Le maire de Metz et vice-président du Conseil régional du Grand Est succède à David Valence, député et ancien maire de Saint-Dié. Les neuf ports lorrains constituent un outil remarquable d’une surface approximative de 2160 hectares pour le développement industriel et logistique de la vallée de la Moselle, au service d’une mobilité durable. La réunion de fin novembre à Metz a permis de rappeler les objectifs suivis par le SMO pour 2024, à savoir :
- Accroître l’activité des ports lorrains sur toutes les filières de marchandises pertinentes – en mettant à profit les complémentarités entre les ports, pour certaines filières – et favoriser le report modal vers les modes alternatifs à la route ;
- Développer et moderniser l’outil de production pour améliorer la performance de l’activité logistique ;
- Étendre l’emprise des ports lorrains afin d’attirer de nouveaux services et industries, au bénéfice du développement économique et la création d’emplois ;
- Intégrer la stratégie de développement des ports lorrains dans une stratégie globale favorisant le développement durable, industriel et logistique de la vallée de la Moselle.
Rappel des étapes de la nouvelle gouvernance du SMO
Afin de développer les ports lorrains sur la Moselle, la Région Grand Est et Voies navigables de France (VNF) ont créé en 2018 un Syndicat mixte ouvert (SMO) chargé de la gestion et du développement : le SMO des Ports lorrains.
Le comité syndical du SMO est composé de huit membres de la Région et de sept membres de VNF. Le bureau du SMO des ports lorrains est composé d’un président et de trois vice-présidents :
- François Grosdidier le président (Région Grand Est)
- Sophie-Charlotte Valentin 1ère vice-présidente (VNF)
- Rémy Sadocco 2e vice-président (Région Grand Est)
- Valérie Debord 3e vice-présidente (Région Grand Est)
En 2019, le Comité syndical du SMO des ports lorrains a engagé une procédure qui visait à la mise en place d’un exploitant unique pour assurer le développement des neuf plateformes. En raison de la crise sanitaire et des impacts sur l’économie mondiale, ce projet n’a pas pu aboutir et la procédure a été déclarée sans suite par le SMO en novembre 2020, et ce malgré l’implication et le volontarisme affirmé de l’ensemble des partenaires.
En juillet 2021, l’ensemble de la gestion a été confiée à un opérateur privé (CFNR Transport) via un contrat de concession de deux ans et demi, se terminant le 31 décembre 2023.
Le SMO travaille actuellement à la préparation de l’exploitation et du développement des ports publics pour la période qui suivra cette concession, à partir de 2024.
Sophie-Charlotte Valentin, directrice de VNF Nord-Est dans une interview nous détaille la suite des opérations et les objectifs poursuivis par le SMO.

Sophie-Charlotte Valentin directrice de VNF Nord-Est
« Au SMO l’aménagement, au concessionnaire l’exploitation logistique »
Dans cette interview aux Affiches d’Alsace et de Lorraine, Sophie-Charlotte Valentin nous explique la suite des opérations, après la fin de la concession accordée à CFNR Transport.
Que va changer cette nouvelle gouvernance du SMO des Ports lorrains ?
- Sophie-Charlotte Valentin : « Le Syndicat Mixte Ouvert des ports lorrains, c’est la Région Grand Est et VNF. Les administrateurs sont au nombre de huit pour la Région, et 7 pour VNF. Le président est donc forcément un élu régional. Et François Grosdidier, le maire de Metz, était déjà administrateur. Il succède à David Valence. Aujourd’hui les administrateurs ont décidé d’avoir un concessionnaire unique pour tous les ports de la Moselle. C’est très important et cela rend bien plus lisible la stratégie du SMO. »
- La concession à CFNR Transport s’achève bientôt. Comment va évoluer cette concession ?
- S.C.V. : « Elle avait été décidée de courte durée, soit 2 ans et demi. Il reste un an de concession pour l’exploitant. L’objectif de la nouvelle période est de confirmer la concession à un opérateur unique pour assurer l’ensemble des activités logistiques sur tous les ports lorrains de la Moselle. Le comité syndical a émis sur ce sujet un avis unanime. Il n’y a pas du tout de revendication territoriale sur ce sujet. »
- Quel sera le nouveau concessionnaire ?
