Dossier Paru le 09 février 2024
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE METZ

Audience solennelle de rentrée

L’audience solennelle de rentrée du tribunal judiciaire de Metz était cette année l’audience d’installation du nouveau président de ce tribunal, Manuel Delmas-Goyon. Elle a permis de rendre un hommage appuyé à son prédécesseur, Pierre Wagner, parti à la retraite, et de rendre compte de l’activité de la juridiction.

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Ce n’était pas une audience solennelle de rentrée classique. En cette matinée de janvier, la salle d’audience du tribunal judiciaire de Metz était comble. Elle accueillait le monde institutionnel, les autorités, venus faire connaissance avec le nouveau président. Ce fut une audience dense avec des discours de haute tenue, souvent riches en belles citations. Yves Badorc, le procureur de la République, rappela du reste l’importance de ce rite ou tradition de l’audience solennelle en citant le conseil supérieur de la magistra­ture dans son avis du 13 décembre 2023 évoquant les discours de ladite audience de rentrée solennelle qui constituent « un moment privilégié pour exposer publiquement les sujets de satisfaction et de préoccupation des magistrats et fonctionnaires aussi bien quant à la situation de la juridiction où ils exercent leurs fonctions qu’en ce qui concerne l’évolution de l’institution judiciaire, y compris les réformes en cours et la législation et réglementation applicables. » Les intervenants du jour ne se sont pas privés d’aborder la réalité de leur quotidien au sein de la juridiction avec parfois une touche d’humour, apportant ainsi un peu de légèreté à la gravité de leur propos. Cette audience a donné le ton de l’année judiciaire qui s’annonce. Elle a commencé par des mots de reconnaissance à Pierre Wagner, parti à la retraite.

L’hommage à Pierre Wagner

Le procureur de la République a simplement rappelé que Pierre Wagner avait «accompagné mes premiers pas dans la magistra­ture et au sein de ce tribunal. Incontestablement il en a marqué l’histoire. Le moment était donc venu pour moi de lui témoigner publiquement à nouveau toute mon amitié.»

Michel Albagly, premier vice-président qui a assuré l’intérim, n’a pas oublié les sept ans d’exercice de Pierre Wagner au sein de la juridiction. Il avait déjà eu l’honneur de procéder à son installation. « Depuis ce jour, notre juridiction aura su s’adapter à de nombreux événements : la fermeture des ex-tribunaux d’instance, la création du Tribunal judiciaire, un important mouvement de grève des avo­cats au cours de l’année 2018, la suspension forcée de l’activité judiciaire normale lors de la pandémie de Covid-19. Ceci dans un contexte marqué par la disparition des juges de proximité et puis la diminution des magistrats à titre temporaire et par une fréquence élevée de congés maladie, témoignage à l’évidence de cette souf­france au travail à laquelle les magistrats n’échappent pas. » Et le président Wagner aura dû se confronter « à cette dure réalité en décidant, pour le paraphraser, de ne pas faire avec ce qu’il n’avait pas et d’en tirer honnêtement les conséquences en supprimant des audiences ou bien en s’opposant à la création de nouvelles. À l’évidence, la crise sanitaire de l’épidémie de Covid-19 aura été une épreuve de vérité pour un chef de juridiction et M. Le président Wagner aura tout mis en oeuvre pour que la reprise de l’activité se fasse dans les meilleures conditions. Il a parfaitement réussi. »

Il souligna enfin avec force son action pour soutenir le Centre départemental de l’accès au droit de la Moselle, le CDAD. « Il ap­portait plus que son soutien à ce symbole de la politique de l’accès au droit dans le département créé en 2000, lequel devait engager une salariée à temps plein, Mme Virginie Thomas. Aujourd’hui le CDAD, dont le budget est d’environ 250 000 euros, a pu obtenir une véritable reconnaissance. Par une participation active et de terrain, Pierre Wagner a toujours témoigné un attachement fort à cette action de proximité de nature à délester les maires de certaines catégories de conflits et à faire connaître au citoyen ses droits.» Il citera les 26 000 personnes ayant eu accès à des permanences de l’accès au droit dans le département en 2022. Il pouvait achever cet hommage : « Pierre Wagner aura incarné une idée : l’idée de servir et de le faire en présentant toujours un bon visage et cette belle prestance qui l’habillait naturellement et que l’on identifiait au premier coup d’oeil, à l’instar de son accent attachant qui l’ac­compagnait depuis toujours. Chacun de nous gardera de notre président le meilleur souvenir. »

