Dossier Paru le 31 mai 2024
JOURNÉE NATIONALE D’ACCÈS AU DROIT

L'accès au droit en Moselle et dans le Bas-Rhin

Pour la journée nationale de l’accès au droit, le 24 mai dernier, le Centre départemental d’accès au droit qu’anime Virginie Thomas a proposé un thème d’actualité : la justice restaurative. Elle a élaboré un programme très riche.

Si vous avez vu le film « Je verrai toujours vos visages », la justice restaurative n’aura plus de secret pour vous. C’est une pratique innovante qui vient du Canada qui n’est pas forcément dans notre culture de mettre en lien victime et auteur d’infraction. Ce thème n’a pas véritablement de lien direct avec l’accès au droit, mais selon la responsable du CDAD de Moselle, « il est important de le mettre en lumière, d’informer et de sensibiliser le grand public, sur ce qu’est la justice restaurative, son intérêt pour les victimes, et pour les auteurs de délits afin notamment de réduire la récidive. » En ce vendredi 24 mai, journée nationale de l’accès au droit, Virginie Thomas a concocté un programme avec les interventions du président du Tribunal judiciaire de Metz et président du CDAD, Manuel Delmas-Goyon, ainsi que du procureur de la République, Yves Badorc, vice-président du CDAD, mais également de person­nalités pleinement engagées dans la justice restaurative.

Comment fonctionne la justice restaurative

Virginie Thomas nous détaille l’approche de cette thématique pour la journée de l’accès au droit. « Elle permet de mettre en lien, en contact des victimes d’infractions avec leurs auteurs. Ce qu’avait fort bien montré ce film, Je verrai toujours vos visages. Avant le Covid, dans la juridiction, nous avions commencé à mettre en place tout un processus de justice restaurative. C’est assez lourd à créer : il faut choisir les auteurs, choisir les victimes, le tout se fait sur la base du volontariat, on ne peut pas l’imposer. Il y a plu­sieurs options : soit l’auteur rencontre sa victime, soit des auteurs avec des victimes d’infractions similaires. Nous avions lancé ce processus de mise en place avec des associations de victimes, avec le SPIP, le service pénitentiaire d’insertion et de probation qui dépend du ministère de la Justice. C’est un service très important entre la Maison d’arrêt et la juridiction. Dans le fonctionnement de la justice restaurative, c’est bien le SPIP qui est chargé de trouver des auteurs d’infractions volontaires. » Le Covid a interrompu le processus de lancement de la justice restaurative dans la juridiction.

Relancer le processus à Metz

Virginie Thomas insiste sur le fait qu’en sollicitant un auteur d’in­fraction pour s’engager dans la justice restaurative, on ne propose aucune contrepartie, aucune carotte. « En revanche cette rencontre avec la victime peut permettre une prise de conscience de l’au­teur, sur l’impact de son acte sur la victime. Il peut se remettre en question, réfléchir à ce qu’il a fait, pour peut-être éviter la récidive. C’est aussi une des missions du SPIP quand il travaille avec des détenus afin de favoriser une réinsertion. » Lorsqu’on évoque les résultats pour mesurer l’efficacité de cette justice restaurative, la responsable justifie cette mise en lumière lors de la journée natio­nale de l’accès au droit. « Je n’ai pas connaissance des résultats de la justice restaurative. D’où l’importance de sensibiliser les gens à cette approche. » Du reste, c’est une rencontre avec une magistrate de la juridiction de Metz, référente justice restaurative, qui l’a convaincue d’organiser cette journée. « Selon cette magis­trate il existe un vivier, il y a des gens motivés au SPIP, au sein des associations d’aide aux victimes. On voudrait relancer le processus avec la signature d’une nouvelle convention pour que ça reparte, et qu’on crée des rencontres entre des victimes et des auteurs d’infractions. » Or une rencontre détenu, condamné et victime, peut prendre beaucoup de temps. Mais au final « si la rencontre aboutit, le bénéfice pour tout le monde peut être tellement riche, tellement positif. » C’est un peu le message que le CDAD a tenu à faire passer à l’occasion de cette journée du 24 mai.

