Dossier Paru le 30 septembre 2025
Conseil municipal

Le régime juridique des délibérations

Que doit-on entendre par la notion même de délibération, quelles sont ses conditions de validité et de forme, quelle preuve doit-on apporter de son existence et de son contenu, quelle motivation, quelles sont les formalités obligatoires à respecter, qu’en est-il de son exécution et du contrôle de légalité du préfet ? Tour d’horizon.

© Pangsiri-stock-adobe.com

L’article L.2121-29 du CGCT dispose que le Conseil Municipal « règle par ses délibérations » les affaires de la commune.

I/ La notion de délibération

Le juge administratif opère une distinction entre la délibération et son contenu juridique (CE, 24/04/1931, Lamarque – CE, 13/05/1931, de Varenghien).

Ainsi, une délibération, dont le contenu est un avis, ne peut être at­taquée par la voie du recours pour excès de pouvoir, celui-ci n’étant recevable que contre des décisions. Seul le déféré préfectoral est recevable contre une telle délibération (CE Ass, 15/04/1996, Syndicat CGT des hospitaliers de Bédarieux, n°20273). Il en va de même pour les délibérations qui ont pour objet d’émettre des vœux.

II/ Les conditions de validité des délibérations

A/ La condition tenant à l’existence d’un débat

En pratique, il n’est pas nécessaire qu’un débat se soit instauré, dès lors qu’il n’est pas établi qu’un conseiller qui aurait demandé à exprimer son point de vue se serait vu refuser la parole.

Le Conseil d’État a jugé que la circonstance que le vote d’une délibé­ration « n’a été précédé d’aucune discussion » ne saurait entacher de nullité la délibération (CE, 23/01/1935, Groupe de défense des contribuables talençois) et il a jugé qu’il n’y a pas délibération si le maire, en ce qui concerne une question mise à l’ordre du jour, se borne à l’évoquer en séance, sans qu’il soit fait un rapport, même succinct, sur cette question (CE, 25/07/1980, Courtet). Le juge administratif n’exige pas, pour autant, qu’il y ait eu effectivement discussion pré­alable avant le vote (CE, 16/12/1983, Élection des adjoints au maire de La Baume-de-Transit).

Le juge estime que dès lors que les conseillers municipaux ont été en mesure de comprendre l’objet de la délibération et que, invités par le maire à exprimer leurs désaccords ou leurs abstentions éventuels, aucun participant ne s’est manifesté, l’existence de la délibération et la validité de son adoption ne peuvent être contestées (TA Limoges, 29/07/1993, Association de défense de l’environnement du site de Rochechouart).

Le Conseil d’État se borne parfois à relever qu’il « résulte du pro­cès-verbal de la séance et des autres pièces du dossier que la délibé­ration contestée a été prise à l’issue d’un débat contradictoire » (CE, 10/07/1996, Coisne).

À noter qu’une délibération du Conseil Municipal adoptée sans débat, suscitant le départ de plusieurs conseillers municipaux, a été annulée (TA Pau, 7/06/2005, Brethes et autres/Cne de Saint-Sever). Ainsi, le juge indique qu’une délibération pour laquelle le maire a indiqué qu’elle ne donnerait pas lieu à débat encourt l’annulation. Le droit d’expression des conseillers municipaux doit être respecté, et le débat préalable fait partie des règles fondamentales de fonctionnement de l’assemblée locale. Le simple fait que des élus quittent l’assemblée en signe de protestation ou de désaccord ne fait pas obstacle à la validité du vote, du moment que le quorum est préservé, mais le défaut de débat, lui, affecte la légalité de la décision.

B/ Les conditions tenant à la manifestation de volonté

La validité de la manifestation de volonté exprimée par la majorité de l’organe délibérant dépend du respect d’un certain nombre de conditions de fond et de forme.

Du point de vue du fond, il convient que cette manifestation de volonté émane bien du corps délibérant lui-même, délibérant par lui-même, librement et en étant informé.

Il n’y a pas délibération du Conseil Municipal lorsque le maire se borne à évoquer une question en séance publique (CE, 25/07/1980, Courtet).