La présentation du nouveau président Manuel Delmas-Goyon

• Le procureur de la République Yves Badorc, s’adressant « à ce cher Manuel » ne cacha pas « sa joie ni l’honneur qui lui était donné de procéder à votre présentation. Un moment rare, un moment rempli de solennité mais aussi un moment d’émotion alors que l’on perçoit en cet instant la responsabilité immense qu’impliquent les devoirs de votre charge : celle de président du TJ de Metz. » Et il brossa rapidement le parcours de Manuel Delmas-Goyon, avant que Michel Albagly ne le fasse de façon plus détaillée. « Votre parcours est incontestablement une richesse pour notre juridic­tion. » Le nouveau président a sillonné la France : Lisieux, Orléans, Béthune, Douai, Reims, Tarbes, Brest, dans presque toutes les fonctions de magistrat du siège qu’il a également connues à la cour d’appel. « Metz est votre troisième poste de président après Tarbes et Brest. Après le pic du Midi, la rade de Brest vous allez découvrir maintenant les rives de la Moselle, une ville magnifique, Metz et un département attachant, chargé d’histoire, je dirai même au coeur de l’Histoire. Vous allez d’ailleurs découvrir des spécificités que sont le droit local, la compétence en matière de lutte contre les atteintes à l’environnement, le tribunal étant pôle régional en­vironnemental ou encore la compétence interrégionale s’agissant des affaires pénales militaires. »

• Michel Albagly, qui présidait cette audience, pouvait ensuite, lui-aussi souhaiter « la bienvenue au Tribunal judiciaire qui est désormais votre maison. Elle a une très longue histoire dont ces murs conservent la mémoire. » De fait, il nous a un peu rafraîchi la mémoire, en rappelant que ce palais était, à l’origine, la résidence du gouverneur militaire de Metz, symbole du pouvoir royal dans les provinces ainsi que des intendants des Trois-Évêchés et que sa construction telle qu’aujourd’hui, est due à l’architecte Charles Louis Clérisseau au 18e siècle. « En raison de la Révolution, on peut constater que la façade côté rue Juge Michel reste inachevée. C’est en 1812, que l’édifice devient palais de justice. Un palais regrou­pant en un seul site le tribunal judiciaire et la Cour d’appel… une Cour monodépartementale, la seule de France métropolitaine ! » Un petit cours d’histoire non négligeable avant de détailler le parcours du nouveau président. Son entrée dans la magistrature en 2000 marque son intérêt pour des fonctions de juge d’instance exercées au tribunal de Lisieux en 2002 puis pour celles spécialisées de juge d’instruction à Orléans en 2005 puis à Béthune en 2007. Il passe au Premier grade comme Vice-président placé à Douai en 2009 avant d’occuper les fonctions de secrétaire général à la Cour d’appel de Reims en 2013. Il s’oriente ensuite vers des postes de direction de juridiction, à Tarbes en septembre 2015, puis dans un poste hors hiérarchie comme chef de juridiction à Brest « d’où vous arrivez avec une très riche expérience en matière de management. C’est en homme de terrain que vous vous définissez. » Il termina en rap­pelant que Manuel Delmas-Goyon est né à Paris, qu’il ne connaît pas ou peu notre région à l’exception d’un séjour à Metz dont il devrait découvrir les styles et legs urbanistiques liés à « l’histoire particulière de Metz et ses périodes d’annexions successives. » Il est aussi amateur de jazz. Michel Albagly termina en assurant que « tout sera mis en oeuvre pour faciliter votre installation (…) ».

Manuel Delmas-Goyon, une fois installé fit à son tour un brillant premier discours, que nous évoquerons après le gros chapitre consacré à l’activité du tribunal.

