposition de Tracfin. Ainsi, lorsque le service Tracfin soupçonne qu’une opération est liée au blanchiment d’une infraction ou au financement du terrorisme, il peut faire opposition à l’exécution de l’opération mais aussi aux autres opérations qui seraient liées à la même infraction (C. mon. fin., art. L 561-24, I modifié). Les professionnels (notaires, avocats ou agents immobiliers) sont exonérés de toute responsabilité pour non-exécution de l’opération et peuvent révéler à l’autorité judiciaire ou aux enquêteurs l’opposition exercée par Tracfin en cas d’action en responsabilité engagée contre eux. (C. mon. fin. art. L 561-24, II et III modifiés).

Quelles sont les obligations de l’agent immobilier en matière de vérification de l’origine des fonds et l’identité de ses clients ?

Les professionnels de l’immobilier doivent rassembler et conserver des informations sur l’objet et la nature de la relation d’affaires qu’ils entretiennent avec leur client, afin d’exercer une vigilance anti-blanchiment, (C. mon. fin. art. L 561-5 s. & R 561-12). Parmi ces informations, outre l’identité, des éléments sur l’origine des fonds doivent être recueillis quel que soit le risque de blanchiment supposé.

En ce qui concerne la vérification identitaire, doit vérifier l’identité de tous ses clients, le fait de le connaître ne le dispense pas de vérifier son identité s’il souhaite se porter acquéreur d’un bien (Commission nationale des sanctions, n 2019-52 ; CNS, 19 déc. 2018, n°201755). Il doit obligatoirement conserver copies des pièces d’identité des clients (CNS, n°2019-24).

En ce qui concerne la provenance des fonds, l’agent immobilier n’est pas dispensé d’accomplir lui-même toutes les diligences, notamment la vérification de l’origine des fonds utilisés pour financer l’acquisition, même si un notaire intervient dès le stade du compromis de vente (CNS, n°2019-46 ; CNS, n°2019-63).

L’agent immobilier ne peut pas se dispenser de recueillir et conserver les informations sur l’origine des fonds utilisés par l’acquéreur, même si la clientèle est de nature familiale et qu’il ne dispose pas de compte séquestre et ne manipule pas de fonds au cours des transactions (CNS 12 nov. 2019).

Questionner le client sur l’origine des fonds est nécessaire, mais non suffisant, car il faut obtenir et conserver un justificatif de cette origine (CNS déc. no 2019-24 ; CNS déc. no 2019-63).

L’élaboration d’une cartographie des risques est obligatoire (C. mon. fin., art. L 561-4-1) même si l’agent immobilier n’a jamais effectué de déclaration de soupçons (CNS, 11 fév. 2021). A cet égard, une organisation interne informelle est insuffisante (CNS, n°2019-24). Il ne peut pas se contenter de reprendre les fiches établies par un syndicat de professionnels de l’immobilier, mais doit établir sa propre cartographie d’évaluation et de gestion des risques. (CNS, 17 juin 2021, n°2019-54). De même, une cartographie générale, établie pour un réseau d’une vingtaine d’agences, n’est pas suffisante (CNS, 4 juin 2016, n°2015-20).

L’agent immobilier doit mettre en place une vigilance renforcée lorsque les acquisitions sont financées exclusivement sur des fonds personnels et pour des montants importants (CNS, n°2019-46 ; CNS, n°2019-52).

En cas de plusieurs facteurs de risque (nationalité des parties, présence de représentants, clauses de substitution entre le compromis et la vente, prix élevés), la relation d’affaires ne doit pas être poursuivie tant que l’identité des parties, le bénéficiaire effectif et l’origine des fonds n’ont pas été vérifiés (CNS, n°2019-46).

Patrice BATTISTINI