Pour l’instant, ce ne sont que quelques bacs de cantine provenant de restaurants scolaires strasbourgeois et posés sur un tapis roulant qui rentrent sales et sortent propres, quelques minutes plus tard, du tunnel de lavage et de séchage. Mais d’ici quelques mois – ou années –, Uzaje, installée au Port du Rhin, entend bien traiter 100 millions d’emballages par an, provenant de la restauration collective ou commerciale, de la grande distribution ou de l’industrie agroalimentaire.
La loi anti gaspillage pour une économie circulaire de 2020 fixe par exemple que, d’ici 2030, 15 % des emballages individuels soient réutilisables. « Pour cela nous devons appliquer la règle des « 3 R », indique Emmanuel Auberger, président fondateur d’Uzaje : réduire, réemployer ou recycler. La réduction et le réemploi sont les plus vertueux en termes de bilan environnemental ; car, pour recycler, il faut consommer beaucoup de ressources. » Uzaje, créée en 2019, a choisi le réemploi. Deux usines ont déjà été installées à Neuilly-sur-Marne et Avignon. Le nouveau site de Strasbourg, en fonctionnement depuis le mois de septembre et inauguré, le 8 octobre dernier, est le plus important des trois. Il entend devenir « le premier centre européen pour l’industrialisation du réemploi ».
Environnementalement et économiquement performant
Uzaje lave des bacs en métal ou en plastique, y compris les plus sales, des bouteilles en verre ou en plastique, des flacons de cosmétique… La zone de chalandise est plutôt large : environ 100 km de diamètre pour les bacs et autres contenants des restaurants scolaires, 200 km pour les restaurants et 850 km pour les bouteilles. Se basant sur l’expérience des deux premières usines francilienne et provençale, Emmanuel Auberger affiche sa confiance dans la réussite du projet : « Ce qui compte, c’est d’enclencher la boucle. Nos deux premières usines démontrent que cela fonctionne : c’est environnementalement et économiquement performant. Pour cela, il faut embarquer le consommateur » … et bien sûr que la loi soit appliquée.
À Strasbourg, les premiers clients sont les restaurants scolaires, gérés par API Restauration ou l’Alsacienne de Restauration. D’après le dirigeant, un leader de la grande distribution s’est également montré intéressé, mais aussi quelques industriels de petite taille de l’agroalimentaire, qui, contrairement à Carola ou Meteor, n’ont pas les moyens d’accéder au réemploi.
Le propre ne croise pas le sale
L’usine Uzaje de Strasbourg représente un investissement de 3,5M €, dont 1,7M € ont été apportés par l’ADEME.
Deux lignes de lavage ont d’ores et déjà été installées dans un grand hangar de 4 000 m². La ligne « Meuse » lave des bacs en inox, comme un lave-vaisselle. La ligne « Rhin » peut laver jusqu’à 10 000 bouteilles par heure – y compris des bouteilles d’huile –, qui sont totalement remplies d’eau et ressortent entièrement propres et sèches : et cela est un peu plus complexe qu’il n’y parait. Une troisième machine est en cours de finalisation : elle grattera les étiquettes.
« Attention, insiste Emmanuel Auberger, dirigeant de l’entreprise, le sale ne doit jamais croiser le propre. » Les emballages lavés et séchés, arrivent dans une salle propre où la palettisation est assurée par un robot. Hygiène alimentaire oblige.
Selon son dirigeant, l’entreprise, qui fonctionne actuellement « en mode start-up », devrait atteindre son seuil de rentabilité d’ici deux ans avec un volume de 20 à 30 millions d’emballages traités, pour une capacité de 100 millions.
Aujourd’hui, 4 salariés travaillent sur le site. À terme, ils pourraient être une quarantaine, dont la moitié en insertion professionnelle.
D’ici quelques années, Uzaje envisage d’ouvrir d’autres usines comme celle de Strasbourg : à Lille, Bordeaux, Marseille, Lyon, Nantes… « En France, il faudrait une dizaine de sites comme celui-ci », estime Emmanuel Auberger.