L’assemblée doit délibérer librement, si bien que d’une manière générale, une assemblée ne doit pas délibérer sous la contrainte, morale ou physique, de nature à vicier sa manifestation de volonté. Si l’existence d’une telle contrainte est établie, la délibération est nulle (CE, 2/02/1938, Graulières).

Cette nullité s’explique par le principe fondamental de la liberté de délibération, qui garantit le fonctionnement démocratique des or­ganes collectifs. La jurisprudence et la doctrine rappellent que toute délibération prise sous la menace, la pression ou tout autre type de contrainte qui prive les membres de leur liberté de décision est enta­chée d’irrégularité, ce qui justifie l’annulation de la décision concernée.

Il a été jugé que le fait qu’une réunion d’un Conseil Municipal ait été présidée par un sous-préfet ne permet pas de considérer que les dé­libérations prises soient des délibérations du Conseil Municipal (CE, 28/02/1947, Megevand).

L’assemblée doit enfin être exactement informée.

Le juge administratif (CE, 29/06/1990, Cne de Guitrancourt), puis le législateur (loi n°92-125 du 6 février 1992, relative à l’administration territoriale de la République, art. 28 et 39) ont consacré le droit pour tout membre d’une assemblée d’une collectivité locale d’être informé, dans le cadre de ses fonctions, des affaires de la commune qui font l’objet d’une délibération.

Le principe général de l’information des élus membres de l’assemblée des collectivités territoriales impose, en deuxième lieu, l’envoi avec la convocation de l’ordre du jour de la prochaine réunion de l’assemblée, si bien que l’absence ou l’insuffisance de la mention de l’ordre du jour dans la convocation peut conduire à l’annulation des délibérations (CE, 27/03/1991, Cne d’Amnéville, n°76036).

Ainsi, à la convocation doivent être joints pour les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération. Le Conseil d’État exerce un contrôle sur l’exis­tence de ces documents annexes et sur leur caractère suffisant (CE, 23/04/1997, Ville de Caen/Paysant - CE 30/04/1997, Cne de Sérignan).

En matière contractuelle, « le projet de contrat ou de marché accom­pagné de l’ensemble des pièces peut, à sa demande être consulté par tout conseiller municipal dans les conditions fixées par le règlement intérieur » (art. L.2121-12, alinéa 2 du CGCT).

L’assemblée délibérante d’une collectivité locale qui autorise l’exécutif à signer un contrat, doit également, sauf à méconnaître l’étendue de sa compétence, se prononcer sur tous les éléments essentiels du contrat à intervenir, au nombre desquels figurent notamment l’objet précis de celui-ci, son montant exact et l’identité du cocontractant (CE, 13/10/2004, Cne de Montélimar, n°254007 - CE 11/09/2006, Cne de Théoule-sur-mer).

Enfin, les élus membres de l’assemblée doivent pouvoir consulter, s’ils le souhaitent, et à leur demande, les pièces et documents nécessaires à leur information sur les affaires faisant l’objet de cette délibération (CE, 23/04/1997, Ville de Caen/M.Paysant – CE, 10/07/1996, Coisne).

Ce droit est garanti par l’article L.2121-13 du CGCT, si bien que tout conseiller municipal, dans l’exercice de son mandat, doit pouvoir obtenir les documents relatifs aux affaires inscrites à l’ordre du jour. La jurisprudence précise que la consultation doit pouvoir avoir lieu, à la demande des élus, même en cours de séance, si elle n’a pas été sollicitée avant.

L’accès est limité aux besoins de l’affaire débattue et dans le respect des dispositions de la loi sur l’accès aux documents administratifs.

En cas de refus du maire de communiquer un document nécessaire à la compréhension d’un dossier soumis à délibération, la légalité de la délibération peut être remise en cause et entraîner son annulation.

Le juge a estimé que l’information des conseillers a été suffisante dès lors que le maire ne s’est pas opposé à la communication d’éléments d’information en sa possession et que les conseillers ont pu, avant le vote, prendre connaissance du projet de convention (TA Nice, 29/07/1985, Commissaire de la République du Var). Au contraire, l’information est insuffisante si chacun des membres du Conseil Municipal n’a pas été en mesure de prendre connaissance du projet de contrat (TA Nice, 21/08/1985, Valgaeren).