Manuel Delmas-Goyon le nouveau président du TJ de Metz

Le procureur de la République : « La crise enfin prise en considération »

Comme à chaque audience de rentrée, il est désormais question du fonctionnement de la justice. Et sur ce terrain la tonalité du procureur de la République change, évolue. Parlant de la loi de programmation de la justice il reconnaît « que la crise qui traverse notre institution a été enfin prise en considération, à la mesure de sa profondeur, de son intensité et des formes multiples dans la suite des états généraux, qu’il s’agisse de la hausse de son budget sans précédent ou de la revalorisation des métiers. » Il cite les annonces faites pour « voir le nombre de magistrats, greffiers et juristes assistants venir grossir les rangs des effectifs de nos juridictions. Certains effets sont déjà tangibles : en 2021 le parquet de Metz comptait deux juristes assistants. Ils sont désormais cinq. » Il se félicite en passant que Christophe Jakubowski ait pu réaliser son avancement sur place comme vice-procureur. Il compose avec trois autres magistrats, deux greffières, une juriste assistante et un assistant de justice, le service du traitement en temps réel (la permanence) colonne vertébrale de l’action publique. Christophe Jakubowski incarne l’ouverture de la magistrature puisqu’il a troqué l’uniforme de militaire de la gendarmerie pour la robe de magistrat « à la très grande satisfaction de tous. » Pour autant un poste de magistrat du parquet est toujours vacant, mais il est compensé par la délégation d’un substitut placé.

« Le chemin est encore long »

Le procureur souffle le chaud et le froid. « Des améliorations ont été perçues, mais au regard des chiffres de la commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ), il est surtout question d’un rattrapage et que le chemin est encore long, même s’il est plus lumineux et c’est tant mieux. » Préférant voir le verre à moitié plein que le verre à moitié vide, Mark Twain vient à la rescousse qui dit « qu’il vaut mieux être un optimiste qui se trompe parfois qu’un pessimiste qui a toujours raison. »

Il en vient à cette justice qui se modernise à marche forcée avec les nouvelles technologies. « La procédure pénale est toujours en cours de déploiement avec pratiquement tous les flux ouverts : convo­cation devant le tribunal correctionnel, déferrements, ordonnance pénale et certains classements sans suite. » Cette transformation numérique est un projet structurant qui doit cette année mener la juridiction vers le zéro papier !

L’activité pénale soutenue

Le procureur en vient aux statistiques : l’activité pénale reste sou­tenue avec plus de 40 000 procédures enregistrées au parquet, des poursuites et des jugements rendus par le tribunal correctionnel. Les comparutions immédiates (559 procédures) se maintiennent à un niveau élevé. « Elles ont un impact sur l’activité du tribunal correctionnel dont la capacité de jugement n’est plus en adé­quation avec le volume des poursuites » assure Yves Badorc. De fait, cette année 2023, tout type de procédures correctionnelles confondues, (en dehors des ouvertures d’information judiciaire) ce sont plus de 1011 procédures qui ont donné lieu à un déferrement, soit 1119 prévenus.

Les violences intra-familiales : un enjeu fort

« Le traitement des violences intra-familiales est toujours un enjeu fort » rappelle le procureur de la République. Avec le président, il devra mettre en oeuvre le décret du 23 novembre dernier instituant les pôles spécialisés VIF dans les juridictions, pôle qui a pour but de garantir une plus grande efficacité de l’action coordonnée des acteurs et partenaires. Sur ce point, il salue le travail mené par les policiers et militaires de la gendarmerie et des associations CIDFF (Centre d’information des femmes et des familles) et l’AEIM (as­sociation de parents). « L’approche doit être globale et concerne également la protection de l’enfance et toutes les personnes vul­nérables. Le parquet de Metz poursuit sa contribution à la stratégie nationale de lutte contre les violences faites aux enfants ainsi que celle de lutte contre le harcèlement scolaire aux côtés des autres acteurs institutionnels. »

Trois sujets de préoccupation

Appelant les élus de la représentation nationale à ne pas oublier de reprendre les travaux sur le statut du parquet, question qui ressemble à un serpent de mer vieux de 20 ans, le procureur de la République a mis l’accent sur trois sujets de préoccupation.

