Grand Est Paru le 28 octobre 2022
ARTISANAT DU BÂTIMENT

La CAPEB inquiète pour 2023

La confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) dans sa note de conjoncture du 2e trimestre a, certes enregistré une croissance de l’activité, mais en raison de la hausse des prix des matériaux et de l’énergie, exprime son inquiétude pour la conjoncture en 2023.

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Les chiffres de l’activité de l’artisanat du bâtiment sont plutôt bons au 2e trimestre 2022. La croissance de l’activité confirme sa vigueur tirée par les travaux en entretien-rénovation (+3%) qui continuent de bénéficier du dynamisme des travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements (+4% en volume par rapport au même trimestre 2021). Mais malgré, cette conjoncture encore positive, la CAPEB reste préoccupée par une situation économique incertaine du fait de la poursuite de la hausse des prix des matériaux et des difficultés géopolitiques, qui pèse de plus en plus sur les entreprises artisanales du bâtiment et notamment sur leurs marges et leurs trésoreries.

Jean-Christophe Repon, président national de la CAPEB l’a dit lors de la présentation de cette note de conjoncture en septembre à Paris. « Les entreprises artisanales qui savent s’adapter, ont réussi jusqu’à présent à maintenir leur activité à un niveau très satisfaisant… mais cela ne pourra pas durer. Si les chiffres sont encore favorables, le contexte actuel lié aux difficultés d’approvisionnement, de recrutement et à la hausse des prix des matériaux et de l’énergie, menace cette croissance. Dans ces conditions, nous appelons le gouvernement à prendre les mesures qui s’imposent pour répondre de manière efficace à l’inflation, à la nécessaire transparence des prix et au risque de récession en 2023. » Le président de la CAPEB espérait du reste un premier train de mesures du gouvernement lors des assises du BTP. 13 mesures ont en effet été annoncées à cette occasion.

La construction neuve positive

Au deuxième trimestre 2022, l’activité globale des entreprises artisanales du bâtiment enregistre une hausse de 3% par rapport au même trimestre de 2021. Des résultats qui restent en ligne avec la tendance annuelle qui s’établit à 3,5% sur les quatre derniers trimestres.

La croissance dans le neuf : avec 2,5% de croissance, la construction neuve continue de progresser mais à un rythme moindre que la tendance annuelle (2,7%). Une conjoncture positive portée notamment par les autorisations de construction (+16,4% en mai 2022 par rapport à mai 2021).

Autre indicateur favorable : le nombre de logements individuels autorisés a progressé de 35 300 de juin 2021 à mai 2022 soit +18,4% pour atteindre 227 000 unités. Les logements individuels groupés ont augmenté toutefois plus fortement que les logements individuels purs : respectivement +28,1% et +15,5%.

Et dans l’ancien

Pendant cette période, les mises en chantier de logements individuels ont crû de 13 700 unités, soit +8,8% et atteignent 169 900 logements commencés. Les logements individuels groupés ont légèrement augmenté (+0,5%) tandis que les logements individuels purs ont plus nettement progressé (+11,4%).

Dans le même temps, la croissance dans l’ancien se poursuit. L’activité entretien-rénovation enregistre une croissance de +3% en comparaison avec le 2e trimestre 2021 et profite du dynamisme des travaux de performance énergétique des logements qui progressent de 4% au 2e trimestre 2022.

L’activité régionale montre ce trimestre une forte disparité entre les régions. Si l’activité croît sur l’ensemble du territoire avec des taux compris entre 2,5 et 4%, une majorité de régions (7) affiche cependant une progression en retrait par rapport au 1er trimestre 2022. A contrario, la région Nouvelle Aquitaine présente la plus forte hausse à 4% et d’autres régions affichent une hausse au-dessus de la moyenne nationale : Bourgogne, Franche-Comté, PACA et Corse, les Pays de Loire sont à +3,5%. Le Grand Est est dans la tranche basse à +2,5%.

L’emploi reste dynamique

Dans ce tableau, l’emploi reste dynamique avec des intentions d’embauche importantes. Le secteur de la construction continue d’être pourvoyeur d’emplois : un accroissement des embauches de salariés de +2,3% est observé ce trimestre. Dans l’artisanat du bâtiment, 25% des chefs d’entreprise interrogés ont ainsi cherché à embaucher durant le second trimestre 2022 (contre 31% au trimestre précédent) et 12% y sont parvenus contre 17% au trimestre précédent.