Il en est de même dans le cas de la délibération portant adoption au budget primitif, alors que n’ont été distribués aux conseillers municipaux que des documents mal présentés et difficilement exploitables, et que les demandes d’explications et de précisions n’ont pas été satisfaites (TA Nice, 25/05/1987, Basilio).

Il faut également que la délibération en cause constitue une véritable décision ayant valeur d’acte juridique.

C/ Les conditions tenant au contenu de la délibération

Une délibération n’est valable que si son contenu est conforme aux règles régissant les compétences et attributions de l’assemblée délibérante.

Toute délibération doit, d’une part, porter sur un objet relevant des compétences de la collectivité locale considérée, et, d’autre part, au plan de la répartition des compétences à l’intérieur de cette collec­tivité, s’analyser en une manifestation de volonté rentrant dans les compétences propres de l’organe délibérant.

Du point de vue de sa qualification, une délibération ne constitue un acte juridique que dans la mesure où elle comporte une véritable décision créant un effet de droit, et ne se borne pas à une simple prise de position, telles qu’un souhait (TA Amiens, 1/12/1987, Braine et Vantomme).

III/ La motivation des délibérations

En règle générale, la motivation des délibérations des assemblées locales n’est pas obligatoire.

Une délibération ne doit être, obligatoirement, motivée que dans les cas où une telle motivation est prévue par un texte exprès, ce qui est le cas de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’ad­ministration et le public, dont les dispositions sont applicables aux délibérations des autorités locales.

Le Conseil Constitutionnel a jugé que, dans le cas des collectivités territoriales, relève exclusivement de la loi l’instauration de l’obligation de motiver les décisions, une telle obligation touchant aux principes fondamentaux de la libre administration de ces collectivités (Conseil Constitutionnel, 10/03/1988, décision n°88-154 L).

En application de ce principe, « doivent être motivées les décisions qui :

- restreignent l’exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ;

- infligent une sanction ;

- subordonnent l’octroi d’une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ;

- retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ;

- opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ;

- refusent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir ;

- refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l’un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions des alinéas 2 à 5 de l’article 6 de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 ».

Aux termes de l’article 2, « doivent également être motivées les déci­sions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement ».

Ainsi certaines délibérations doivent obligatoirement être motivées lorsqu’elles constituent une mesure individuelle restrictive (par exemple attribution ou retrait de délégations, sanctions disciplinaires ou déci­sions affectant la situation individuelle d’une personne).

Il a été jugé que les décisions prises par le Conseil Municipal ou par la commission communale d’adjudication des lots de chasse « sont des décisions privées prises par représentation des propriétaires fonciers. De par leur nature, elles échappent à l’obligation de motivation exi­gée par la loi du 11 juillet 1979 pour les actes administratifs » (Metz, 26/02/1992, Commune d’Ostheim/Riethmuller).

IV/ La signature des délibérations

La signature des délibérations du Conseil Municipal doit obligatoi­rement être apposée par le maire et le ou les secrétaires de séance.

Cette obligation résulte de l’article L.2121-23 du CGCT modifié par l’ordonnance n°2021-1310 du 7 octobre 2021, entrée en vigueur depuis le 1er juillet 2022.

Quelques précisions importantes :

• avant la réforme, toutes les délibérations devaient être signées par tous les membres présents à la séance. Depuis la réforme, seuls le maire et le ou les secrétaires de séance signent.

• le défaut de signature constitue un vice de forme, mais n’entraîne pas la nullité ni ne remet en cause le caractère exécutoire de la déli­bération, ce dernier dépendant avant tout des formalités de publicité et de transmission au préfet.

De manière traditionnelle, le Conseil d’État juge que les formalités de signature des délibérations prévues par le CGCT ne sont pas prescrites à peine de nullité (CE 30/10/1990, Cne de Lignières, n°90679 - CE 10/01/1992, Association des usagers de l’eau de Peyreleau).

Ainsi, le ou les secrétaires de séance sont nommés par le Conseil Municipal parmi ses membres, idéalement ceux qui peuvent être disponibles pour la signature des délibérations.

En cas d’absence ou de refus de signature du secrétaire, la situation n’est pas explicitement prévue par le CGCT, mais la responsabilité incombe au Conseil Municipal de désigner des secrétaires disponibles.

