Dossier Paru le 15 septembre 2023
TJ DE METZ

Audience d'installation au TJ de Metz

L’audience d’installation de septembre au tribunal judiciaire a vu l’arrivée de sept nouveaux magistrats du siège, de trois « mutants internes » et d’une vice-procureur au parquet, ainsi que d’une nouvelle directrice de greffe. Mais elle restera surtout la dernière présidée par Pierre Wagner, lequel quittera la juridiction le 1er décembre prochain.

Pierre Wagner dont c’était la dernière audience solennelle au TJ de Metz avant son départ de la juridiction le 1er décembre prochain.

L’ambiance de rentrée était légère en ce premier lundi de septembre presque estival. Pierre Wagner, le président du tribunal judiciaire de Metz affichait un sourire radieux à la perspective d’accueillir un nombre important de nouveaux magistrats. Et rarement une audience d’installation n’avait aussi bien porté son nom. Au total sept nouveaux magistrats du siège arrivent dans la juridiction, un au parquet, auxquels il faut ajouter, selon les termes du président « des mutants internes », à savoir des collègues qui changent de fonction tout en demeurant au sein de la juridiction et une nouvelle directrice du greffe, ont été présentés. « L’installation de nouveaux magistrats représente un moment important de la vie d’une juridiction. Moment important dans la mesure où cette installation est source de renouveau qui, à travers les personnalités et les expériences professionnelles et de vie de chacun, permet l’évolution tant de la réflexion que de la pratique dans le cadre de notre institution » a déclaré d’emblée Pierre Wagner. Mais c’est aussi un moment important dans la carrière des nouveaux-venus qui rejoignent « un nouvel univers professionnel, et pour la plupart, vont découvrir des fonctions inconnues avec ce que cela comporte en termes d’enthousiasme, d’excitation, d’interrogations, et parfois aussi d’appréhension.»

« Renouvellement en marche »

À l’évidence le nombre des arrivants préfigure des jours meilleurs pour la juridiction, du moins en termes d’effectifs. Et le président s’en réjouit ouvertement. « Je ne peux que me réjouir, et l’ensemble de la juridiction avec moi, au regard de ce parterre nourri de nouveaux magistrats et constater que les effectifs de renouvellement du corps de la juridiction sont en marche. » Et les annonces récentes du Garde des Sceaux n’y sont pas étrangères. De fait, selon le président « tous les postes sont officiellement pourvus et nous devrions dans les années qui viennent être plus nombreux, puisque 25 nouveaux postes de magistrats sont annoncés pour le ressort de la cour d’appel de Metz dans les quatre années à venir dont deux tiers pour le siège. » (Lire par ailleurs). Même si un bémol s’impose. Pour l’immédiat, c’est toujours l’équivalent de 3,90 ETPT (équivalent temps plein) qui manque en raison des temps partiels et congé de maladie de longue durée. Et le président de remercier le premier président de la cour d’appel d’avoir octroyé au tribunal un juge et demi placé pendant quatre mois pour pallier ces absences. Autre bémol plus marqué, le problème d’effectif du greffe où plus de 20% d’équivalents temps plein sur pratiquement 200 personnels de greffiers et fonctionnaires font défaut. « Or sans greffiers et fonctionnaires, la justice ne peut pas fonctionner, on le dira et on ne le répétera jamais assez. »

« Notre complicité… »

Pierre Wagner termine cette entrée en matière par une touche plus personnelle. S’adressant au procureur de la République Yves Badorc, le président confirme son départ de la juridiction dans quelques semaines. « Nous menons aujourd’hui de concert notre dernière audience commune puisque je vous quitterai le 1er décembre prochain. Cette audience signe en quelque sorte, avec quelques mois d’avance, l’accomplissement de notre complicité de presque deux années professionnelles, fécondes et intenses… mais le moment n’est pas encore celui des adieux alors je m’arrêterai là, sur ce chapitre, de crainte de nous faire monter prématurément des larmes. »

Yves Badorc : l’hommage public à Pierre Wagner

Le procureur de la République Yves Badorc, est revenu sur le rite de cette audience d’installation. « Elle rappelle que la justice est rendue au nom du peuple français. » Au plaisir d’accueillir ces nouveaux magistrats, se glisse selon le procureur « une once de tristesse. Il s’agit d’une dernière. Celle d’avoir le privilège d’accompagner notre président, je vais le dire, mon président, à l’occasion d’une audience solennelle. Il m’était impossible à cet instant de ne pas te rendre hommage publiquement, très cher Pierre, de te remercier de tout ce que tu as accompli pour la justice, pour ce tribunal et pour le bien de tous. » Il salue ensuite les greffiers et fonctionnaires de ce tribunal, en rappelant au passage le « rôle cardinal de ce métier trop méconnu et ô combien essentiel à la justice. » Et pour Yves Badorc, friand de citations littéraires, l’accord-cadre signé le 13 juillet dernier, lui fait penser à ces mots de Romain Gary : « Il est permis d’avoir de l’idéal, des aspirations et se donner beaucoup de mal pour essayer de les réaliser, mais c’est l’espoir qui compte. » Un espoir entretenu par les récentes avancées du Garde des Sceaux « qui augurent de jours meilleurs et permettent d’espérer. »