Plusieurs types de justice restaurative

De quel type de rencontre s’agit-il dans la justice restaurative ? Est-ce une rencontre groupée comme on a pu l’observer dans ce film ? Pas forcément. Il y a la médiation restaurative où il est question d’une rencontre entre l’auteur et la victime, mais aussi les rencontres détenus victimes et les rencontres condamnés victimes, car il existe le cas de condamnés qui ne sont plus détenus. « Il y a plusieurs sortes de rencontres avec l’intervention de conseillers. Ce n’est pas simple. Il y a des animateurs, des conseillers péni­tentiaires d’insertion et de probation qui travaillent pour le SPIP, d’autres en lien avec les associations d’aide aux victimes. Il y a aussi des gens qui représentent la société civile qui sont comme des facilitateurs de cette justice restaurative. Ils viennent apaiser le climat, les tensions, pour créer du lien. Ce sont des bénévoles. » Vu la motivation et la détermination de toutes ces personnes visible­ment prêtes à s’engager dans la pratique de la justice restaurative, la relance dans la juridiction devrait se concrétiser très rapidement avec la signature de la convention qui réunira la cour d’Appel, le tribunal judiciaire, les associations d’aide aux victimes, le SPIP. « On espère pouvoir concrétiser cette pratique à partir de 2025 » affirme Virginie Thomas.

« C’est un film ! »

Elle nous raconte une expérience inédite et significative. « J’ai eu la chance de participer à la projection de ce film à la Maison d’arrêt de Metz en présence de détenus. Ils étaient incrédules. Pour eux, c’est un film, ça n’existe pas. On leur a confirmé que la justice restaurative existait bien. Ils n’en revenaient pas. Surtout de voir un détenu sortant de prison qui revient pour poursuivre l’expérience de justice restaurative jusqu’au bout. » Elle rappelle que ces animateurs et conseillers sont formés, des formations qui sont financées par le ministère de la Justice. Emmanuelle Levy, juriste au CIDFF de Metz Thionville formée à l’animation de la justice restaurative, est venue témoigner sur l’importance de la formation, tout comme Karoline Gouvion, conseillère pénitentiaire d’insertion et de probation.

Retours d’expérience

Autre intervention inédite au cours de cette journée, le témoignage d’une avocate à la Cour du Luxembourg, Me Anne Hertzog, facili­tateur de justice restaurative. « Elle est justement très pratiquée au Luxembourg comme en Belgique, et ce témoignage devrait enrichir notre démarche » remarque l’animatrice du centre départemental de l’accès au droit. Autre apport intéressant autour de la justice restaurative avec les mineurs qui a été instaurée à Thionville avec la protection judiciaire de la jeunesse. Nathalie Hettler, coordinatrice et médiatrice en justice restaurative et assistante sociale UEMO (unité éducative en milieu ouvert) qui a présenté les grandes lignes de son expérience à Thionville. Enfin des retours d’expérience de professionnels animant des programmes de justice restaurative ont été partagés. Ce sont des conseillers venant du Vaucluse dont une conseillère pénitentiaire d’insertion et de probation, Céline Benlasbet, et du président de l’association Réparer Écouter Accompagner en justice restaurative, Alain Hennenfent. Et pour mieux comprendre la justice restaurative, Eulalie Spychiger, coordinatrice de l’antenne Sud-Ouest de l’Institut français pour la justice restaurative est venue expliquer tous les enjeux de cette démarche innovante.

Le rendez-vous a été donné à la Bibliothèque du tribunal judiciaire de Metz.

Bernard KRATZ

Voir les infos sur le site www.cdad-moselle.justice.fr

Courriel : cdad-moselle@justice.fr

La journée nationale d’accès au droit au tribunal de Strasbourg

Cette journée est organisée par le Conseil Départemental de l’Accès au Droit du Bas-Rhin (CDAD 67). Elle a pour vocation de permettre à tous les citoyens de rencontrer des professionnels du droit : avocats, notaires, commissaires de justice, délégués du Défenseur des droits, conciliateurs de justice, médiateurs, associations et services de l’État afin de leur donner la vision la plus complète des actions menées en faveur de la justice et de l’accès au droit.

Monsieur Philippe Babo, le nouveau président du tribunal judiciaire de Strasbourg est de fait le nouveau président du CDAD67.

C’est donc à ce titre qu’il a accueilli l’ensemble des professionnels et des bénévoles des associations présents ce jour dans la salle des pas perdus du tribunal de Strasbourg.

Après avoir remercié l’ensemble des acteurs présents, le président a rappelé que la mission des CDAD67 a été fixée par la loi du 10 juillet 1991. Il souligne que cette mission « vise à développer une justice de proximité et traduit la volonté permanente du ministère de la justice, de lutter contre les exclusions et les inégalités en matière d’accès au droit. »

Afin de montrer l’importance du travail effectué par toutes ces structures (détail dans l’encadré) qui illustrent la vitalité du CDAD sur le Bas-Rhin, le président a partagé quelques chiffres clés sur la fréquentation des 16 points-justice généralistes ou spécialisés qui couvre l’ensemble du département.

Cette fréquentation est en hausse de 12 % en 2023 avec 4 133 bénéficiaires.