Les délibérations doivent être inscrites dans un registre coté et paraphé par le maire, avec place pour les signatures des secrétaires.

Enfin, le maire peut déléguer la signature pour certaines formalités administratives (paraphe sur registre), mais la signature en tant que telle des délibérations formelles revient à lui-même et aux secrétaires de séance.

La signature des délibérations par le maire et d’au moins un secré­taire de séance confère l’authenticité et la validation de l’acte pour la collectivité.

V/ La preuve de l’existence matérielle et du contenu des délibérations

La preuve de l’existence matérielle et du contenu des délibérations, c’est-à-dire la preuve du texte même de la délibération, peut être faite par tout moyen, document écrit ou enquête.

C’est ainsi que la concordance entre le texte présenté comme étant celui de la délibération prise et la demande qui faisait l’objet de cette délibération a été retenue comme constituant un élément d’apprécia­tion de la valeur de ce texte en tant que délibération (CE, 25/02/1931, Ville de Nouzonville).

Les délibérations sont transcrites par ordre de date dans un registre spécial, qui doit être coté et paraphé par le maire (art R.2121-9 du CGCT) afin d’assurer une preuve matérielle irréfutable. Ce registre doit porter des mentions obligatoires telles que la date et l’heure de la séance, le nom du président de séance, la liste des conseillers présents et représentés, l’affaire débattue, le résultat du vote et la décision prise. Ces mentions permettent notamment de vérifier la validité de la délibération (quorum, régularité).

Précisons que le registre des délibérations a une valeur probante. Les mentions qui y figurent font foi jusqu’à preuve contraire (CE 4/02/1995, Lods), mais ce registre n’a pas valeur d’acte authentique comme pourrait l’être un acte notarié.

L’absence ou le retard de transcription ou de signature sur le re­gistre n’entraîne pas la nullité des délibérations elles-mêmes, qui peuvent être prouvées par d’autres moyens. En cas de litige, le tribunal administratif peut ordonner des mesures d’instruction pour établir la matérialité et le contenu des délibérations.

La preuve de l’existence d’une délibération peut ainsi résulter d’un ensemble d’éléments tel que la production d’une copie certifiée conforme, le fait de la réception de cette délibération à la préfecture, ou qu’un arrêté préfectoral l’ait visée, ou que des délibérations posté­rieures en aient fait état, ou le fait que son existence soit attestée par tous les conseillers y ayant pris part, et sans que l’on puisse retenir à l’encontre de cette existence les comptes rendus parus dans la presse ni la transcription d’une bande magnétique enregistrée pendant la séance (CE, 2/12/1977, Comité de défense de l’environnement de Mâcon-Nord).

En pratique, l’existence matérielle et le contenu des délibérations sont normalement établis par les mentions portées au procès-verbal des séances ou au registre des délibérations (CE, 27/01/2011, Cne de Ramatuelle, n°338287).

En cas de contestation sur l’existence matérielle et le contenu d’une délibération et notamment au cas d’absence ou d’insuffisance de mention de cette délibération au procès-verbal de séance ou au registre des délibérations, voire même en cas d’absence totale de procès-verbal ou de registre, le juge administratif établit sa conviction en fonction des « pièces versées au dossier » et peut ordonner toutes mesures « d’instruction » utiles et notamment prescrire une enquête (CE, 7/12/1934, Cne de Saint-Paul-du-Var, - CE, 2/12/1977, Comité de défense de l’environnement de Mâcon-Nord).

L’existence ou l’inexistence d’une délibération peut être établie en fonction de tous les éléments susceptibles d’éclairer les juges :

- les pièces du dossier et notamment le texte même de la délibération (TA Paris, 19/01/1989, Préfet des Hauts-de-Seine);

- l’instruction, notamment des déclarations du maire à l’audience du tribunal (TA Limoges, 8/06/1989, Chauvat);

- les affirmations des requérants qui n’ont pas été contredites (CE, 3/11/1989, Gérard Écorcheville), 7