« La richesse de la magistrature »

Ses mots de bienvenue s’adressent aussi aux collègues du siège : « Chers collègues, vos parcours variés et vos carrières seront incontestablement un atout pour la juridiction. Vous incarnez la richesse de la magistrature et surtout la diversité de son recrutement. Trois d’entre vous connaissent leur premier poste et viennent de prêter serment. Serment qui fait prendre la mesure de ces obligations. » Et de rebondir sur Marcel Pagnol. « J’espère que vous ferez mentir cet auteur cher à mes yeux : les serments comme les personnes perdent leurs forces en vieillissant ». Il pouvait ensuite présenter Élise Bozzolo, sa nouvelle vice-procureur.

« Une équipe, un esprit d’équipe »

Le procureur a commencé par présenter son équipe avant de préciser ce qu’il en attendait. « Vous intégrez aujourd’hui une équipe composée de magistrats expérimentés, solidaires et aidés dans l’accomplissement de leurs attributions par des juristes assistants, ou des chargées de mission, forces vives de notre parquet. Ce n’est pas à vous que j’apprendrais que le métier de magistrat du parquet est exigeant et éprouvant, puisque vous l’exercez depuis presque 20 ans. » Au terme du parquet, Yves Badorc préfère celui de Ministère Public. « Dans son acception essentielle, c’est un ministère qui crée des devoirs à la charge de celui qui l’exerce, un ministère qui est public en ce qu’il représente les intérêts de la société qu’il se doit de protéger, un ministère public que vous allez désormais représenter auprès de notre tribunal. Le ministère public c’est aussi une équipe, plus encore, un esprit d’équipe que chacun en son sein doit cultiver à travers une vision commune qui repose sur la solidarité, l’engagement, la confrontation, la loyauté et la reconnaissance. »

« Faire corps dans l’adversité »

Il dessine une vision forte de ce ministère public et insiste sur la solidarité. « Le ministère public est indivisible parce qu’il est d’abord la marque de la solidarité entre ses membres. Faire corps dans l’adversité alors que la justice évolue dans une société dont la complexité est parfois réduite par la radicalité de l’expression ou de l’action de certains, une société dans laquelle la nuance tend à se dissoudre, autant que le doute, dans des certitudes effervescentes et aussi éphémères que l’air du temps. Le ministère public doit faire corps, plus que jamais et faire face à la violence, qui nous oblige plus et encore. » Il cite alors Pierre Truche, un grand magistrat qui affirmait « qu’il ne fallait pas désarmer l’État. Son arme c’est la loi, et la violence de la loi est indispensable face à la violence contre la loi (…) »

« Vous ne serez jamais seule… »

Mais il rappelle que « l’État considère en certaines circonstances que l’usage de cette violence légale est inutile et que les juges peuvent se dispenser de peine. La voie est tracée. Réprimer sans faiblesse tout en recherchant la peine la plus adaptée. Ni trop, ni trop peu aurait dit Aristote. La juste mesure comme la recherche d’un équilibre qui se trouve dans la compréhension d’une situation, ou d’une cause prise dans toutes ses dimensions, c’est être tournée vers le juge afin de faire que le débat favorise une décision éclairée et acceptée de tous. » Il termine en parlant de la reconnaissance. « L’équipe n’est pas grand-chose sans la reconnaissance. C’est celle que vous doit votre chef, c’est plus encore le respect dû à vos fonctions car vous demeurez en tant que magistrat, garant des droits et libertés individuels. Mme Élise Bozzolo, vous ne serez jamais seule. Vous serez aidée par une équipe du parquet composée de greffiers, greffiers militaires, fonctionnaires, juristes assistants, et chargées de mission, délégué du procureur de ce parquet, tous dévoués, et aussi enthousiastes que moi à vous accueillir et que je remercie de tout le travail accompli. »

« Vous réussirez dans vos fonctions »