• Les délais de comparution devant le tribunal et plus encore les délais de jugement qui s’étaient allongés. « Ils ont pu être maîtrisés mais demeurent trop longs, plus d’une année lorsque le prévenu est convoqué. Délai à nuancer puisqu’il ne recouvre que la moitié des poursuites devant le tribunal correctionnel. » Il invite les avocats à s’emparer de la CRPC (comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité), qui permettra au prévenu d’être jugé plus vite mais donnera aussi de l’oxygène au tribunal correctionnel. « La CRPC dans le cadre des déferrements a permis d’éviter l’embolie, puisque 143 affaires ont été traitées de cette manière en 2023, première année de sa mise en oeuvre » insiste Yves Badorc. Pour le procureur « la maîtrise des délais est un chantier, un défi pour répondre aux impératifs d’une justice répondant aux attentes de nos concitoyens. » Il cite pour convaincre les travaux de chercheurs affirmant que « le temps est un facteur essentiel d’incompréhension, de désarroi et de colère. » Pour Yves Badorc « la justice ne vaut que par la confiance qu’elle inspire. Le délai entame la confiance des justiciables. » Il en appelle aux préconisations de la commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ) qui doit tendre à une « effectivité des droits s’assurant de la qualité de l’information fournie au tribunal, de l’accessibilité et des aménagements du tri­bunal, de la qualité du fonctionnement du tribunal, de l’intelligibilité des convocations, des délais, de la ponctualité des audiences, de la compétence des personnels autres que les magistrats. » De fait des actions sont en cours sur ces thématiques au tribunal de Metz, mais « il nous appartiendra Monsieur le président de persévérer car le service public de la justice concourt à l’accès au droit. »

• La question de la prison et la place de l’emprisonnement. Il cite le taux d’occupation du centre pénitentiaire de Metz qui est de 144%. En décembre la France a atteint son niveau record de détenus. Pour Yves Badorc « il ne s’agit plus de Surveiller et punir comme le suggérait Michel Foucault quand il questionnait la pri­son, mais de Réguler et punir ! » Selon lui, une prison surpeuplée ne répond plus à l’ambition que lui confère la loi : « protection de la société, prévention de la commission de nouvelles infractions, restauration de l’équilibre social dans le respect des intérêts de la victime dans le but de sanctionner l’auteur, favoriser son amen­dement, son insertion ou sa réinsertion. » Là aussi il cite l’effort de régulation que permet la libération sous contrainte de droit : le condamné bénéficie d’un aménagement de peine sur le reliquat de 3 mois à exécuter dès lors que le quantum global est inférieur ou égal à 2 ans d’emprisonnement.

• Les trafics de stupéfiants préoccupent le procureur. Yves Badorc parle en la matière, de « crise. » Citant Edgar Morin, il évoque « cette crise qui affecte plus ou moins gravement un système vivant, la société. Si elles cessent d’être refoulées et se développent, les déviances deviennent des tendances de plus en plus puissantes qui menacent de plus en plus l’organisation de la société ou du système en crise (…) » Passé ce constat le procureur de la République réaffirme avec force que « le parquet de Metz pour­suivra avec la police et la gendarmerie nationale, sans oublier la douane, à réprimer les trafics sans faiblir sans oublier toutes les actions de prévention qui doivent être menées de front avec nos partenaires institutionnels(…) » Il associe aussi les maires à travers les instances de prévention de la délinquance ou les groupes locaux de prévention de la délinquance comme celui de Metz.

Un mot sur l’administration du tribunal

Le procureur de la République terminera son propos de façon plus légère en s’attardant sur l’administration du tribunal. À l’idée d’une dyarchie, de deux chefs, il rappelle qu’il ne faut en rien négliger la directrice de greffe Mme Aubaterre : « si nous sommes les pilotes de l’ensemble, elle en est l’indispensable navigatrice. Je vous rassure Monsieur le président, le tribunal a atteint sa vitesse de croisière, point de décrochage en vue. » Il trouve enfin cette jolie formule inspirée de la pratique « chacun sait que dans un tribunal le président fait tout et le procureur s’occupe du reste. » Il rappelle enfin, s’adressant au président : « Vous allez oeuvrer à la destinée de ces lieux dont la majesté renvoie à l’histoire, mais ce qui fait la richesse de ce palais ce sont surtout les gens qui l’occupent au quotidien, cette communauté de travail constituée de fonctionnaires, greffiers contractuels, directeurs de greffe, assistants de justice, juristes assistants, délégué du procureur, magistrats, sans oublier ceux qui assurent notre sécurité, policiers et agents de sécurité. »