- les pièces du dossier et notamment l’enquête ordonnée par les pre­miers juges (CE, 9/05/1990, Cne de Lavaur/Lozar), s’agissant, avant l’élection d’un adjoint, de la décision de ne pas procéder à une élection complémentaire, qui n’a ni donné lieu à un vote ni été transcrite au procès-verbal, jugé que « les attestations fournies par les conseillers municipaux établissent qu’avant de procéder à l’élection litigieuse, le maire de la commune a consulté l’assemblée communale » sur cette question et « que les membres de celle-ci ont donné leur accord » (TA Versailles, 10/07/1990, Cuvillier),

- une enquête, au cours de laquelle ont été entendus tous les conseil­lers municipaux présents lors de la séance, dont il est établi, d’une part, que si la délibération n’a fait l’objet d’aucun débat, les conseillers municipaux ont été en mesure de comprendre l’objet de la question, et, d’autre part, qu’invités par le maire à exprimer leur désaccord ou leur abstention éventuels, aucun participant ne s’est manifesté (TA Limoges, 29/07/1993, Association de défense de l’environnement du site de Rochechouart).

VI/ Les formalités obligatoires

A/ La transmission au représentant de l’État

La transmission des délibérations au préfet est une obligation pour les collectivités territoriales concernant certains actes, notamment ceux qui sont soumis au contrôle de légalité, selon les articles L.2131-1 et suivants du CGCT.

Ce dernier dispose ainsi que les délibérations des assemblées locales doivent être transmises au représentant de l’État dans le département (préfet) ou à son délégué dans l’arrondissement (sous-préfet), à l’ex­ception de certaines d’entre elles.

La transmission peut se faire par voie électronique (télétransmission via une application spécifique), par voie postale ou en dépôt physique en préfecture ou sous-préfecture.

La preuve de transmission est matérialisée par la réception ou le cachet de la préfecture.

En pratique, une convention peut être signée entre la collectivité et la préfecture pour organiser la télétransmission des actes, facilitant ainsi cette obligation.

La transmission concerne uniquement les actes soumis à obligation de transmission.

Il existe une liste des actes transmissibles et non transmissibles fixée par les articles L.2131-1, L.2131-2 du CGCT, étant précisé que la liste des délibérations exclues de l’obligation de transmission a été allon­gée par l’ordonnance n°2009-1401 du 17 novembre 2009 portant simplification de l’exercice du contrôle de légalité.

Ces délibérations sont pour les communes :

a) les délibérations relatives aux tarifs des droits de voirie et de sta­tionnement, au classement, au déclassement, à l’établissement des plans d’alignement et de nivellement, à l’ouverture, au redressement et à l’élargissement des voies communales,

b) les délibérations relatives aux taux de promotion pour l’avancement de grade des fonctionnaires, à l’affiliation ou à la désaffiliation aux centres de gestion ainsi qu’aux conventions portant sur les missions supplémentaires à caractère facultatif confiées aux centres de gestion.

La transmission est l’une des conditions de l’entrée en vigueur des délibérations concernées et permet au préfet d’en contrôler la légalité.

À noter qu’il n’existe pas de délai légal strict pour la transmission de la plupart des actes, sauf exceptions comme pour les marchés publics, les documents budgétaires ou les délégations de service public qui doivent être transmis dans les quinze jours suivant leur signature.

Pour être exécutoires, les délibérations doivent non seulement être publiées (ou notifiées) mais aussi transmises au préfet. Sans trans­mission, l’acte n’est pas exécutoire même s’il est adopté par le Conseil Municipal.

Précisons que le maire est responsable de la transmission des délibé­rations qu’il préside au préfet, conformément à l’article L.2131-1 du CGCT, sachant que le refus du maire de transmettre un acte suspend son exécution mais ne remet pas en cause sa légalité.

La transmission des délibérations au préfet est une formalité essen­tielle afin que ces actes deviennent exécutoires et fassent l’objet du contrôle de légalité par la préfecture.

B/ La publication, l’affichage et la notification

Toutes les délibérations, qu’elles soient soumises ou non à transmis­sion au préfet, doivent être portées à la connaissance des intéressés par des mesures de publicité permettant la transparence et l’accès à l’information.

Pour les décisions de portée générale, les mesures de publicité s’ef­fectuent notamment par :

• La publication dématérialisée sur le site internet de la collectivité (obligatoire pour les communes de 3 500 habitants et plus depuis la réforme de juillet 2022).

