Grand Est Paru le 09 avril 2024
NORD-MOSELLE

Trois communautés de communes s’engagent sur la mobilité

Dans le Nord-mosellan, le travail transfrontalier est prédominant, alors que sur ces territoires ruraux ou semi-ruraux, l’usage de la voiture pour se rendre sur son lieu d’activité est quasiment un passage obligé. Les alternatives, notamment le train et ses gares, étant éloignées des lieux de résidence. D’où un engorgement des axes de circulation qui s’accentue inexorablement. Pour faire face à ces enjeux de mobilité, les trois communautés de communes du Nord-mosellan ont travaillé ensemble sur la mise en place d’une aide financière au co-voiturage.

C’est à Malling, commune à la jonction des trois EPCI concernées, que le dispositif a été présenté.

Plus de 50 000 véhicules par jour hors autoroute A 31. Voilà ce que donnent les derniers décomptes de passages sur le seul terri­toire de la Communauté de Communes de Cattenom et Environs, CCCE, la plus impactée du Nord-mosellan par le trafic transfron­talier. Un chiffre en constante augmentation, comme le soulignait Michel Paquet, président de cette collectivité locale. Un élu qui dit comprendre le désarroi de ses habitants, devant les « hordes » de véhicules quotidiens, provoquant ralentissements, bouchons à certaines heures, et inévitables accidents. Sur les territoires des deux autres communautés de communes proches, le Bouzonvillois- Trois Frontières et l’Arc Mosellan, le problème est moindre, ces secteurs correspondant plutôt à des points de départ et d’arrivée, beaucoup moins de transit. Mais rien que sur la petite commune de Malling, 700 habitants, située à la confluence de ces trois collectivités, le nombre de véhicules par jour est de 5000 ! C’est d’ailleurs à Malling que les présidents de ces trois EPCI ont pré­senté, le 12 mars dernier, les résultats de leur travail sur ces enjeux de mobilité. Ainsi que le partenariat établi avec la plateforme de covoiturage Blablabar Daily, une branche de l’activité de Blablacar, dédiée aux trajets quotidiens. Ce travail a abouti, depuis la mi-mars, à la mise en place d’une aide financière identique sur les trois sec­teurs, afin de développer le covoiturage. L’objectif est d’encourager les automobilistes à partager leurs trajets en prenant à bord un ou plusieurs passagers, en cas de destination commune, ou proche. Ceci grâce à l’utilisation de Blablacar Daily.

Tarif unique par passager

Chaque communauté de communes va donc débloquer une en­veloppe de 30 000 € par an, dont 10 000 € sur son budget propre, 10 000 € en provenance du Fonds Vert et 10 000 € abondés par Blablacar Daily. Concrètement, les conducteurs recevront au mini­mum 2 € à chaque covoiturage (voir graphique) et le trajet reviendra à 0,50 € pour le passager. Il s’agit là d’un tarif unique, quel que soit le secteur. Pour souscrire à cette aide, les conducteurs doivent té­lécharger l’application. Ils y indiquent leurs adresses de domicile et de travail ainsi que leur planning pour la semaine. L’application met ensuite en contact les membres qui empruntent le même itinéraire aux mêmes horaires. Les points de rendez-vous sont proposés automatiquement avec le minimum de détour pour le conducteur.

« La mobilité est un enjeu essentiel, soulignait Michel Paquet, et cette solution vient s’ajouter à d’autres. Ce n’est pas LE remède miracle. Mais sans cela, nous n’allons pas nous en sortir. Le défi est immense au vu des projections à cinquante ans. » Armel Chabane, président du Bouzonvillois-Trois Frontières, a insisté, lui, sur le fait que le covoiturage n’était pas encore entré dans les mœurs des usagers de la route. Notamment sur une zone rurale comme la sienne et avec un autre défi, celui du vieillissement de la population. « Ce système de covoiturage peut aussi être une réponse au problème de la mobilité des jeunes et des personnes âgées », estime-t-il. Sachant que les seniors sont peu présents sur ce type d’outil inte­ractif et ont le plus souvent besoin d’un tiers pour y avoir recours. Pour Arnaud Spet, président de l’Arc Mosellan, les collectivités, les élus ont trop tergiversé et doivent désormais « prendre leurs responsabilités sur ces enjeux essentiels pour l’avenir de leurs territoires ». Il a également souligné l’impact environnemental de la démarche, permettant de réduire l’empreinte carbone totale en en réduisant l’autosolisme (1). « Il nous faut, ensemble, essayer de changer les habitudes » a-t-il conclu. Vaste chantier.

« Le virage du train a été raté »

Philippe habite à 12 km à l’est de Thionville et travaille au Luxembourg depuis vingt ans. Après avoir fait les trajets en voiture, en moto, il a renoncé devant la dangerosité de l’autoroute A31, qui dessert le Sillon Lorrain, donc de Nancy au Luxembourg. Désormais, il prend le train à Thionville. Il doit louer un parking, tout près de la gare, les places de stationnement aux alentours étant prises d’assaut très tôt le matin. Même s’il trouve intéressante la démarche de finan­cer le covoiturage, il estime difficile de se coordonner avec quelqu’un de proche, en raison des trajets, des horaires diffé­rents. Il regrette surtout que certaines lignes ferroviaires aient été abandonnées, notamment celle qui reliait Bouzonville à Thionville, et qui permettait de desservir de nombreuses com­munes. « Celle-ci contribuerait à mettre beaucoup moins de monde sur les routes, matin et soir, et éviterait ces problèmes de stationnement à Thionville, souligne-t-il. Les collectivités locales ont raté ce ‘virage’ du train il y a dix ans. »

Une prime nationale existante

Les automobilistes qui changent leurs habitudes de déplacement en partageant leur trajet peuvent également recevoir une prime covoiturage de 100 €. Celle-ci a été mise en place en janvier 2023 dans le cadre du « Plan national du covoiturage du quotidien ». Les conducteurs peuvent en bénéficier en par­tageant pour la première fois dix trajets domicile-travail sur l’application Blablacar Daily. Cette prime est versée après les vérifications nécessaires par la plateforme elle-même, afin d’éviter les fausses décla­rations.

De gauche à droite au centre, deux représentants de Blablacar Daily, Arnaud Spet, président de l’Arc Mosellan, Michel Paquet, président de la CCCE, Communauté de Communes de Cattenom et Environs, Armel Chabane, président de Bouzonvillois – Trois Frontières. « Ils nous faut, ensemble, essayer de changer les habitudes » soulignent les élus.

Dominique PÉRONNE