Droit Paru le 04 novembre 2025
L’audience d’installation au tribunal judiciaire de Sarreguemines

Le tribunal avec un effectif presque au complet

L’audience d’installation du tribunal judiciaire de Sarreguemines a retrouvé un climat plus serein, avec l’arrivée des renforts espérés dans l’effectif des magistrats. Il est presque au complet aujourd’hui, de quoi redonner le sourire à la présidente Anne Klein et au procureur de la République Olivier Glady.

La présidente du tribunal judiciaire de Sarreguemines Anne Klein

« C’est avec fierté et bonheur que notre juridiction vous accueille aujourd’hui pour vous présenter les nouvelles forces vives venues enrichir nos rangs. » La présidente Anne Klein est visiblement ravie de présenter les nouveaux arrivants au sein de l’équipe des magis­trats. De fait, sur le plan des effectifs, la présidente peut se réjouir : « Notre juridiction se rapproche d’une composition quasi complète, avec 17 magistrats de plein exercice en poste sur les 19 prévus selon la nouvelle circulaire, laquelle a entériné la création d’un poste de juge supplémentaire. » Une situation que l’institution n’avait plus connue depuis trois ans. Et ça va changer beaucoup de choses : « le rythme habituel des audiences a pu être rétabli et nous allons désormais, avec votre concours, nous atteler à résorber le stock accumulé. » Elle pouvait sereinement passer la parole au procureur de la République, qui lui aussi pouvait se réjouir de ce retour à la normale au sein du tribunal judiciaire.

Toute la différence avec 2024

Le procureur comme à l’accoutumée s’est appuyé sur sa passion de l’histoire et de la littérature pour étayer sa démonstration. Il cite pour commencer ce vers d’ouverture de Richard III de Shakespeare « mainte­nant que l’hiver de notre mécontentement s’est changé en été glorieux par ce fils d’York » du fait de la fin de la guerre civile en Angleterre à cette époque. Et il rapproche cet « hiver du mécontentement » au climat de l’automne dernier au tribunal judiciaire de Sarreguemines, qui a fait bien mal à ses effectifs plutôt dégarnis. Il constate avec plaisir « une restauration des effectifs des juges dont le parquet se réjouit d’autant plus qu’il cessera enfin d’avoir honte de détailler ses effectifs qui au long de ces dernières années ont toujours été au complet, ou alors abondés en magistrats placés. » On lira plus loin la présentation des nouveaux-venus au parquet. Il saisit alors l’occasion pour rappeler un épisode, vieux de 500 ans, en 1525 émaillé dans nos contrées par la révolte des paysans, dont la colère est alimentée par la société féodale et ses inégalités. Ils revendiquent avec force un ordre plus égalitaire qu’ils ont finalisé dans un document édifiant : Les XII articles de la paysannerie, véritable plateforme programmatique exigeant notamment des progrès dans la justice. Pour Olivier Glady, ce rappel entre bien en résonance, avec ce retour d’une équipe de magistrats au complet dont la feuille de route est bien d’améliorer le rendu de la justice auprès des citoyens. Une feuille de route pavée de priorités.

Le procureur de la République Olivier Glady.

Infractions aux stupéfiants, troubles à l’ordre public

Un plan de route qui « demeure toujours vigilant envers les infractions troublant particulièrement l’ordre public » rappelle Olivier Glady. Les contentieux prioritaires qui appellent cette vigilance du parquet sont récurrents :

- Infractions aux stupéfiants et leur cohorte d’infractions périphériques de représailles dont des agressions pilotées par les trafiquants, des infractions routières ;

- Les atteintes aux personnes relevant des violences conjugales ou suscitées par les débordements de comportement de plus en plus fréquent, toujours et encore avec une prégnance inquiétante de l’alcool.