• L’affichage au tableau d’affichage de la collectivité ou, le cas échéant, sur les lieux concernés.

À noter que la publication dans un recueil des actes administratifs a été supprimée pour la plupart des collectivités depuis la réforme récente.

Pour les décisions de portée individuelle, la publicité se fait générale­ment par voie de notification directe aux intéressés, ce qui assure que ceux-ci soient explicitement informés de la décision les concernant.

La réforme de 2022 vise à moderniser, simplifier et harmoniser les modalités de publicité en privilégiant la publicité électronique, tout en conservant une certaine souplesse pour les petites communes (moins de 3 500 habitants) qui peuvent choisir leur mode de publicité par délibération.

Dans un arrêt du 21/05/2008, Mme Louvard, n°284801, confirmé par CE 25/07/2008, Société Francelot, n°295799, relatif aux arrêtés réglementaires du maire, mais qui devrait également être applicable aux délibérations réglementaires des organes délibérants, le Conseil d’État a jugé que « ces dispositions [particulières aux actes réglemen­taires des collectivités locales] n’ont pas dérogé au principe fixé au premier alinéa selon lequel la formalité de publicité qui conditionne l’entrée en vigueur des actes réglementaires du maire peut être soit la publication, soit l’affichage ».

La publicité juridique de tous les actes de ces communes peut être opérée aussi bien par affichage que par publication dans un recueil.

La seconde règle particulière concerne les délibérations des Conseils Municipaux prises en matière d’interventions économiques, ainsi que les délibérations approuvant une convention de délégation de service public.

Les règles de publication, d’affichage et de notification des délibérations des Conseils Municipaux prises en matière d’interventions écono­miques, ainsi que pour l’approbation d’une convention de délégation de service public (DSP), présentent, en effet, des spécificités prévues par l’article L.2121-24 du CGCT.

Ces délibérations doivent faire l’objet d’une insertion dans une pu­blication locale diffusée dans la commune. Cette publication locale peut correspondre à un bulletin municipal ou à une autre publication à diffusion locale.

Cette obligation s’ajoute aux autres formes de publicité exigées pour l’ensemble des actes municipaux, étant précisé que la non-publication dans une publication locale ne rend pas l’acte nul, mais peut néanmoins décaler le point de départ du délai de recours contentieux pour les tiers intéressés.

Pour les communes de 3 500 habitants et plus, le dispositif de ces délibérations à caractère réglementaire était auparavant soumis à une publication dans un recueil des actes administratifs. Or, cette obligation a été supprimée par la réforme entrée en vigueur au 1er juillet 2022, si bien que, désormais, la publication dématérialisée sur le site internet de la commune doit être privilégiée.

Dans toutes les communes, la liste des délibérations examinées par le Conseil Municipal est affichée à la mairie et mise en ligne sur le site internet de la commune lorsqu’il existe.

Bien que l’affichage du procès-verbal n’est plus obligatoire, la publicité locale des délibérations d’intervention économique et DSP reste en vigueur conformément au texte.

Pour les décisions individuelles prises dans le cadre de ces délibéra­tions, celles-ci doivent être notifiées aux personnes concernées afin d’être opposables.

Les mesures de publication, affichage, notification, constituent l’une des conditions de l’entrée en vigueur des délibérations et déterminent le point de départ du délai des recours contentieux.

C/ L’inscription au registre des délibérations

Outre la publicité ou la notification, le CGCT prévoit une formalité supplémentaire en ce qui concerne les communes.

Les délibérations du Conseil Municipal doivent être inscrites sur un registre coté et paraphé par le maire, quel que soit le mode de trans­mission de ces délibérations au préfet (art.R.2121-9), lequel ne fait état que d’« un registre », sans préciser que ce registre est propre aux délibérations.

Le texte réglementaire fait bien mention d’« un registre », sans exiger qu’il soit exclusivement réservé aux seules délibérations. En pratique, il s’agit bien du registre des délibérations. Ce registre doit répondre à différentes exigences matérielles (papier permanent, feuillets nu­mérotés et paraphés, reliure en fin d’année, table chronologique et table par objet).

