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Grand Est Paru le 12 août 2022
ENVIRONNEMENT

Fleuves, rivières et canaux. Des mesures d’économie pour préserver la ressource en eau

Dans le contexte de sécheresse intense que traverse une grande partie du pays, la situation se tend dans de nombreux secteurs gérés par Voies navigables de France. Pour y faire face, l’établissement public met en place, à chaque fois que la situation le nécessite, des mesures pour limiter les problèmes.

Durant les périodes de sécheresse, la mobilisation est maximale pour contribuer à réduire les consommations et équilibrer les besoins et usages en concertation avec les acteurs concernés. © D. PERONNE
Durant les périodes de sécheresse, la mobilisation est maximale pour contribuer à réduire les consommations et équilibrer les besoins et usages en concertation avec les acteurs concernés. © D. PERONNE
Voies navigables de France entretient, exploite et développe le plus grand réseau européen de voies navigables : 6 700 km de fleuves, canaux et rivières canalisées, 4 000 ouvrages d’art (écluses, barrages, pont-canaux) et 40 000 hectares de domaine public fluvial. © D. PERONNE
Voies navigables de France entretient, exploite et développe le plus grand réseau européen de voies navigables : 6 700 km de fleuves, canaux et rivières canalisées, 4 000 ouvrages d’art (écluses, barrages, pont-canaux) et 40 000 hectares de domaine public fluvial. © D. PERONNE

Voies Navigables de France, VNF, est le gestionnaire d’une infrastructure liée au fret et au tourisme fluvial. Mais avant de transporter des bateaux, le réseau fluvial transporte de l’eau. La première mission de cet établissement public est donc de garantir la gestion, le transport et la mise à disposition de l’eau sur les territoires. Ceci afin de répondre aux différents besoins des milieux naturels, des populations, des agriculteurs, de la navigation, des industriels. Sur les fleuves et rivières canalisés, alimentés naturellement en eau, VNF régule les niveaux d’eau grâce à des barrages mobiles. En situation normale, l’ouvrage laisse passer un débit maîtrisé d’eau pour garantir un niveau d’eau pour les besoins de la navigation et autres usages. En période d’étiage, donc de basses eaux, l’ouvrage retient l’eau pour maintenir un niveau autant que possible compatible avec les différents usages. Dans le respect des mesures de restriction d’eau arrêtées localement par les préfets en situation de sécheresse.

Les canaux, créés artificiellement par l’homme, ne sont pas naturellement alimentés en eau. L’eau qui y coule provient de prélèvements, via l’une des 364 prises d’eau existantes dans le milieu naturel. Cette alimentation se fait aussi grâce aux cours d’eau à proximité des canaux, ou par le biais des barrages réservoirs qui permettent de stocker de l’eau. VNF dispose de 50 réserves de ce type connectées aux canaux par un réseau de rigoles d’alimentation qui permettent d’acheminer le précieux élément. Au global, les possibilités de retenues d’eau représentent aujourd’hui environ 165 millions de mètres cubes de réserve. Durant les périodes de sécheresse, VNF, comme le rappelle un communiqué en date de mi-juillet, « se mobilise pour optimiser au maximum sa gestion de l’eau, pour contribuer à réduire les consommations et équilibrer les besoins et usages en concertation avec les acteurs concernés. Des mesures de réduction des consommations d’eau sont mises en place progressivement, notamment des mesures de restriction de la navigation. Par exemple le regroupement des bateaux pour le passage des écluses, afin de limiter le nombre d’éclusées et donc la consommation en eau ». Un débit d’eau à valeur réglementaire, appelé « débit réservé » et fixé par les services de l’État, est laissé en permanence pour préserver la continuité écologique, et notamment la vie aquatique. Si la quantité d’eau disponible dans le cours d’eau est inférieure ou égale à cette valeur, les prélèvements en eau sont stoppés et la navigation peut être arrêtée.

Garantir la sécurité des usages de l’eau

Avec 4 000 personnels mobilisés au service du fluvial, Voies navigables de France entretient, exploite et développe le plus grand réseau européen de voies navigables : 6 700 km de fleuves, canaux et rivières canalisées, 4 000 ouvrages d’art (écluses, barrages, pont-canaux…) et 40 000 hectares de domaine public fluvial. Au travers de ses missions, l’établissement répond à trois objectifs majeurs : permettre le développement du transport de fret, participer à l’aménagement du territoire et au développement touristique, garantir la sécurité des ouvrages et les différents usages de l’eau et en luttant contre les inondations et le stress hydrique. Il favorise également le développement de l’hydroélectricité et préserve la biodiversité.