- S.C.V. : « En fait on va remettre en jeu cette concession. Il y aura un nouvel appel d’offres. C’est comme un appel à concurrence. On va travailler en deux temps : ouvrir l’appel aux candidats potentiels de manifester leur intérêt pour la concession. Dans un second temps, nous aurons une négociation plus resserrée avec certains d’entre eux. C’est une démarche très classique. »
« Une concession d’une durée de 15 ans »
- Est-ce qu’il y aura des changements à l’échelle de la concession ?
- S.C.V. : « Il y aura en effet une différence majeure entre la future concession et l’actuelle. D’abord elle était courte et ne permettait pas au concessionnaire actuel de faire des investissements très lourds, de long terme. La prochaine sera plus longue de l’ordre d’une quinzaine d’années qui permettra d’investir davantage, d’avoir un plan de développement, de bien faire jouer la complémentarité entre les installations portuaires. Une deuxième partie va changer : on ne va pas concéder toutes les fonctions. Aujourd’hui on a tout concédé : la gestion du foncier, les contrats d’occupation par les autres entreprises, plus la gestion de la manutention sur les ports. »
- Vous allez séparer les activités ?
- S.C.V. : « D’une certaine façon. Dans la prochaine concession l’activité logistique sera concédée, mais le Syndicat mixte garde en gestion une partie de l’activité en régie. On aura ainsi une cohérence territoriale avec un rôle prépondérant du SMO en direct. »
« Le SMO travaillera en régie pour l’aménagement foncier »
- Tout sera public ?
- S.C.V. : « Tout sera public. Il s’agit de ports publics, sur le domaine public fluvial transféré au syndicat mixte. On a différents types d’activité. On a des activités de manutention logistique, elles seront concédées à un opérateur ou un groupement d’opérateurs économiques. En revanche, la gestion du foncier, certains travaux d’investissements sur les parcelles, ou la gestion des contrats, notamment des baux aux entreprises sur place, seront gérés par le SMO en régie. »
- Quel est l’intérêt de ce découplage ?
- S.C.V. : « Il y a un intérêt économique. Ce ne sont pas les mêmes métiers. Faire de la gestion de l’activité logistique ce n’est pas la même chose que de faire de l’aménagement, de l’expansion foncière, de la gestion de plateformes. Il s’agit d’avoir un concessionnaire, compétitif dans le domaine de la gestion de la logistique. »
- Le SMO va conserver un rôle prépondérant ?
- S.C.V. : « Le calendrier pour le concessionnaire et le SMO ne sera pas le même. Pour les questions relevant de l’aménagement foncier, on pourra travailler sur une stratégie au fur et à mesure, en lien avec les collectivités concernées. Le SMO aura clairement une maîtrise publique sur ce sujet-là, en association avec les autres pouvoirs publics du territoire. En fait, c’est la différence entre le volet aménagement et une activité économique de transports logistiques qui requiert tout le savoir-faire d’un opérateur économique. »
- Le concessionnaire devra donc faire du business ?
- S.C.V. : « D’une certaine manière, il est chargé de développer tous les potentiels des ports de la Moselle. Il devra trouver de nouvelles filières, trouver de nouveaux tonnages, de nouvelles entreprises intéressées, trouver de nouveaux débouchés logistiques. Il y a vraiment, pour le concessionnaire ; un véritable enjeu de développement économique. Et tout ça dans l’intérêt général, celui de délester les routes et autoroutes d’un certain volume de transport de marchandises au profit d’un transport par la voie fluviale ou par le ferroviaire. On travaille à reporter le maximum de tonnage de la route vers les autres modes de transports massifiés. »
« La Moselle loin d’être saturée »
- Le SMO pourra-t-il fixer des objectifs au concessionnaire ?
- S.C.V. : « En fait c’est le cahier des charges imposé aux candidats qui devra être tenu. Nous allons du reste préparer ce cahier des charges qui comprendra un plan de développement des ports lorrains sur la Moselle. On prendra le temps d’échanger avec nos candidats potentiels afin de fixer ce plan de développement économique. Le SMO aura un regard sur la capacité du concessionnaire à atteindre ces objectifs. »
- Quel est le potentiel des ports lorrains sur la Moselle ?