Les travaux d’électricité en pointe

La croissance par corps de métier propose des évolutions comprises entre 2% et 4%. Les travaux d’électricité affichent la croissance la plus dynamique avec +4%, tandis que la hausse atteint 3,5% pour l’aménagement décoration plâtrerie. Ces deux secteurs confirment leur solide tendance actuelle. Les travaux de couverture-plomberie-chauffage connaissent quant à eux une progression un peu plus modérée mais stable autour de +3%. En revanche, le constat est plus mitigé pour la maçonnerie et la menuiserie-serrurerie avec un taux de croissance plus faible en baisse 2,5% et 2% par rapport au trimestre précédent.

Des besoins de trésorerie en hausse

Alors qu’un an auparavant 4% seulement des entreprises affichaient des besoins en trésorerie, elles sont au 2e trimestre 16% à en faire état. Le solde d’opinions concernant la trésorerie s’établit à -14 points contre -5,7 points pour la moyenne de long terme, avec 22% des entreprises déclarant une détérioration de leur trésorerie et 8% une amélioration. Parmi ces entreprises 61% déclarent un besoin supérieur à 10 000 euros. Le montant moyen des besoins de ces entreprises reste stable à 20 000 € pour le deuxième trimestre consécutif, contre 14 000 € un an auparavant.

Baisse des marges

Le ressenti des entrepreneurs sur leurs marges inquiète la CAPEB. De fait, ce trimestre 36% des entreprises déclarent une baisse des marges contre 40% au 1er trimestre 2022, tandis que seulement 5% déclarent une hausse. Le solde d’opinions sur ce trimestre s’établit à -31 points et reste en baisse par rapport au même trimestre de l’année précédente (-4 points).

Le nombre de jours de carnets de commandes s’élève à 101 au 2e trimestre soit 10 jours de moins qu’un an auparavant. Rien d’alarmant et l’évolution semble se stabiliser à des niveaux élevés, tant en neuf qu’en entretien-rénovation. Les entreprises de 10 à 20 salariés apparaissent légèrement favorisées.

La hausse des prix continue

L’étude de la CAPEB auprès de 1700 entreprises confirme la poursuite de la hausse des prix des matériaux depuis janvier 2022. Comme au premier trimestre la menuiserie-serrurerie est l’activité qui connaît la plus forte hausse de prix (+29%) suivie de près par l’aménagement, décoration et plâtrerie et la maçonnerie (+26%). En cause, la forte augmentation de l’acier et du bois.

En moyenne 81% des entreprises interrogées déclarent avoir répercuté la hausse des prix au 2e trimestre, contre 60% au trimestre précédent. Les électriciens et menuisiers-serruriers répercutent cette hausse de prix de manière plus importante que la moyenne (+75% et +67%).

En moyenne, le poids des matériaux représente plus de 30% des coûts de l’entreprise. Il représente 36% chez les électriciens et 31% dans l’aménagement, décoration, plâtrerie.

Enfin 74% des entreprises contre 56% en avril 2022 déclarent que la hausse des délais d’approvisionnement et la pénurie de matériaux posent des problèmes de production et d’organisation dans leur entreprise.

Pour Jean-Christophe Repon « les hausses de prix actuelles vont impacter l’activité de nos entreprises avec pour conséquences de ralentir la transition énergétique dans le bâtiment alors que nous devrions, au contraire, accélérer. Nous demandons aux industriels et aux distributeurs une vraie transparence dans les hausses de prix annoncées car nous sommes convaincus que certaines hausses que nos entreprises subissent actuellement vont bien au-delà du simple impact de la guerre en Ukraine ou de la hausse du coût des énergies. Pour la CAPEB, la période actuelle nous oblige à une vraie solidarité économique entre les acteurs de la filière. Face à cette situation inquiétante, la CAPEB a formulé des propositions concrètes aux pouvoirs publics pour conforter l’activité et permettre à nos clients de continuer à engager des travaux. Nous veillerons à ce qu’elles soient reprises. »

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Bernard KRATZ