Il s’adresse enfin à Élise Bozzolo après avoir remercié Sophie Debas, qui a quitté le parquet de Metz pour rejoindre celui de La Rochelle en qualité de procureur-adjoint. « Je sais que vous réussirez pleinement dans vos fonctions car j’ai déjà pu goûter votre motivation. Vous avez des qualités. Vous n’avez connu que le parquet » dit-il. Substitut à Douai à sa sortie de l’École de la magistrature en 2003, puis substitut à Arras en 2006 où elle réalise son avancement en tant que vice-procureur, elle vient d’Angoulême où elle était en poste depuis 2018. « Votre première qualité est d’avoir de la chance, même beaucoup de chance, parce que vous avez baigné depuis votre sortie d’école dans les eaux chaudes et douces du parquet. Vous incarnez une justice à visage humain. C’est le plus beau compliment que peut recevoir un magistrat. Vous allez rejoindre le service des mineurs. Vous allez continuer à réparer des vies. Vous trouverez très vite votre place et surtout ne changez rien. » Le président Pierre Wagner complétera sa présentation car il a été « pratiquement directement à l’origine de sa vocation, jamais démentie pour le parquet. Mme Bozzolo a effectué quelques jours de stage dans mon cabinet il y a 20 ans alors que j’étais au parquet de Strasbourg. »

Les partants et les nouveaux-venus au siège

Pierre Wagner n’a pas oublié de saluer les partants de la juridiction. Olivier Maire, juge du contentieux de la protection pendant 5 ans et qui réalise son avancement comme vice-président du procureur à Nancy en juin dernier.

Grégoire Martinez, juge des contentieux de la protection au tribunal de proximité de Sarrebourg pendant trois ans. Il rejoint le TJ de Rennes pour y prendre les fonctions de juge.

Olivier Largange, juge des contentieux de la protection depuis 3 ans. Il prend des fonctions de juge au tribunal judiciaire de Fort-de-France à la Martinique.

Il en vient aux visages connus de la juridiction qui changent de fonction.

- Mme Marie-Pierre Bellomo, vice-présidente. Après une première vie professionnelle comme attachée d’administration, elle intègre la magistrature et sera pendant sept ans juge au tribunal de Troyes. En septembre 2019 elle arrive à Metz. Elle est affectée à la première chambre civile, dans laquelle elle s’est pleinement épanouie. Elle s’est partagée de manière égale entre les deux sections de cette chambre : celle de la responsabilité des contrats et celle de la construction « tous deux contentieux souvent techniques et complexes et que vous avez abordés avec exigence et compétence » assure le président. Elle prend les fonctions de vice-présidente en charge des contentieux de la protection et rejoint la 4e chambre de ce tribunal.

- Mme Fabienne Laval-Gilly, vice-présidente qui n’était pas présente en cette journée. Après des fonctions de greffière en chef, Fabienne Laval-Gilly a été juge du livre foncier à compter de 2010, d’abord à Saverne puis à Thionville en 2013. Elle rejoint Metz en 2013 pour y exercer les fonctions de juge aux affaires familiales. Elle réalise son tableau d’avancement en 2018 à Nancy en 2018 comme vice-présidente à l’application des peines. Elle revient à Metz comme vice-présidente au tribunal des enfants il y a deux ans. Elle sera affectée à la chambre correctionnelle pour une activité à temps partiel.

- Mme Cécile Gasnier, juge. Elle n’a pas pu être présente pour des raisons de proche maternité. Elle quitte à sa demande ses fonctions de juge d’instruction qu’elle exerce depuis 4 ans, pour rejoindre la première chambre civile à son retour.

Les nouveaux arrivants

- Mme Carine Bourel. Elle est officiellement en poste dans cette juridiction depuis le 15 mars dernier, mais a effectué son stage obligatoire de pré-affectation. Elle arrive en premier poste comme vice-présidente et affectée à la chambre de la famille où elle aura en charge un des cabinets pour traiter du droit du divorce, de l’après divorce et du hors divorce. Un droit qui ne lui est pas inconnu car elle l’a connu lors de sa profession d’avocat qu’elle a exercée pendant près de 20 ans à Metz, puis en Meuse où elle a été bâtonnier en 2016.

- Mme Véronique Kretz, vice-présidente. Elle a intégré la magistrature en 2015 et a exercé ses premières fonctions comme juge d’instance au tribunal d’instance de Montbéliard pendant deux ans puis les mêmes au TI de Schiltigheim en 2017. Depuis janvier 2020 elle a été juge des contentieux de la protection au tribunal de proximité de Haguenau. Elle réalise son avancement en rejoignant le tribunal de proximité de Sarrebourg. Elle y découvrira l’aspect de juge aux affaires familiales qui relève de cette juridiction.

