Le plan Eau de 53 mesures présenté par Emmanuel Macron le 30 mars dernier à Savines-le-lac, au lac de Serre-Ponçon dans les Hautes-Alpes, a reçu le soutien massif des sept comités de bassin du pays. « Ils soutiennent pleinement les 53 mesures du plan Eau qui reprennent leurs contributions adressées en fin d’année dernière dans le cadre de la consultation préalable et sont prêts à la traduire dans les prochains programmes d’intervention des agences de l’eau 2025-2030 » indique le communiqué des comités de bassin à l’issue de leur rencontre avec la secrétaire d’État chargée de l’Écologie Bérangère Couillard.
« Une reconnaissance des instances de bassin »
Contrairement au point de vue plutôt critique de France Environnement sur les mesures annoncées par le président de la République (Lire les Affiches d’Alsace et de Lorraine N°33 du 25 avril 2023), qui estime que ce plan ne fait que reprendre des mesures des assises de l’eau de 2019, les présidents et vice-présidents des comités de bassin ont souligné « leur satisfaction quant à la confiance faite par le chef de l’État d’en faire des échelons clés de la déclinaison de ce plan, reconnaissant par là même, le rôle joué par les instances de bassin dans la construction du modèle français de l’eau. » En clair, ce plan confirme le poids des comités de bassin dans la politique de l’eau du pays.
« Une nouvelle page… »
Après la sécheresse de 2022 et ce début d’année encore fragile d’un point de vue hydrologique, « l’adaptation au changement climatique ouvre une nouvelle page de la politique de l’eau en France » remarquent les comités de bassin dont les présidents ont tenu à rappeler l’importance. « Ces instances réunissent toutes les parties prenantes de l’eau et sont des enceintes essentielles pour poser de manière apaisée les termes du partage de l’eau et de la conciliation des usages avec la protection des ressources en eau. » De fait, l’ensemble des comités de bassin sont d’ailleurs déjà à l’oeuvre pour l’actualisation de leurs plans d’adaptation au changement climatique d’ici l’été 2023. Ils déclinent chacun la trajectoire de sobriété fixée par le gouvernement.
Une stratégie déjà déployée
Les 53 mesures du plan Eau constituent une amplification des stratégies d’actions déjà déployées par les agences de l’eau tant sur le plan de la qualité de l’eau que sur le volet quantitatif. On peut citer par exemple le renforcement des actions en matière d’agroécologie ou la mise en valeur des solutions fondées sur la nature telles la préservation et la restauration des zones humides pour qu’elles puissent contribuer à la régulation des cycles hydrologiques ou encore le stockage de l’eau dans les sols.
Les présidents de comités de bassin saluent la grande cohérence d’action du plan, qui appelle à une meilleure articulation entre les programmes d’intervention des agences de l’eau et l’action régalienne.
Des moyens financiers à la hauteur de l’enjeu
Reste la question des moyens octroyés pour réaliser ce plan. Selon France Environnement, il s’appuierait sur une hausse du prix de l’eau payé par les consommateurs. Ce que nuance les comités de bassin. Pour ces derniers, le cap fixé nécessite des moyens d’accompagnement sans précédent et en cela les présidents des comités de bassin « accueillent avec satisfaction le choix retenu de faire porter les financements nouveaux via un accroissement des recettes des agences de l’eau de près de 500 M€ d’ici 2025, avec de manière corollaire une suppression du plafond des dépenses dès 2024. » Et cela répond selon eux « à une attente formulée unanimement depuis de nombreuses années. Les comités de bassin sauront prendre leurs responsabilités pour être à la hauteur des ambitions du gouvernement et des transformations qu’exige le défi climatique. »
Inverser le déficit d’investissements
Cette dynamique entre dès lors en résonance avec les 12e programmes en cours d’élaboration, avec une montée en puissance du grand mais aussi du petit cycle de l’eau afin d’inverser le déficit d’investissements dans les services publics d’eau et d’assainissement et de développer la réutilisation des eaux usées traitées et des eaux grises.
Compte tenu de l’urgence climatique et des craintes de pénurie d’eau, les présidents de comités de bassin ont déclaré à la secrétaire d’État « être ouverts à anticiper une montée en puissance des programmes d’intervention d’ici 2025, sous réserve que les moyens des agences de l’eau le permettent. » Ils ont ainsi appelé l’attention sur « la nécessité de tenir le calendrier d’augmentation des moyens des agences de l’eau et sur l’opportunité des décisions relatives à la fiscalité et aux effectifs indissociables de l’atteinte des objectifs fixés par le chef de l’État. »
Faire aboutir la réforme des redevances
On envisage du côté des comités de bassin d’aller vers une réforme des redevances équitable et des moyens humains à la hauteur des ambitions. « Il s’agira de faire aboutir ce projet de réforme des redevances pour disposer des leviers afin de faire voter une augmentation des recettes tout en assurant un rééquilibrage des contributions des différents acteurs. » En clair, il devrait bien y avoir une augmentation du prix de l’eau avec, selon les comités de bassin, un souci de l’équilibre de chaque contribution : consommateurs, industriels, agriculteurs. Du reste, la constitution d’un mode de financement spécifique de la biodiversité (nouvelle redevance assise sur l’atteinte à la biodiversité, ou crédits budgétaires) est rappelée comme une revendication constante des comités de bassin. « Elle est plus que jamais essentielle pour éviter que l’abonné domestique ne supporte de manière déséquilibrée l’augmentation des programmes des agences de l’eau. La réforme des redevances permet à pression fiscale constante d’introduire une nouvelle redevance environnementale répondant à cet objectif. »
Sans oublier l’emploi
Il s’agit également d’octroyer les moyens humains indispensables aux agences de l’eau pour mener à bien ce plan Eau. Et les présidents des comités de bassin sont très vigilants à ce propos : « L’augmentation du schéma d’emplois des agences de l’eau est absolument indispensable pour faire face aux ambitions nouvelles qui leur sont fixées et au besoin d’accompagnement accru des collectivités et des acteurs économiques les plus fragiles. »
Il est rappelé à cet égard que le modèle de financement des agences de l’eau constitue un outil de péréquation unique en faveur du monde rural qui a montré son efficacité. « Il s’avérera décisif de le maintenir, voire de le conforter pour résorber l’ensemble des points noirs recensés en termes de sécurité d’alimentation en eau potable. »
Un fait que l’on avait pu mesurer dans les dernières aides du plan sécheresse de l’agence de l’eau Rhin Meuse qui a ciblé bon nombre de projets d’amélioration du réseau d’eau dans les communes rurales.