Grand Est Paru le 12 août 2022
SÉCHERESSE

Les restrictions d’eau contrôlées en Moselle

Pour lutter contre les effets de la sécheresse, des mesures de restriction ont été mises en place afin d’économiser l’eau et garantir ses usages prioritaires. En Moselle, les services de l’État sont mobilisés pour vérifier que ces mesures soient bien respectées. Une journée a été organisée fin juillet afin de sensibiliser particuliers et professionnels aux enjeux de la démarche.

Déficit pluviométrique en Moselle de septembre 2021 à juillet 2022
Déficit pluviométrique en Moselle de septembre 2021 à juillet 2022

Dès le 10 juin, le préfet avait placé l’ensemble du département de la Moselle en vigilance. Le 14 juillet, il décidait de placer en alerte les zones « Moselle aval, Orne, Nied et Seille » et « Moselle amont et Meurthe ». Car, comme dans beaucoup de régions de l’Hexagone, le déficit pluviométrique est exceptionnel en juillet : de 75 à 90 %, comme le montre le graphique ci-dessus. Alors que la pluie ne se décidait toujours pas à tomber, le vendredi 29 juillet, la préfecture de la Moselle avait mis sur pied une opération afin de contrôler ces obligations de restriction de l’usage de l’eau. Une journée menée par la mission interservices de l’eau et de la nature, MISEN, réunissant différents services et établissements publics : l’Office Français de la Biodiversité (OFB), l’unité départementale de la Direction régionale de l’environnement, la Direction Départementale des Territoires (DDT), l’Agence régionale de santé. Cette opération avait surtout un objectif pédagogique, à travers une sensibilisation des usagers à l’importance de respecter les mesures prises pour préserver les ressources. L’ensemble du pays étant touché, cette mesure s’inscrivait en outre dans une opération d’envergure nationale.

Des contrôles, environ une centaine, avaient déjà eu lieu la dernière semaine de juillet. Ils se poursuivent en ce mois d’août et jusqu’à la fin des mesures de restriction. Ils sont réalisés par l’OFB et la police de l’eau et ciblent autant les particuliers que les professionnels : agriculteurs, industriels, collectivités locales, entreprises de loisirs,… « Dans la très grande majorité des cas, les mesures de restriction sont respectées, souligne le communiqué de la préfecture qui en dresse le bilan. Moins de 10 % des contrôles constatent un non-respect des mesures. Les seules infractions constatées à ce jour portaient sur le non-respect des restrictions horaires pour l’arrosage de la part de collectivités ou de particuliers. Elles ont fait l’objet d’un rappel à la loi. Contrairement aux dernières situations de sécheresse, il n’a pas été constaté d’arrosage de véhicule chez les particuliers, nettoyage de toiture, terrasses ou façades. » Lors de la journée plus spécifique du 29 juillet, les services se sont rendus sur plusieurs lieux : le golf de Longeville-lès-Metz, le centre d’entraînement du FC Metz, l’exploitation maraîchère « La cueillette de Peltre », l’UEM (Usine d’Électricité de Metz). Six industriels ont également été contrôlés. Aucune infraction majeure n’a été constatée.

Débits exceptionnellement bas

Les suivis des niveaux des cours d’eau montrent une dégradation nette des débits, certains secteurs étant plus marqués que d’autres, notamment la Seille et la Moselle. 40 stations sont suivies. 30 % de ces stations sont en assec (1) alors qu’il n’y en avait aucune en avril. L’écoulement étant qualifié d’acceptable pour 22 % d’entre elles, contre la totalité en avril. La situation est donc très préoccupante : le débit est exceptionnellement bas pour la saison, avec un seuil de crise sur certains secteurs. On constate des premières situations de mortalité piscicole. Sur les eaux souterraines, le niveau des nappes baisse, alors que leur rôle est de soutenir rivières et canaux. Fin juillet, il n’y avait toutefois pas de difficultés identifiées au niveau de l’alimentation en eau potable. En revanche, pour les sols donc pour l’agriculture, le maraîchage, l’indice d’humidité est déficitaire de 50 à 60 %. Il y a des craintes sur les récoltes de maïs et tournesol à venir. L’herbe ne pousse plus, les animaux au parc sont nourris avec des foins initialement stockés pour l’hiver. La forêt est fragilisée, avec une mauvaise pousse des jeunes arbres plantés dans l’année. Il y a des départs de feux, ces départs étant très souvent d’origine humaine et accidentelle (travaux, mégots, loisirs).