Il énonce quelques projets pour cet automne : achever la mise en place d’alternatives aux poursuites spécialement dédiées à cette addiction ; étendre la convention Hôpital-Justice au bassin houiller dont Forbach ; améliorer le service rendu aux victimes ; rationaliser les conduites pénales dans le but de maîtriser les frais de justice ; poursuivre le développement de la PPN (procédure pénale numérique) ; conserver une vigilance envers les effectifs de la maison d’arrêt. Il insiste enfin sur ce qui semble être une évidence au sein de la juridiction « le dialogue permanent avec le siège et les FSI, les forces de sécurité intérieure. »

« La loi est la même pour tous… »

Il termine son propos par un rappel, celui d’un article de la Déclaration des droits de l’homme : « La loi est l’expression de la volonté générale. Elle doit être la même pour tous, soit qu’elle pro­tège, soit qu’elle punisse. » Il faisait référence à la condamnation du sixième président de la Ve République. Dans sa démonstration, il a parlé de la mise en place de normes s’imposant au monde politique dont la probité avait été mise à mal dans les années quatre-vingt avec sa cohorte de scandales… L’exigence d’exemplarité d’alors de l’élu, est devenue aujourd’hui « une exigence légale de probité, entremêlant peines d’inéligibilité, déclarations de patrimoine et Haute autorité pour la transparence de la vie publique. » Il cite Denis Salas du journal Le Monde, qui résume fort bien cette problématique : « C’est moins l’activisme du juge qui est en cause que les lois qui ont fait des poli­tiques de nouveaux justiciables. »

L’évocation de Robert Badinter

Anne Klein, la présidente s’est fait un honneur de citer une date anniversaire, devenue aujourd’hui incontournable : « Son évocation prend tout son sens : celle du 9 octobre 1981, date de l’abolition de la peine de mort en France. Et un symbole fort, l’inhumation ce jour au Panthéon de ce grand homme de justice que fut Robert Badinter. Un symbole fort, pour nous tous, magistrats, greffe, avocats, pour tous les hommes et toutes les femmes de justice. » C’était une parfaite introduction pour ouvrir la présentation et l’installation des nouveaux magistrats au tribunal judiciaire, dont elle a joliment salué le parcours. « Vos trajectoires personnelles sont en effet le reflet de la diversité des recrutements dans la magistrature. Elles témoignent aussi, malgré les critiques trop souvent adressées aux magistrats, que notre métier demeure porteur de sens et continue heureusement, d’inspirer des vocations. »

À l’issue de leur présentation, elle leur a proposé une belle ambition : « relever ensemble les défis de cette rentrée avec courage, le courage de trancher dans le doute, de défendre l’équité face à l’injustice, de rester fidèle au droit quand il est contesté, dans la joie de servir, de contribuer à la paix sociale, de rendre un jugement juste, d’écouter une parole, de protéger un enfant et d’être portés par un collectif de travail admirable. » Elle a terminé en affirmant fortement « sa conviction profonde que cette équipe nouvellement renforcée avec votre arrivée fera émerger une dynamique de travail empreinte de vitalité, pleinement engagée au service de nos concitoyens et source d’épanouissement pour chacun d’entre nous. »

Les nouveaux venus

• Au parquet

Chloé Schiel-Bolsinger est titulaire d’un Master II de droit pénal et de sciences criminelles à Strasbourg en 2015, sera successivement juriste dans une Maison de justice et de droit, puis rédactrice à la DACG (direction des affaires criminelles et des grâces) de 2018 à 2020, substitut placé en 2024, elle sera affectée au service d’audience et de permanence.

Élodie Derlon de retour d’un congé de maternité en novembre suc­cède à Laurent Gérardin parti pour la cour d’appel de Colmar comme substitut général.

Aurélien Rubio est titulaire d’un Master II de droit privé et sciences criminelles (Université de Lorraine en 2014), devient juriste assistant de 2017 à 2021 à la cour d’appel de Nancy, puis substitut placé de 2023 à 2025. « C’est un retour durable à Sarreguemines après un premier séjour entre l’automne 2023 et le printemps 2024 » détaille Olivier Glady. Aurélien Rubio sera affecté au service des atteintes aux biens, aux audiences et permanences.

