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Dossier Paru le 19 janvier 2024
ENVIRONNEMENT

Une sensibilisation des notaires pour développer la protection des arbres

Benoît Hartenstein, notaire de métier, est passionné par la protection des arbres. Membre d’un groupement de réflexion et d’une association, il veut promouvoir cette problématique, la faire connaître et engager un véritable travail pédagogique à destination du grand public. Et il souhaite effectuer ce travail de sensibilisation en mobilisant ses confrères de la Chambre des notaires de Moselle.

Ils sont tous les deux notaires et connaissent bien le droit. Le premier Me Benoît Hartenstein, s’est rendu fin novembre à la Chambre des notaires où l’a accueilli Me André Lombardi, son président. Plus d’une heure durant, ils ont échangé pour faire avancer la cause des arbres, le sujet de prédilection de Benoît Hartenstein depuis quelques années. Il a trouvé auprès du président de la chambre des notaires de Moselle une oreille attentive et plutôt bienveillante, car André Lombardi dit « avoir toujours été passionné par la nature. Et la cause des arbres est des plus nobles. » Pour Benoît Hartenstein, le lien entre cette cause et les notaires est tout trouvé. C’est évident. « Les notaires sont au coeur des transmissions de patrimoine. Or les arbres ont toute leur place dans ce patrimoine. Encore faut-il que les particuliers en aient connaissance. Sensibiliser les propriétaires aux arbres ça dépend un peu de nous, des notaires » dit-il. Selon lui « plus il y aura de propriétaires qui contactent les notaires sur cette question, plus les notaires s’engageront dans cette voie. »

Une démarche écologique

En clair, le notaire souhaite promouvoir sa cause, celle des arbres, via les notaires qui sont en première ligne lors des transmissions de propriété. « En fait, il s’agit de faire sortir l’arbre de l’oubli. Quand on vend des maisons, on ne parle malheureusement pas du tout des arbres. On pourrait imaginer sous l’impulsion des notaires, faire le recensement des arbres les plus remarquables afin de mieux les protéger. Rien que d’en parler leur donnerait de la valeur. Mieux, cela ferait prendre conscience qu’un terrain arboré prendra de la valeur ! » Assurément l’argumentaire du promoteur de la cause des arbres s’entend, et André Lombardi y consent pleinement. Il en est intimement convaincu. Reste à connaître la façon de procéder pour faire passer ce message à caractère écologique. « L’approche environnementale est la bonne » estime le président de la Chambre des notaires de Moselle. « Il n’y a aucun obstacle à recenser les arbres les plus remarquables. Je crois même qu’il y en a à Metz et dans ses environs. Du reste je pense qu’il existe même un classement des arbres, c’est assez rare. J’approuve totalement cette démarche d’informer les gens, les particuliers, de les sensibiliser à la valeur de leur arbre au sein de leur propriété. »

Former les notaires

Il suggère même de mettre dans le circuit, d’autres acteurs parte­naires, comme les agents immobiliers eux aussi directement concer­nés dans les transactions immobilières. Pour Benoît Hartenstein « on oublie trop souvent les arbres au niveau du droit. Il suffirait juste d’informer les gens qu’il y a là une possibilité de protéger leurs arbres, même s’ils ne sont pas remarquables. Le fait de les mentionner dans un acte de vente serait déjà un premier pas. Et les notaires indiqueraient aux propriétaires comment faire pour protéger ces arbres. »

La sensibilisation des particuliers passe par le notaire. Et en la matière Me Hartenstein se dit prêt à former ses confrères à cette problématique. « On peut tout à fait envisager de faire quelque chose à la chambre des notaires. On peut fort bien organiser une formation sur la protection des arbres, sur les clauses à introduire etc. » assure le président de la chambre des notaires de Moselle.

« On humanise le métier de notaire »

« Protéger les arbres, c’est protéger les hommes » lance, tel un avocat Benoît Hartenstein, dans son plaidoyer pour la défense des arbres. Son objectif est bien sûr de faire avancer cette cause, d’améliorer la législation. Une action de lobbying à destination des parlementaires ne le convainc pas. « Cela avancera sur un plan politique et législatif lorsque les citoyens le demanderont » dit-il. « Je suis engagé dans un travail de fond extrêmement long. Mon rayon d’action, ce sont les propriétaires privés qui ont des arbres et qui sont responsables de leurs arbres. Un jour beaucoup de citoyens seront responsabilisés sur leurs arbres, alors les élus leur emboîteront le pas. »

Dans sa volonté de faire avancer sa cause, Benoît Hartenstein estime que le soutien des notaires va aussi « contribuer à humaniser le métier de notaire. » Cette action deviendrait exemplaire, surtout si elle est promue à l’échelle de l’Alsace Moselle. « Nous serions un peu les précurseurs » se réjouit le notaire.

Préserver juridiquement les arbres en limite de propriété

L’idéal selon Benoît Hartenstein, serait d’intégrer une loi ARBRE dans le code de l’environnement. « Ce serait plus facile que de l’intégrer dans le code forestier. » il sait de quoi il parle. Il enseigne à l’Université de Lorraine le droit forestier dans le travail des notaires. Mais c’est bien la protection des arbres sur terrain privé, hors les forêts, qui reste l’enjeu de son engagement. Dans son groupe de réflexion et au sein de l’association A.R.B.R.E.S. (Arbres remarquables, bilan, recherche études et sauvegarde) il milite pour préserver juridiquement les arbres en limite de propriété. Et cela pourrait passer par un acte notarié, contractuel entre voisins soucieux de préserver les arbres limitrophes. Il est également possible d’identifier les arbres lors des transferts de propriété, en introduisant une clause dans l’acte de vente qui mentionne la présence des arbres les plus significatifs sur la propriété et que l’on ferait figurer dans le paragraphe « Désignation du bien ».

Ce type d’avancées juridiques participerait grandement selon lui « au maintien et à la conservation des arbres. Chacun peut devenir acteur en protégeant les arbres sur un terrain. Mais les bienfaits ne s’arrêtent pas aux limites du terrain, ils dépassent les propriétés privées. »

« Les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle pourraient être précurseurs, en la matière, au niveau régional.

Le prochain Congrès des Notaires de France, qui aura lieu à Bordeaux en 2024, devrait se pencher également sur la protection juridique des arbres, en terrain privé.

Au niveau national, cette nouvelle mission espérée du Notariat est déjà soutenue par le DEFRENOIS ; l’une des deux plus grandes revues juridiques de la profession.

Si le Conseil Supérieur du Notariat, instance représentative de la profession, pouvait relayer à son tour, cette grande cause ; une avancée significative de plus serait réalisée, dans l’intérêt collectif ».

Me Benoît Hartenstein

Bernard KRATZ