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Dossier Paru le 26 juillet 2024
BIENNALE DES COMMISSAIRES DE JUSTICE

La diversité des missions et des responsabilités pèse sur ce métier complexe

La 1ère rencontre des Commissaires de Justice s’est déroulée récemment, au Palais de la Musique et des Congrès de Strasbourg. Ce rendez-vous a pour objectif de mettre en relation ces professionnels de la justice. Leur défi ? Faire émerger de nouvelles méthodes de travail, et répondre plus spécifiquement à la demande des justiciables.

Benoit Santoire entouré des lauréats du prix prospective 2024 de la Biennale des commissaires de justice

Trois questions à Benoît Santoire, président de la chambre nationale des commissaires de justice, pour mieux connaître ce métier

Quelles sont les activités des commissaires de justice ?

Benoît Santoire : Le statut de Commissaire de justice a été défini, suite à la création en 2015 de la loi « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques », par Emmanuel Macron alors ministre de l’Économie.

De fait, depuis le 1er juillet 2022, les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires deviennent des commissaires de justice. Ils procèdent à l’exécution des décisions de justice et des titres exécutoires, ainsi qu’aux ventes judiciaires. Ce regroupement d’activités est pour nous l’occasion de lever les préjugés qui pèsent sur l’image de l’huissier de justice. Car les commissaires de justice ne réalisent pas que des expulsions et des notifications ! Leurs rôles consistent aussi à accompagner les entreprises. Ils ont également une mission d’amortisseur social, car ils sont chargés de trouver des solutions pour accompagner les personnes en difficulté, plutôt qu’au judiciaire. Nous souhaitons profiter de ce changement de nom pour modifier l’image et certains fonctionnements du métier.

La profession compte actuellement 3 500 experts : à moins de 50 km de chez vous, il y a une étude de Commissaire de Justice ! C’est un métier contraignant, et qui engage de nombreuses responsabilités.

Y a-t-il des actions de communication pour faire connaître les facettes de ce métier ?

B. S. : Depuis janvier, une campagne de publicité de la Chambre Nationale des Commissaires de Justice est visible sur les chaînes du Groupe France Télévisions. Cette campagne de notoriété vise à faire connaître au grand public, particuliers et entreprises, l’en­semble des missions que cette profession met à disposition des justiciables. Des vidéos sont également diffusées sur Tik Tok. Et des déplacements sont prévus, dans toutes les cours de justice de France, pour aller à la rencontre des justiciables.

Quelles sont les spécificités et les évolutions de ce métier ?

B.S. : Nous notons une véritable dynamique de féminisation dans notre métier. De fait, nous devons travailler sur la modification des textes qui nous régissent. Par exemple, pour ce qui concerne le remplacement dans le cadre du congé maternité ou maladie. C’est une forte demande de nos consoeurs. Nous avons fait une proposition dans ce sens, au Ministère de la Justice.

Dans un autre domaine, l’Intelligence Artificielle va sans aucun doute impacter notre métier. Car nous nous situons entre un monde réel et virtuel ! Nous sommes à une époque où l’on peut facilement modifier une image, falsifier un document ou une preuve visuelle. C’est un risque permanent ! D’ailleurs, le secteur des assurances révèle que le nombre de fraude à l’assurance est en évolution, avec un taux estimé à 75 %. Le Commissaire de Justice peut être le rempart à ces falsifications, car il est habilité à faire un constat, permettant d’attester la véracité d’une image, d’un document ou d’une situation. Ce constat a force probante devant un tribunal, a donc une valeur de preuve.

Les conseils que je pourrais donner à ceux qui souhaitent s’engager dans ce métier, seraient d’être persévérant, de travailler et d’avoir des objectifs. Car le concours de Commissaire de Justice est plus difficile que celui d’avocat. Il est aussi plus simple de s’associer que de travailler en indépendant, car il existe alors la possibilité d’échanger, de partager et de se conseiller.

La rencontre biennale s’est faite sur fond de concours à projets

Sandra Etheve, Commissaire de Justice, a animé cette journée de rencontres et d’échanges, rythmée par la présentation de projets. Ceux-ci étaient présentés par des Commissaires de Justice venus de toute la France. L’objectif de ce concours ? Présenter des thé­matiques prospectives, permettant de faire évoluer les pratiques, et les offres de service de ce métier.