• Au siège

Sacha Rebmann est originaire de Strasbourg où il fait ses études universitaires. Il obtient en 2002 une maîtrise de droit privé, puis décroche son certificat d’aptitude à la profession d’avocat en 2004, fonction qu’il exercera au barreau de Colmar, au sein d’un cabinet généraliste de 2006 à 2024 et dont il sera bâtonnier en 2020-2021. Investi dans la formation des futurs avocats, il a aussi été président de la CARPA (Caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats) de 2023 à 2024. Fort d’un parcours riche et engagé, il a été intégré à la magistrature en 2024 directement au premier grade. Après des passages au TJ de Douai et de Metz, il est nommé aux fonctions de vice-président au sein du TJ de Sarreguemines. Il devrait assurer la reprise d’un cabinet de juge aux affaires familiales, et dès sa prise de fonctions, assurer la coordination du service.

Laura Meyer est originaire de Colmar. Elle obtient son baccalauréat Économie et social au Lycée Jean Renoir de Munich, avant d’entre­prendre ses études de droit à Strasbourg. Elle se spécialise en droit pénal dans le cadre d’un Master II à l’université Montesquieu de Bordeaux IV. Elle mène des travaux de recherche approfondis sur la prévention de la récidive et sur le milieu pénitentiaire « domaines qui la passionnent.» Elle exerce pendant cinq ans les fonctions de conseil­lère pénitentiaire d’insertion et de probation au centre de détention d’Oermingen, avant de continuer en milieu ouvert au sein du service pénitentiaire et de probation de Schiltigheim. Elle intègre en 2023 l’École nationale de la magistrature, accomplit son stage juridictionnel de 2024 au TJ de Sarreguemines, puis celui de sa pré-affectation au TJ de Mulhouse. Elle est affectée aux fonctions de juge des enfants où elle succède à Aurélie Marque désormais juge des contentieux de la protection au TJ de Cahors.

Louise Lanfranchi est la dernière arrivée au sein de la juridiction. Seule Lorraine au sein de cette nouvelle équipe majoritairement venue d’Alsace, elle est native de Nancy et poursuit ses études à l’Université de Lorraine où elle obtient en 2013 un Master II en droit du travail et de la protection sociale. Elle intègre l’École nationale des greffes en 2014, exerce de 2015 à 2018 les fonctions de greffière au service correctionnel au Tribunal de grande instance de Nancy. Elle réussit le concours de directrice des services de greffe judiciaire qu’elle exerce au TJ de Bobigny avant de rejoindre en 2021 la cour d’appel de Metz où elle occupe des responsabilités variées. Elle intègre l’ENM en janvier 2025, fait ses stages juridictionnels au TJ de Thionville. Elle exerce au sein de la chambre correctionnelle au TJ de Sarreguemines.

La présidente Anne Klein complète cette présentation par l’accueil de Élodie Fos nommée en juin 2025 pour exercer les fonctions de juge de l’application des peines. Éloignée de la juridiction pour un congé de maternité, elle n’a pas pu être présente à l’audience. Elle succède à Célia Hoffstetter désormais en poste au TJ de Strasbourg.

Elle se félicite aussi de la venue de Céline Knaff, nommée aux fonc­tions de vice-présidente. Elle a quitté son « cher tribunal d’instance de Saint-Avold pour prendre la présidence de la chambre commerciale ainsi que du service du juge de l’exécution. »

Elle salue aussi la nomination de Ludovic Grüning en qualité de vice-président chargé des libertés et de la détention « des fonctions demeurées trop longtemps vacantes. »

Elle cite enfin deux magistrats placés, Catherine Michel-Golfier nommée vice-présidente, Franck De Peyronnet, juge placé, tous deux délégués au service de l’application des peines.

Bernard KRATZ