Le procureur de la République Yves Badorc

Michel Albagly présente l’activité du tribunal

• Le pôle civil : En guise de préalable, le premier vice-président a parlé du siège. Le sous-effectif est à hauteur de 2,8 équivalents temps plein (ETPT) soit un poste de magistrat du siège non pourvu et 1,8 ETPT correspondant à des temps partiels. Et deux magistrats placés sont affectés dans la présente juridiction. Même constat pour le greffe : 201 agents au 1er janvier alors que la circulaire en prévoit 205. Mais avec les congés maladie, temps partiels, on n’en dénombre que 181. « Gageons que vous serez le témoin d’une vraie amélioration » espère le premier vice-président qui se réfère aux recrutements massifs annoncés par la loi de programmation : 10 000 emplois dont 1500 magistrats et 1800 greffiers pour un budget qui passera à 11 milliards d’euros en 2027. Il évoque au passage les questions de surcharge de travail, de souffrance au travail et des conséquences de ce manque de moyens. En particu­lier le fait que la première chambre du Pôle civil a fonctionné avec un effectif de seulement trois magistrats pour composer les deux sections. Conséquence : son activité n’a été possible pendant le dernier trimestre qu’avec le concours d’un juge des contentieux de la protection. Le stock des affaires est de 1294 avec 619 décisions rendues soit un taux de couverture négatif de -39% et de nom­breuses décisions ont été rendues hors délai. Pour 2024 l’effectif a été renforcé d’un magistrat équivalent 0,5 ETPT.

Il veut croire dans la mise en oeuvre du Règlement amiable des différends avec une audience spécifique tenue par un magistrat honoraire. Cette nouvelle procédure est de trouver un compromis soit à la demande des parties soit après saisine du juge. « L’inflexion vers une justice de négociation marquera-t-elle un tournant ? La question reste ouverte » dit-il.

• Chambre de la famille. La deuxième chambre civile a rendu en 2023 quelque 2182 décisions pour 2641 affaires soit un taux de couverture de 82%. On note une augmentation conséquente des affaires nouvelles : 2641 en 2023 contre 2195 en 2022 soit une hausse de 20%.

• La chambre commerciale, la troisième chambre est celle des procédures collectives. Elle est actuellement composée de 2,6 ETPT. La section du contentieux a été renforcée fin 2022 avec l’apport d’un magistrat à temps partiel qui a permis de réduire les délais de fixation en plaidoirie qui sont passés de 18 mois à un an à ce jour. L’affectation d’une assistante de justice et depuis mi-novembre d’une juriste assistante préfigure peut-être une amélioration du fonctionnement de cette chambre. Constat inté­ressant, la section des procédures collectives qui avait connu une baisse significative, en raison de la pandémie, a retrouvé au cours de l’année, le niveau d’activité antérieur. Les PME éprouvent des difficultés à rembourser les PGE (prêts garantis par l’État) dont elles ont pu bénéficier.

• La 4e chambre du contentieux de la protection et du droit local. L’année 2023 a révélé une légère augmentation du contentieux civil et des référés qui représentent au total 802 et 643 affaires nouvelles. Les injonctions à payer sont passées de 3621 à 4071 requêtes. Les mesures de tutelle administrées par le tribunal progressent pour dépasser pour la première fois les 5000 en cours, témoignage du vieillissement de la population qui impacte nos juridictions.