- S.C.V. : « La Moselle est une infrastructure de transport loin d’être saturée. Aujourd’hui on transporte environ 5 à 6 millions de tonnes sur la Moselle. Dans les plus grosses années de transport fluvial sur la Moselle, avec notamment l’activité sidérurgique, on avait non loin de 10 millions de tonnes. Et on sait qu’à 10 Mt, l’infrastructure est encore loin d’être saturée : ni la Moselle, ni les écluses ne sont saturées, il n’y a pas suffisamment de bateaux. On pourrait même imaginer parvenir à 20 Mt sans risque de saturation. Il y a là un potentiel de tonnages de report avec beaucoup de camions en moins sur la route ou l’autoroute A 31. Et pour aller au bout de cette ambition, il faut des acteurs publics et des opérateurs privés qui soient dans une démarche de développement et de promotion de cet outil industriel. »
- Quelles sont les filières à privilégier ?
- S.C.V. : « Nous avons réalisé des études de filières pour identifier quels seraient les potentiels. En fait, il faut cibler le développement de filières de matériaux déjà transportés. Outre les céréales, il y a tous les matériaux de construction et de déconstruction du BTP. On constate aussi du transport de pâte à papier pour les usines dans les Vosges. Il y a aussi le fret de biomasse et un peu de conteneurs. Enfin, la question de la logistique urbaine se pose. Nous avons deux métropoles, Metz et Nancy, traversées par des voies d’eau qui pourraient bénéficier d’un système de logistique bien dimensionné. »
- C’est l’enjeu de la livraison du dernier kilomètre ?
- S.C.V. : « Précisément. Ce n’est plus le problème de la longue distance, mais celui de l’acheminement des marchandises du port d’arrivée à la destination finale, ici en l’occurrence la ville. On peut imaginer un service de petits bateaux. Je pense aussi au transport de colis lourds, de très grosses pièces manufacturées qui seraient transportées par convoi exceptionnel sur la route, ce qui est très compliqué et coûteux. Alors qu’en étant transportés par la voie d’eau, ils peuvent s’affranchir des contraintes routières. C’est une voie de développement qu’on a identifiée et présentée aux collectivités. »
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VNF Nord-Est : Nomination d’un directeur de la transformation
Sophie-Charlotte Valentin confirme la nomination, fin octobre, d’Olivier Arnould au poste de directeur de la transformation chez VNF Nord-Est. Il conduira la modernisation des infrastructures de VNF.
« Nous avons recruté OIivier Arnould pour assurer la transformation de VNF. Il s’agit d’adapter notre structure, notre organisation aux nouveaux engins. D’ouvrir VNF aux nouveaux partenaires, dont les collectivités. Nous avons signé un contrat de territoire dans les Ardennes (ndlr : nous reviendrons dans un prochain numéro des Affiches d’Alsace et de Lorraine sur le contrat canal des Ardennes signé cet été). Nous allons en signer un autre dans les Vosges fin janvier 2023. On travaille ainsi sur la définition d’un projet de territoire avec les collectivités, et la voie d’eau y trouve sa place, souvent, comme un service touristique, ou de fret local. On a contractualisé un cofinancement du programme sur l’infrastructure elle-même. La Région, les collectivités vont cofinancer avec VNF le programme d’investissement. C’est une modalité tout à fait nouvelle de travail, qui nous oblige chez VNF, à rendre compte différemment, à des partenaires qui cofinancent des projets. On va s’ouvrir aussi au mécénat. Et enfin la gestion de l’eau sera traitée de façon différente. »
En fait, Olivier Arnould devra mener à bien toute la modernisation de VNF. À savoir l’automatisation des postes de commandes centralisés. La fibre sera déployée tout le long des canaux pour permettre de télé-conduire les 463 écluses que compte la Moselle. Quelque 34 M€ seront investis dans les dix prochaines années afin de numériser les équipements de la voie d’eau. VNF investit également dans un réservoir artificiel d’eau à Bouzey dans les Vosges à hauteur de 5,7 M€, ceci afin d’anticiper les difficultés liées à la répétition des sécheresses en été.
Olivier Arnould est ingénieur des Ponts, des eaux et des Forêts. Il a travaillé en dernier comme chef du service aménagement biodiversité et eau à la DDT (direction départementale des territoires) Moselle. Il avait par ailleurs été chargé de mission d’aménagement, entre 2007 et 2011 à la DRE et à la DREAL (direction régionale environnement, aménagement logement) Lorraine.