De fait, un jury a été institué pour décerner le « prix de la prospec­tive », créé par la Chambre Nationale des Commissaires de Justice. Le jury était chargé d’élire la proposition qui remporte l’assentiment général. Un échange interactif avec le public avait lieu, puisque celui-ci votait également. Ces propositions, présentées par dif­férentes équipes, se devaient d’être prospectives et novatrices.

Les lauréats ayant remporté le prix, pour leur projet « La signification personnalisée» sont Me Laura Chesnel, Commissaire de Justice de la cour d’appel d’Orléans, Me Mélanie Marir, Me Gwenaëlle Prenelle et Me Anthony Pochon, Commissaires de Justice de la cour d’appel de Nancy. Leur thématique choisie portait sur les explications des termes juridiques, et l’utilisation d’un vocabulaire à la portée du justiciable, accessible par le biais d’un QR code. Le but ? Rapprocher les justiciables de la justice. Ils ont lancé leur présentation, en interpellant les jurés et le public : « nul n’est censé ignorer la loi ! Mais comment les justiciables peuvent-ils appliquer la loi, quand ils n’en comprennent pas les termes ? Est-ce aux commissaires de justice d’expliquer les termes juridiques ? ». La présentation a explicité le concept de ce QR code. Celui-ci permet­tant une lecture facilitée des documents juridiques, par le biais de différentes approches : lecture audio du document, augmentation de la police de caractère, traduction en langue des signes, ou encore explication – voire définition – des termes juridiques. Cette approche favorise l’inclusion sociale.

Lors de la présentation du challenge, Sandra Etheve a souligné : « notre souhait est de donner aux jeunes membres de la profession la possibilité de devenir des acteurs, de les intégrer à nos réflexions sur l’évolution de la profession, ce qui n’est pas monnaie courante ».

De nombreux projets thématiques

Les Commissaires de Justice étaient nombreux à relever ce défi, en équipe ou en solo. Les sujets proposés étaient pertinents, et adaptés à l’évolution de la profession. Quelques exemples :

– Une proposition de déjudiciarisation des procédures, afin de permettre aux propriétaires de récupérer plus rapidement leurs logements, lorsque le locataire ne donne plus signe de vie. Partant d’un constat : en 2023, 5 000 locataires ont abandonné leur loge­ment sans aviser leur propriétaire. Et de la volonté du législateur de réduire les délais d’obtention de certificats. Ce projet permettrait de réduire les délais de traitement du dossier.

– Mener autrement les recouvrements d’impayés. Aymeric, Naïké Manent, Sarah Larregain, de la Cour d’Appel de l’Ile de la Réunion, ont fait le déplacement vers la métropole, pour présenter leur projet : « Pour identifier un besoin, il faut poser des questions ! La contrainte liée à la quantité de temps et à la charge de travail consacrée est importante, par rapport aux frais engendrés, notam­ment dans le cadre des recouvrements des petites créances. De fait, le recouvrement amiable est très peu usité dans le métier de commissaire de justice ». Dans une optique de dynamisation de leur métier et de diversification de leurs activités et ressources, ce trio a imaginé la création d’une plateforme numérique. Nommée Aurora, elle permettrait la gestion des finances et des créances personnalisées et automatisées, pour simplifier la facture et le re­couvrement des entreprises et artisans. Avec en plus, la possibilité de vendre aux enchères les créances directement sur la plateforme, aux Commissaires de Justices, avec le bénéfice d’une commission.

La voie des Commissaires de Justice s’ouvre vers des perspectives créatives et de multiples évolutions. La proximité avec les justiciables peut amorcer une différence, et permettra peut-être aux citoyens de renouer – voire de se réconcilier – avec les professionnels de la loi.

La Chambre Nationale des Commissaires de Justice

Pour tout savoir sur la profession, la formation, connaître les tarifs et accéder à l’annuaire officiel des Commissaires de Justices

https://commissaire-justice.fr

 

Pour continuer

– Le groupement national des commissaires médiateurs organise la 2ème université d’été, les 6 et 7 septembre 2024, à Château Lusseau – Bordeaux.

Information et inscription : contact@gncm-mediation.com

– Les éditions Juridiques & techniques : vente d’ouvrages et de magazines spécialisés. Contact : EJT – 73 boulevard de Clichy – 75009 Paris – www.editions-ejt.com

CH.BE.