• Le tribunal de proximité de Sarrebourg. L’activité est en plein essor : 164 saisines ont été enregistrées pour le contentieux civil contre 154 en 2022, 445 requêtes en injonction de payer contre 358 en 2022, 108 saisines du juge des tutelles contre 100 l’année précédente. Le tribunal s’est vu attribuer depuis 2020 des compé­tences matérielles nouvelles relatives au contentieux des affaires familiales. En la matière, il a rendu 224 décisions en 2023 contre 190 en 2022 et a enregistré 174 affaires nouvelles contre 167 une année auparavant. En 2024, il s’agira de favoriser le redéploiement de l’activité du tribunal de proximité dans des locaux rénovés du site historique, sans rupture du service public.

• L’activité du pôle pénal. Ce dernier souffre de délais d’audience­ment et de jugement considérés comme trop longs, dont l’un des facteurs est l’impact de la politique pénale nationale concernant les VIF, violences intra-familiales. L’urgence de leur traitement sans délai et systématique a eu pour effet de retarder l’examen d’autres dossiers. Néanmoins l’instauration des CRPC déferrements a permis de contenir ces délais en réduisant le nombre de comparutions immédiates.

• Activité du Pôle des libertés et de la détention. En 2023 ce service a bénéficié de la présence effective de 3 juges à temps plein. Ce service a constaté une évolution du nombre de dossiers de l’ordre de 15% sur les trois contentieux (pénal, hospitalisations d’office et droit des étrangers). Elle avait déjà augmenté en 2022 de 25%, notamment le contentieux des isolements-contentions.

• Le Pôle de l’instruction. Il comprend quatre cabinets tous pour­vus d’un juge d’instruction et d’un greffier. Il a connu en 2023 une hausse des ouvertures, 171 contre 146 en 2022. L’année 2023 aura permis de clôturer 124 dossiers sur les quatre cabinets, contre 110 en 2022, ce qui est le témoignage de l’implication des magistrats de ce service.

• Le Pôle de l’application des peines. Il a connu en 2023 un ac­croissement de son activité en raison de nombreuses dispositions nouvelles. Avec l’entrée en vigueur au 1er janvier 2023 des libérations sous contrainte de plein droit, on a enregistré une augmentation de la charge de travail en raison du doublement du temps de pré­paration des Commissions d’application des peines. Cette mesure vise à réguler les peines d’emprisonnement. En 2023 le Service d’application des peines a rendu 4089 décisions contre 3596 en 2022 dans un contexte de sous-effectif de greffe et d’absence prolongée d’un magistrat.

• Le Pôle des mineurs. Il comprend des fonctions diverses. En assistance éducative (mesures d’assistance éducative et mesures d’aide à la gestion du budget familial) on relève une augmentation constante des saisines depuis 2020. Les situations arrivent au tribunal, de plus en plus dégradées, ce qui induit un suivi renforcé et une charge de travail conséquente. Cela donne 895 saisines en 2023 contre 812 l’année précédente. Le service a rendu 3275 dé­cisions. Il existe 1898 dossiers en cours contre 1722 en 2022. Sur le versant répressif, 410 jugements ont été rendus en 2023 contre 367 en 2022. Le nombre de déferrements a doublé sur l’année.

• Le Pôle social. Sa situation demeure préoccupante. Malgré un net ralentissement des nouvelles saisines durant environ 3 ans, ce qui avait permis une certaine stabilisation, l’année 2023 a pris un tour nouveau avec une nette croissance soit +32% sur un an avec 1749 entrées, un chiffre ne pouvant que croître avec le retour du contentieux URSSAF, mis en veille pendant la pandémie. Le stock a augmenté de 23% passant de 2867 dossiers à 3540. En l’état de l’effectif, il apparaît difficile de ne pas craindre que les délais ne puissent être assurés.

Les atouts précieux du TJ de Metz

Michel Albagly, habitué des intérims à la présidence du TJ de Metz, a remercié, le personnel qui l’a soutenu pendant cette période de­puis le 1er décembre dernier. « Cela a permis à cette juridiction de fonctionner à peu près normalement et vous permet de la découvrir dans le meilleur état possible. » Il a pour finir assuré au nouveau président qu’il pouvait compter à Metz sur des atouts précieux. On ne les citera pas tous, mais ils concernent pour l’essentiel, la qualité du personnel : « des magistrats pourvus d’un véritable esprit de solidarité et de recherche de l’excellence, des équipes de directeurs de greffe dynamiques et volontaires, des fonctionnaires motivés, un barreau d’une grande loyauté (…) ». Et la qualité des acteurs de la chaîne pénale sans oublier commissaires de justice, notaires conciliateurs de justice bénévoles, partenaires associatifs. Il conclut en restant convaincu « que l’exercice de la fonction dans une nouvelle région constitue pour vous un enrichissement incom­parable. Soyez assuré que l’ensemble des magistrats du tribunal judiciaire de Metz vous accompagnera avec loyauté et engagement pour écrire cette nouvelle page de l’histoire de cette juridiction. »