- Mme Adeline Guetaz, vice-présidente. Elle vient de Nancy où elle exerçait depuis 2021 les fonctions de juge après avoir commencé sa carrière en 2016 à Montbéliard. Elle rejoint le TJ de Metz en qualité de vice-présidente des contentieux de la protection. Elle est affectée à la 4e chambre civile.

- Mme Jeanne Seichepine, vice-présidente. Après avoir exercé les fonctions de juge à Basse-Terre en sortant de l’école de la magistrature en 2016, elle a été juge de l’application des peines à Strasbourg jusqu’en 2019. Elle réalise son tableau d’avancement en prenant les fonctions de vice-présidente des libertés et de la détention et rejoint le pôle composé de trois magistrats dont un était absent depuis le mois de janvier dernier.

- M. Grégory Malengé, juge à Metz au pôle social. Après une première vie professionnelle comme avocat dans le nord de la France, il intègre la magistrature comme juge à Tulle en 2020. Il rejoint Metz en même temps que sa compagne Mme Élise Bozzolo. Il rejoint le pôle social où son arrivée est très attendue « car la charge du pôle est lourde et M. Lizet qui en est le coordinateur, est seul juge depuis plusieurs mois après le départ non remplacé d’une collègue » précise le président. L’objectif est donc de faire diminuer le stock des dossiers qui est important, et de réduire l’ancienneté des affaires et la durée moyenne des procédures.

- Mme Aline Guldner et Thibaut Probst. « Vous représentez la jeunesse en marche de cette installation et aussi celle de cette juridiction » s’est exclamé le président Wagner. Ils sont tous deux sortants de l’École nationale de la magistrature. Leurs premières fonctions : Aline Guldner sera juge d’instruction et Thibaut Probst juge des enfants. Aline Guldner reprend le cabinet de Mme Gasnier dont une partie de l’activité concerne le contentieux économique. Thibaut Probst reprend le cabinet de Mme Laval-Gilly occupée de fait par Mme Faye, juge placée depuis un an. « Vous ne serez pas déçu, tant les fonctions de juge des enfants sont riches mais souvent complexes devant la difficulté de certaines situations. »

- Mme Dorothée Thouille était depuis 2022 détachée sur un poste d’attachée d’administration chargée de mission zonale de défense et de sécurité à la cour d’appel de Metz. Elle arrive au TJ de Metz comme directrice de service de greffe judiciaire pour reprendre des activités qu’elle a déjà connues précédemment. Elle était greffière de 2010 à 2018 à Soissons dans l’Aisne, de mars à juin 2018 greffière au TGI de Laon dans l’Aisne, de 2020 à 2021 directrice de greffe judiciaire placée à la cour d’appel de Metz. Elle va reprendre les attributions de son prédécesseur en prenant en charge notamment le suivi du registre du commerce et de société et le Tribunal de proximité de Sarrebourg.

Le président leur a renouvelé ses voeux de bienvenue au Tribunal judiciaire de Metz en leur souhaitant le meilleur dans le cadre de leurs nouvelles attributions professionnelles.

Des recrutements pour la juridiction

Selon un communiqué du député messin de la majorité, Ludovic Mendes, le Garde des Sceaux a bien annoncé « les premières répartitions des recrutements massifs prévus dans les tribunaux d’ici 2027. » Ces mesures, permises par la loi de programmation du ministère de la Justice votée cet été, « vont augmenter de manière significative les effectifs des cours d’appel, notamment à Metz » indique le député. Cette loi devrait porter le budget du ministère de la Justice à un niveau inédit de 11 milliards d’euros par an d’ici 2027, soit une hausse de 21% sur la durée du quinquennat.

Ainsi c’est plus de 66 postes qui seront octroyés à la cour d’appel de Metz répartis comme suit : 25 magistrats, 20 greffiers et 21 attachés de justice. Le ressort de la cour d’appel de Metz comprend les tribunaux judiciaires de Metz, de Thionville et de Sarreguemines. La hausse est significative. Avec au moins 25 magistrats en plus cela représente +17% en 5 ans, 20 greffiers de plus soit +10% en 5 ans. Comme l’a répété Pierre Wagner lors de cette audience d’installation « les effectifs de renouvellement du corps de la juridiction sont en marche. »

De gauche à droite les nouveaux magistrats de la juridiction : Adeline Guetaz, vice-présidente JCP, Elise Bozzolo, vice-procureure, Carine Bourel, vice-présidente, Jeanne Seichepine, vice-présidente JLD, Véronique Kretz, vice-présidente JCP au tribunal de proximité de Sarrebourg, Aline Guldner, juge d’instruction, Grégory Malengé, juge, Thibaut Probst, juge des enfants, Dorothée Thouille, directrice de service de greffe judiciaire.

Bernard KRATZ