Pour sa part, l’article R.2122-7 ne mentionne pour les arrêtés du maire que le « registre de la mairie ». Il n’était donc pas certain qu’il y ait une claire distinction entre le registre des délibérations et le registre des arrêtés, les textes laissant ainsi, en fait, la possibilité aux communes de tenir un seul registre, commun aux délibérations et aux arrêtés, ou d’établir deux registres distincts.

Le décret n°2010-783 du 8/07/2010 portant modifications diverses du CGCT a confirmé à l’article R.2122-7 que l’inscription des arrêtés du maire a lieu « sur le registre de la mairie ou sur un registre propre aux actes du maire ».

Dans la pratique c’est le système de la dualité des registres qui est, le plus généralement, mis en œuvre.

L’existence d’un registre propre aux délibérations et d’un registre propre aux arrêtés est évidemment la meilleure solution, en ce qu’elle permet d’assurer la conservation et la consultation des actes dans des conditions de clarté et de commodité beaucoup plus grande que s’il n’existait qu’un seul registre commun.

Il n’est pas non plus certain à la lecture du Code qu’il y ait une claire distinction entre le procès-verbal des séances et le registre des dé­libérations. Ainsi, dans la pratique, les communes peuvent ou non pratiquer la dissociation, formelle ou/et matérielle, du procès-verbal de séance et du registre des délibérations.

Le contenu du registre des délibérations diffère selon que la commune a établi un procès-verbal proprement distinct du registre des délibérations ou seulement un registre. Le contenu du registre des délibérations est en outre établi à partir des éléments portés au procès-verbal. Le principe général est celui de la liberté de rédaction qui appartient au Conseil Mu­nicipal en ce qui concerne les procès-verbaux (CE, 3 mars 1905, Papot).

L’article L.2121-21 alinéa 1 du CGCT prévoit, sans qu’une sanction ne soit d’ailleurs prévue, que lorsque le vote d’une délibération a lieu au scrutin public, « le registre des délibérations comporte le nom des votants et l’indication du sens de leur vote ».

L’inscription à leur date, au registre, des délibérations n’est pas pres­crite à peine de nullité de ces délibérations.

L’omission de cette formalité n’a donc pas pour effet d’entacher d’irrégularité la décision ou l’acte (CE, 29/12/1926, Desgouilles – CE, 18/04/1969, Bonijol - CE, 29/10/1969, Cne de Labeuvrière).

Le défaut d’inscription au registre n’entraîne en lui-même aucune conséquence directe. La décision est exécutable malgré cette omission, dès lors que les autres conditions sont réunies. De la même manière, le délai du recours pour excès de pouvoir n’est pas affecté par l’absence d’inscription au registre.

Mais cette absence d’inscription au registre peut déboucher sur des difficultés contentieuses au cas où la teneur exacte de la décision, voire même son existence, sont contestées.

Toute personne a droit à obtenir communication du registre des délibérations des conseils municipaux dans les conditions prévues à l’article L.2121-26 du CGCT (CE, 6/10/2010, Cne du Castellet, n°307683), dans la mesure où le registre des délibérations constitue un document communicable et peut être consulté sur place, voire obtenir des copies, sauf restrictions liées à la protection de données personnelles ou à la confidentialité de certaines informations.

VII/ L’exécution des décisions

Le régime selon lequel les délibérations peuvent être mises à exécution est fixé par le CGCT.

L’acte doit, d’une part, avoir été transmis au préfet, si cette transmission est obligatoire et, d’autre part, dans tous les cas, avoir fait l’objet des mesures de publicité ou de notification. Ces mesures ne conditionnent toutefois que l’entrée en vigueur de l’acte.

Pour que l’acte ainsi devenu exécutable puisse être mis effectivement à exécution, il faut encore que soit fixée la date de prise d’effet de cet acte. Les modalités de mise en œuvre de ces principes sont d’ailleurs communes aux délibérations du Conseil Municipal et aux décisions du maire.

L’article L.2122-21 du CGCT dispose que le maire est chargé, en règle générale, de l’exécution des décisions du Conseil Municipal, si bien qu’il n’y a pas de pouvoir d’exécution autonome reconnu à l’assemblée.

Enfin, précisions, que si ces formalités ne sont pas respectées, la délibération ne peut produire d’effets juridiques opposables aux administrés ou à l’administration.

Stéphane BRUNELLA Directeur général des services