 

L’opération du 29 juillet avait surtout un objectif pédagogique, à travers une sensibilisation des usagers à l’importance de respecter les mesures prises pour préserver les ressources en eau. © PREFECTURE MOSELLE
L’opération du 29 juillet avait surtout un objectif pédagogique, à travers une sensibilisation des usagers à l’importance de respecter les mesures prises pour préserver les ressources en eau. © PREFECTURE MOSELLE

Des conflits d’usage à craindre

Concernant l’activité économique, le communiqué ne fait pas état de difficultés majeures. Sachant que la situation hydrologique peut impacter ces activités, en raison du manque d’eau ou de rejets dans un milieu devenu trop sensible. En matière de santé publique, des cyanobactéries ont été détectées dans les étangs. Ces bactéries peuvent dégager des toxines en cas de chaleur et eaux stagnantes. L’étang de Mittersheim a par exemple été contraint de fermer. Pour la navigation fluviale, les bateaux sont regroupés au passage des écluses et un pompage des étangs réservoirs est effectué pour économiser l’eau. La situation peut également être source de conflits d’usage, par exemple en cas d’utilisation par Voies Navigables de France de l’étang réservoir de Stock, ce qui nuit aux activités de loisirs.

Il y a peu de perspectives d’amélioration de la situation prochainement. Suite à un comité de ressources en eau qui a eu lieu le jeudi 27 juillet, de nouvelles mesures sont mises en place pour lutter contre les effets de la sécheresse : le Sillon Mosellan (Moselle aval, Orne, Nied, Seille, Moselle amont et Meurthe), passe en situation d’alerte renforcée, donc au niveau 3. L’Est du département (Sarre, Lauter, Sauer, Moder et Zorn) passe en situation d’alerte, au niveau 2.

(1) Période pendant laquelle un étang ou une rivière est asséché.

Les restrictions d'eau contrôlées en Moselle.

Des restrictions précises

En cas de sécheresse, quatre niveaux d’alerte de gestion de la sécheresse sont définis :

1. Vigilance : information et incitation à faire des économies d’eau

2. Alerte : limitation de certains usages de l’eau (niveau enclenché pour l’Est de la Moselle)

3. Alerte renforcée : renforcement des limitations (niveau enclenché pour le Sillon Mosellan)

4. Crise : arrêt de certains usages non prioritaires

La situation d’alerte implique des restrictions d’usage de l’eau applicables à tous les usagers, particuliers, collectivités, agriculteurs et industriels. Elle se traduit par de nombreuses interdictions : de remplir les piscines privées, de laver son véhicule à titre privé à domicile, de laver les façades, les toitures et les terrasses, d’arroser les terrains de golf de 8 h à 20 h, d’arroser les cultures, les espaces verts, les jardins et pelouses, les massifs fleuris, ainsi que les terrains de sport entre 11 h et 18 h, de vidanger et de remplir les plans d’eau, de réaliser des travaux en cours d’eau. Sont aussi mises en place de mesures individuelles pour les industriels, les bateaux dans les écluses sont regroupés, les centrales électriques sont arrêtées sur la rivière Moselle.

Le niveau d’alerte renforcée restreint un peu plus certains usages de l’eau : interdiction de laver les voiries, les trottoirs (sauf salubrité ou sécurité), d’arroser les terrains de golf à l’exception des greens et départs, de nettoyer les terrasses, façades, toitures et autres surfaces, d’arroser les pelouses et les massifs fleuris. Les plages d’interdiction d’arrosage sont étendues, de 8 h à 20 h, (contre 11 h - 18 h auparavant). Des restrictions supplémentaires sont appliquées sur l’irrigation agricole. Il y a restriction de mouillage sur les portions d’un cours d’eau entre deux écluses.

Dominique PÉRONNE