Michel Albagly premier vice-président qui a présidé l’audience de rentrée et d’installation du nouveau président

Manuel Delmas-Goyon « les raisons de me réjouir sont nombreuses »

Le nouveau président est apparu jovial, serein, ravi d’être à cette place nouvelle pour lui. Manuel Delmas-Goyon a pris soin d’avoir un mot pour chacun, des personnalités institutionnelles au personnel de la juridiction, jusqu’aux journalistes de la presse judiciaire, les re­merciant de leur présence pour ce jour si particulier pour lui. Et aussi à ces terres lorraines qu’il ne connaît pas. Dans ses précédentes fonctions de président de tribunal judiciaire « dans des territoires à forte personnalité en Bigorre au pied des Pyrénées, ou dans le grand Ouest finistérien. Je me réjouis de découvrir un ressort bien différent, mais avec une culture tout aussi forte. » Il en avait aussi bien d’autres. « Les raisons de me réjouir sont nombreuses, a-t-il reconnu. L’accueil dont j’ai bénéficié tout d’abord, ma première visite de la ville de Metz, la riche histoire du département, sans oublier ses spécificités culturelles et juridiques (…) ». Mais ce sont bien sûr ses mots adressés au personnel du tribunal judiciaire de Metz qui ont retenu toute l’attention. Il n’a pas oublié Pierre Wa­gner qui l’a accueilli au sein de la juridiction et dont il évoque « la compétence, l’humanité, le sens de l’écoute. Il m’a accueilli avec une délicatesse et une amicale sollicitude. »

S’adressant aux magistrats du siège il reconnaît « que les chantiers ne manqueront pas parmi lesquels la création du pôle spécialisé dans la lutte contre les violences intra-familiales et la nouvelle procédure du règlement amiable mais également les difficultés d’effectifs (…) » Il compte bien s’attaquer à l’épineux problème des délais de juge­ment. Et il découvre dans cette juridiction « des acteurs de la justice profondément investis dans leurs missions et dotés d’un esprit de service public chevillé au corps. » Il donna au procureur de la République sa vision de leur entente au sommet de la juridiction : « mon cher Yves, nous savons l’un et l’autre que cette harmonie et ce climat de confiance sont déjà acquis entre nous. » Des mots qui ne peuvent que solidifier la dyarchie au sein de la juridiction. Aux greffiers il redit une évidence : « sans greffier un magistrat ne peut juger ! » Il ne jure que par le collectif. « À l’époque où l’effi­cacité des méthodes de travail est devenue déterminante, si l’on veut maîtriser le traitement des contentieux de masse, il apparaît clairement que cette efficacité est une oeuvre collective (…) » Aux collègues des tribunaux de Thionville et de Sarreguemines, aux services de la gendarmerie et de la police, aux avocats du barreau de Metz, aux notaires, commissaires de justice, experts judiciaires, il délivre des messages de respect et de confiance.

Assurément, le nouveau venu à la tête du tribunal judiciaire de Metz est parvenu avec ce ton chaleureux à séduire son auditoire. Ne lui reste que le plus difficile, animer le fonctionnement et la vie de la juridiction messine.

Bienvenue à Metz, M. Manuel Delmas-Goyon !

Une juge consulaire

Michel Albagly a installé Maryse Friedmann comme juge consulaire. Elle a connu le monde de la grande entreprise, ArcelorMittal pendant de nombreuses années. Juriste de formation, elle a été directrice juridique ce qui lui a ouvert de nombreux domaines de droit. Elle rejoint M. Constantini président des juges consulaires.

Bernard KRATZ