Le 27 mars dernier, juristes d’entreprise, magistrats, médiateurs et avocats se sont réunis à l’ERAGE autour d’un thème fédérateur : « La médiation, un outil de performance économique et sociale ». Cet événement, organisé par la très dynamique délégation alsacienne de l’Association Française des Juristes d’Entreprise (AFJE) et soutenu par l’ERAGE, présidée par Madame Christine LAISSUE, a permis de souligner la pertinence de la médiation dans la gestion des litiges d’entreprise.
La médiation est plus que jamais au coeur des stratégies de résolution des différends. Encore perçue comme une alternative, elle tend à devenir une solution centrale, notamment pour les juristes d’entreprise qui doivent conjuguer efficacité, maîtrise des coûts, et préservation de l’image et des relations commerciales.
Une table ronde animée par Madame Céline Goudon, Déléguée Régionale de l’AFJE Alsace, qui milite activement pour que les juristes d’entreprise s’approprient les outils de la médiation : « Ce n’est pas encore un réflexe, mais c’est un levier précieux pour gagner en efficacité, préserver les relations commerciales et limiter les coûts. »
Des magistrats de premier plan de la justice civile, commerciale et administrative ont partagé leur expertise :
- Madame Konny Derein, Première Vice-Présidente du Tribunal Judiciaire de Strasbourg, a insisté sur le rôle du juge conciliateur, en rappelant les fondements juridiques et les procédures spécifiques au droit local d’Alsace-Moselle. Elle a notamment évoqué l’article 21 du Code de procédure civile, qui consacre la mission de conciliation du juge, et les dispositifs comme la convention participative (article 1546-1), permettant aux parties de s’accorder sur une procédure contractuelle. Elle a rappelé que l’acte de conciliation, même conclu hors procédure, peut produire des effets juridiques importants et a adressé un message fort : « Ne pas hésiter à s’engager dans cette méthode, car elle fonctionne. »
- Monsieur Tony Fasciglione, Président des Juges Consulaires du même tribunal, a présenté la Charte de bonnes pratiques initiée en 2021 pour former des juges consulaires à la conciliation. Il a souligné : « La conciliation est une procédure d’accord par voie d’échanges entre des centres de décision indépendants qui ont un intérêt commun à s’entendre. » Il a défendu une vision constructive du règlement des différends : « Le conflit n’est pas ce qui fait vivre l’entreprise. Trouver un accord, c’est préserver son énergie et ses ressources. » Il a également insisté sur le fait que dans la médiation, les parties sont plus actives que lors d’un contentieux qui lui est plus subi. En cas d’accord, les parties pourront directement l’appliquer (ce qui est bien plus rapide qu’une décision de justice en cas de voies de recours).
Dans cette dynamique, l’action de la Chancellerie en faveur des procédures amiables affiche déjà des résultats concrets.
- Monsieur Romain Cormier, magistrat au Tribunal Administratif de Strasbourg, a précisé que la médiation administrative ne vise pas à désengorger les tribunaux, mais à proposer des solutions adaptées à des litiges qui relèvent davantage du dialogue que du droit (comme par exemple les problèmes de voisinage). Le rôle du juriste d’entreprise, demandant une médiation ici, devient central : il facilite l’ouverture du dialogue entre les parties. Les médiations administratives se développent notamment en droit fiscal, en matière de marchés publics ou encore dans le droit des étrangers. Elles sont encadrées par l’article L.213-1 du Code de justice administrative).
- Enfin, Monsieur Nicolas Igersheim, médiateur et ancien avocat fiscaliste, a posé les fondements essentiels de la médiation : volontariat, confidentialité et neutralité du médiateur. Il a souligné l’importance d’une éthique professionnelle forte, en dépit de l’absence de réglementation stricte du métier : « La médiation permet de résoudre des conflits… mais surtout de les anticiper. » La médiation peut être très utile au sein des sociétés pour éviter la paralysie d’un conflit entre associés. Le débat a souligné le rôle croissant des juristes d’entreprise dans l’intégration de clauses de médiation dans les contrats (clauses escalatoires, clauses de médiation préalable obligatoire), ainsi que leur capacité à jouer un rôle de « chef d’orchestre » dans la prévention des contentieux.