En ce qui concerne les domaines traités, le droit des étrangers représente plus de 18% de l’activité des points-justice. Le droit du travail progresse fortement passant de 9% à 17%. Le droit de la famille baisse et passe de 20% à 14% des demandes. La demande en droit pénal reste stable à 8%.

Philippe Babo a également souligné la mise en place du point-justice transfrontalier créé en 2023 et présent dans les locaux du « Centre Européen de la Consommation » à Kehl. Comme il l’a précisé : « Ce dispositif d’accès au droit, unique en Europe, s’inscrit dans le cadre de la coopération franco-allemande et vise à offrir aux citoyens de notre région un meilleur accès à la connaissance de leurs droits privés et individuels afin de faciliter leur vie quotidienne et renforcer la sécurité juridique dans leurs échanges transfrontaliers. »

La fréquentation de ce point d’accès au droit prouve, s’il en était besoin, sa pertinence avec plus de 400 demandes au cours de l’année dernière.

Un autre élément mis en avant par le président est l’attention par­ticulière que porte le CDAD67 à l’accès au droit des jeunes. Avec l’aide de la protection judiciaire de la jeunesse, des barreaux et des collectivités locales, 3 permanences gratuites d’avocats dédiées aux mineurs ont été créées en 2023. Elles sont implantées au sein des agences France Service de Bischwiller, Sarre-Union et Schirmeck. Ces dispositifs viennent en complément des dispositifs déjà en place comme le Digidoc Droit, outil à destination des collégiens et lycéens, ou les permanences de l’association SOS France Victimes sur le campus universitaire.

Comme le souligne Monsieur Babo, « L’évènement que constitue le forum qui se tient aujourd’hui confirme, s’il en était besoin, le dynamisme de l’accès au droit dans le département, non seule­ment dans les centres urbains le composant, mais aussi dans les zones rurales. »

Il a également annoncé qu’il souhaitait, pour l’année prochaine, organiser en complément de ce forum, des manifestations dont le contour reste à définir et qui se dérouleraient dans plusieurs quar­tiers de Strasbourg « pour aller à la rencontre de leurs habitants et leur proposer, au plus près de chez eux, la possibilité d’entrer en contact avec des professionnels du droit et des structures parfois méconnues de leur part. »

Enfin, le président a remercié tous les membres du conseil d’ad­ministration du CDAD et bien entendu Monsieur Vivien Whyte, secrétaire général du CDAD et cheville ouvrière de nombreuses initiatives mises en place.

Philippe Babo a souhaité marquer sa volonté de poursuivre l’action entreprise par cette conclusion : « Comme l’a dit Monsieur Ghera l’année dernière à cette même place, accéder à la connaissance de ses droits est indispensable dans une société démocratique pour les défendre de manière effective lorsqu’ils ne sont pas respectés. »

Monsieur Philippe Babo, président du tribunal judiciaire de Strasbourg et du CDAD67 et Madame le procureur de la République Yolande Renzi.

Les organismes présents lors de ce forum étaient nombreux :

1. Préfet du Bas-Rhin – France Services

2. Commission européenne pour l’efficacité de la Justice

3. Parquet d’Offenburg

4. Défenseur des Droits

5. Groupement de gendarmerie du Bas-Rhin

6. Tribunal judiciaire de Strasbourg

7. Tribunal administratif de Strasbourg

8. Groupement de soutien de la base de défense de

Strasbourg-Haguenau-Colmar

9. Direction régionale des douanes et droits indirects

10. Service pénitentiaire d’insertion et de probation du Bas-Rhin

11. Direction régionale des finances publiques

12. Protection judiciaire de la jeunesse

13. Caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin

14. Ordre des avocats du barreau de Strasbourg

15. Chambre départementale des notaires du Bas-Rhin

16. Chambre régionale des commissaires de justice près la cour d’appel de Colmar

17. Compagnie des experts de justice près la cour d’appel de Colmar

18. Ordre des avocats du barreau de Saverne

19. Institut de justice amiable du barreau de Strasbourg

20. Association Alsace médiation et centre rhénan de médiation

21. Plateau médiation familiale 67

22. Association Viaduq France Victimes 67

23. Association SOS France Victimes 67

24. Association CRESUS Alsace

25. Association UFC que choisir

26. GECT Eurodistrict Pamina

27. Association frontaliers Grand-Est

28. Association ADIL 67

29. Association CIDFF du Bas-Rhin

30. Association CIMADE Alsace-Lorraine

31. Fédération du secours populaire du Bas-Rhin

32. Association centre européen de la consommation

33. Délégués du procureur de la République

34. Association des conciliateurs de justice d’Alsace

35. Caisse d’allocations familiales du Bas-Rhin

La Rédaction