« Des compensations et quelques mesurettes pour certaines filières ont bien été envisagées » par le président de la CeA. « Mais rien de concret » n’est finalement sorti de ces discussions jugées « stériles » voire « nulles » par Brigitte Kempf et David Roemer, co-présidents, de la Fédération des transporteurs d’Alsace, à l’issue de la rencontre. Ceux-ci déplorent « un passage en force » et sont déterminés à poursuivre le « combat ». Pour les représentants du secteur des transports, « cette pseudo taxe ne va rien résoudre ». Ils réfutent « la théorie de la CeA qui consiste à dire qu’en appliquant une taxe de 15 cents au kilomètre, cela fera repartir les camions en transit en Allemagne », alors qu’outre-Rhin les camions sont taxés à 34 cents. « Cela ne tient pas », souligne Brigitte Kempf qui déplore que la CeA « persiste et signe » pour imposer une taxe qui « à part malmener nos entreprises, ne sert à rien pour le développement économique alsacien et ne résoudra pas le problème de la pollution atmosphérique. »
« Une scission entre les institutions locales et les entreprises »
À Colmar, les membres du Collectif pour la compétitivité de l’économie des entreprises alsaciennes ont tour à tour exprimé leur déception devant une foule de manifestants massés sur le parvis du siège de la CeA. Le collectif avait pourtant mené des discussions pendant plusieurs mois avec les services de la collectivité. Les opposants « pensaient que les arguments pour préserver la compétitivité des entreprises allaient être pris en compte ». Lors de la rencontre, l’ensemble des secteurs représentés ont exprimé leur incapacité à répercuter les surcoûts générés par cette nouvelle taxe. Sébastien Muller, président de l’Association Régionale de l’Industrie Alimentaire (ARIA), qui défend les intérêts du « deuxième secteur économique en Alsace », craint que la R-Pass ait une incidence sur « les produits locaux qu’il faudra payer plus chers au détriment de nos consommateurs qui sont aussi nos salariés. » Pour les exploitations viticoles, « dont certaines d’entre elles subissent des résultats négatifs », Gilles Ehrhart, président de l’Association des Viticulteurs d’Alsace, redoute que cette taxe « aggrave leur situation », regrettant le manque de « soutien et d’écoute » de la part des élus de la CeA. Jean-Luc Heimburger, président de la CCI Eurométropole, souligne que « les camions français payent déjà la taxe à l’essieu » et que « la France est le pays le plus taxé d’Europe. » À l’image de l’ensemble des acteurs économiques alsaciens, le président de la CCI souhaite que le vote soit reporté de 6 mois, « ce serait une façon de cesser de nous mépriser ». Jean-Luc Hoffmann, président de la chambre de métiers d’Alsace, regrette que « cette taxe vienne aujourd’hui de l’intérieur. Elle marque une scission entre les institutions locales et les entreprises. » Il appréhende, en particulier, l’impact que pourrait avoir la taxe poids lourds sur le secteur du bâtiment. Opposé à la « taxe Bierry », Laurent Pierret, qui représente la filière amidon, entend bien continuer le « combat pour l’attractivité, le pouvoir d’achat et l’emploi ». Frédéric Boisivon, du Medef Alsace, craint que la R-Pass ne soit étendue à l’ensemble du Grand Est. Le 21 octobre prochain, l’assemblée de la CeA votera l’application de la taxe poids lourds pour un lancement prévu en janvier 2027. Comme ils l’ont fait ce lundi 7 octobre, les opposants seront à nouveau mobilisés avec leurs camions et tracteurs à travers toutes l’Alsace. Dans les rangs, on entend déjà que certains veulent se coiffer d’un bonnet rouge et sortir les disqueuses…