Un taux de remplissage diminué

Malgré ces mesures de prévention, la sécheresse a un impact direct sur les activités liées au réseau fluvial – navigation, tourisme, activités nautiques – et les écosystèmes. Au 1er juillet, le taux de remplissage global de nos réserves en eau à l’échelle nationale était de 60 % contre 72 % au 1er juin 2022. Avec une moyenne de 80 % à la même date sur les dix dernières années. Dans plusieurs régions, l’établissement public est donc en alerte et mobilisée pour réduire tant que faire se peut les impacts liés à la sécheresse. Ainsi, sur le canal du Midi, les bateaux sont regroupés aux écluses de sorte à limiter au maximum les consommations d’eau. Sur une partie du canal de Bourgogne, la navigation n’est plus possible depuis le 16 juillet du fait d’un niveau d’eau particulièrement bas. Les bateaux et opérateurs de tourisme positionnés sur ce secteur ont été convoyés vers un autre secteur du Canal de Bourgogne, où le mouillage (profondeur de l’eau) est suffisant pour naviguer. À l’embranchement de Nancy la navigation est arrêtée pour permettre d’assurer l’alimentation en eau potable de la métropole de Nancy. Pour permettre l’alimentation en eau potable de l’agglomération de Toul, la navigation sur le Canal de la Marne au Rhin-ouest, voire sur la Moselle, peut être impactée. Le débit du Rhin est particulièrement faible avec 550 m3/s à Strasbourg ces derniers jours alors qu’il y a un an le fleuve connaissait une crue importante et VNF enregistrait 4 000 m3/s à la même période. Sur le canal de la Marne au Rhin et sur le Canal des Houillères et de la Sarre, les niveaux d’eau ont été abaissés sur de nombreux secteurs pour préserver au maximum la ressource. Des regroupements de bateaux sont également mis en place sur ces itinéraires. Les taux de remplissage des barrages réservoirs lorrains, du Stock, de Gondrexange et de Mittersheim, sont inférieurs aux moyennes enregistrées depuis dix ans, alors que l’intégralité des départements de la Moselle et du Bas-Rhin est en vigilance sécheresse et qu’un arrêté sécheresse a été pris sur le Haut-Rhin.

Au coeur des territoires

Du fait du changement climatique, les cours d’eau qui alimentent les canaux atteignent de plus en plus tôt les « débits réservés » à partir desquels l’eau ne peut plus être prélevée dans le milieu naturel. Cela signifie que le réseau navigable doit utiliser les barrages réservoirs de plus en plus tôt pour préserver les différents usages de l’eau des canaux et maintenir l’écosystème en eau. Pour limiter ces effets, particulièrement visibles sur les réseaux du Grand Est et Centre-Bourgogne, VNF « mène un travail de fond au quotidien pour anticiper ces périodes de chaleur extrême, qui se traduit par l’optimisation permanente de la ressource en eau sur son réseau via notamment la surveillance en temps réel du système, volumes et niveaux d’eau, la mise en place de programmes de réduction des fuites le long des berges et du fond des canaux, les travaux sur l’infrastructure comme le confortement de berges, le renforcement des barrages réservoirs et, lorsque cela est possible, l’augmentation de leur capacité. »

Thierry Guimbaud, Directeur général de VNF, le souligne, toujours dans le communiqué : « Le réseau fluvial est au coeur des territoires. Il est intimement connecté au réseau hydrographique de notre pays. La gestion de l’eau, ressource de plus en plus rare et précieuse, est pour nous une mission centrale. Le réseau apporte de la résilience aux territoires, car l’eau sert à l’alimentation en eau potable pour les populations, à l’irrigation des cultures, au fonctionnement des industries. Nos territoires sont aussi confrontés de plus en plus souvent à des situations de dérèglement climatique exceptionnelles et parfois dramatiques de crues ou de sécheresse. Face à ces enjeux, le réseau fluvial est un outil précieux, car il est structuré et organisé à l’échelle nationale avec des personnels dédiés à ces enjeux, des agents publics de l’eau garants d’une exploitation rigoureuse et fine de l’infrastructure, économe de la ressource et respectueuse de son environnement ». 

Des investissements indispensables

VNF dispose pour 2022 d’un budget d’investissement en forte hausse, de près de 345 M€, pour fiabiliser, moderniser et développer ses infrastructures. Dans le cadre de sa mission de gestion hydraulique, l’établissement mène notamment une politique de reconstruction et modernisation de ses barrages dont certains – les plus anciens datent du XIXème siècle – sont encore exploités de façon manuelle. À titre d’exemple, 29 barrages manuels sur la Meuse et de l’Aisne ont été reconstruits et remplacés par des barrages automatisés pour un montant de 312 millions d’Euros. S’agissant des 50 barrages-réservoirs, VNF s’attèle à la mise en sécurité et la régénération d’un certain nombre d’ouvrages pour un montant de 250 M€. Construit entre 1830 et 1837 pour alimenter le canal de Bourgogne, le barrage de Chazilly a notamment fait l’objet d’un programme de travaux de réhabilitation d’envergure, pour un montant de 12 M€. La capacité maximale de retenue d’eau du réservoir est désormais de 43 hectares au lieu de 34 hectares avant travaux. Au global, avec une politique d’investissement soutenue pour renforcer l’infrastructure, les retenues d’eau de ces barrages réservoirs pourraient atteindre 190 millions de mètres cubes, contre 165 millions de réserve aujourd’hui

Dominique PÉRONNE