Grand Est Paru le 25 juillet 2025

Les lauréats de la Fondation du patrimoine

Le 25 juin dernier, au Musée de Cluny, musée national du Moyen Âge, la Fondation du patrimoine a présenté la liste des différents lauréats au titre du Prix Sésame, du Programme Patrimoine roman et du prix en partenariat avec la Fondation Edmond J.Safra.

La Synagogue de Thann © Guillaume de Laubier

Des milliers d’édifices menacés, une fréquentation en baisse, des col­lectivités en difficulté : le patrimoine religieux français est en péril, et l’urgence est à la mobilisation collective. Sur les 50 000 lieux de culte recensés dans l’Hexagone, un triste constat s’impose : près de 5 000 pourraient disparaître d’ici 2030, et 500 sont déjà fermés au public. Cette fragilisation représente une menace sérieuse pour la richesse culturelle et historique des territoires.

Face à cette situation critique, la Fondation du patrimoine, forte de ses actions passées ayant déjà permis le sauvetage et la restauration de plus de 8 000 édifices religieux de tous cultes, intensifie ses efforts. Sous l’impulsion de la Présidence de la République, une collecte nationale pour la sauvegarde du patrimoine religieux des villages de France a été lancée en septembre 2023. Cette initiative, toujours en cours, offre un taux de défiscalisation exceptionnel de 75 % et a déjà permis de mobiliser plus de 22 millions d’euros.

Cependant, l’ampleur des besoins est telle que la Fondation du patrimoine lance un nouvel appel à la mobilisation collective. La sau­vegarde de ce patrimoine est un véritable défi national qui nécessite l’engagement de tous.

Convaincue que les usages sont la clé de la pérennité du patrimoine religieux, la Fondation du patrimoine met également en lumière des initiatives innovantes. Elle a ainsi dévoilé les 11 lauréats 2025 du Prix Sésame, qui récompense depuis trois ans des projets favorisant de nouveaux usages des lieux de culte, compatibles avec leur vocation première ou respectueux de leur esprit et de leur histoire. Ces lauréats se verront attribuer une dotation totale de 220 000 euros, un soutien précieux pour ces projets qui démontrent que la vitalité de ces lieux passe aussi par leur réinvention.

Le patrimoine religieux n’est pas seulement une question de pierres et de murs ; il est le reflet de notre histoire et de nos identités locales. Sa préservation est un enjeu majeur pour les générations futures.

Les lauréats 2025 sont :

- La chapelle Saint-Thomas du Petit-Paris à Saint-Nazaire-le-Désert (Drôme),

- Le temple Saint-Martin de Montbéliard (Doubs),

- La chapelle Notre-Dame de Penhors à Pouldreuzic (Finistère),

- Le temple protestant de Médis (Charente-Maritime),

- La chapelle Saint-François du Centre hospitalier Marguerite-de-Lorraine à Mortagne-au-Perche (Orne),

- L’église Saint-Pierre de Thiré (Vendée),

- Le festival Sacrée Musique (Provence-Alpes-Côte d’Azur),

- La chapelle des Trois-Marie à Vitré (Ille-et-Vilaine),

- La chapelle du Puy-Grand à Beaumont (Corrèze),

- La chapelle de l’Hôtel-Dieu Saint-Julien à Château-Gontier (Mayenne)

Un lauréat dans le Grand Est : La synagogue de Thann dans le Haut-Rhin

Celle-ci, inaugurée en 1862, a traversé l’histoire, subissant destruc­tions et renaissances pour devenir un puissant symbole de rési­lience et de l’héritage juif. Partiellement détruite en 1915, la syna­gogue a été reconstruite dans un remarquable style néo-byzantin.

Son intérieur, orné d’un décor hispano-mauresque, est un hommage vibrant aux origines orientales du peuple juif et au mythique âge d’or de l’Andalousie. Sous l’Occupation, elle fut saccagée et réquisitionnée par les Nazis, transformée en local pour le Winterhilfswerk, un service d’aide aux démunis. Ce n’est qu’en 1948 qu’elle fut enfin restituée à la communauté et remise en état. Plus récemment, son importance historique a été officiellement reconnue. Inscrite au titre des monu­ments historiques en 2016, la synagogue bénéficie depuis 2015 du soutien crucial de la Fondation du patrimoine. Ce partenariat permet non seulement la mise en valeur de son mikvé (bain rituel), mais également la création d’un espace muséal.

La synagogue devient un espace pédagogique abritant des collec­tions, expositions et concerts. Elle accueille des publics scolaires, des acteurs du dialogue interreligieux, et constitue un lieu mémoriel de la communauté.

La dotation du prix Sésame permettra de restaurer et aménager une pièce annexe inutilisée afin d’y installer une bibliothèque accessible au public et aux chercheurs, dédiée aux recherches généalogiques et historiques. Outre un équipement informatique, elle sera pour­vue d’un fonds de livres et de cassettes en yiddish issu du fonds de l’universitaire Astrid Starck. Dans cette dynamique d’ouverture touris­tique, la synagogue de Thann constitue le point de départ de la route européenne des vins kasher et participe aux Journées européennes de la culture juive.

L’ouverture au public est prévue en septembre 2025 à l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine.

La Fondation a également confirmé la poursuite du Programme Patrimoine roman, qui soutient spécifiquement la restauration d’édifices romans, parmi les plus anciens du paysage cultuel français.

Les 6 lauréats 2025 du programme ont été dévoilés et bénéficieront d’une aide de 275 000 euros.

Il s’agit des édifices suivants :

- L’église de Saint-André de Bâgé (Ain),

- La chapelle Sainte-Marie-des-Chazes (Haute-Loire),

- L’église Saint-Symphorien à Azay-le-Rideau (Indre-et-Loire),

- La chapelle Notre-Dame à Boussac-Bourg (Creuse),

- L’ancienne chapelle du château de Commarque aux Eyzies (Dordogne),

- L’église Saint-Sauveur de Rochechouart (Haute-Vienne).

Enfin, la Fondation du patrimoine a annoncé un mécénat de 150 000 euros en faveur de la synagogue consistoriale de Metz, dans le cadre du partenariat avec la Fondation Edmond J. Safra. Ce mécénat inaugure le programme lancé à cette occasion visant à la conservation et à la restauration du patrimoine lié à l’histoire juive en France.

À propos de cette synagogue, il faut se rappeler que la présence des juifs à Metz est ancienne. Le dynamisme de la communauté juive messine s’est manifesté par l’édification de plusieurs synagogues et d’une école talmudique aux XVIIe et XVIIIe siècles. Cette institution a attiré de nombreux rabbins renommés, dont les préceptes sont encore étudiés à travers le monde aujourd’hui. Le rayonnement intellectuel de Metz a été tel que le gouvernement de la Restauration a choisi d’y établir l’École rabbinique de France en 1829. Le Consistoire Central de France a fait ce choix en raison de l’important foyer d’études sacrées que représentait la ville. L’école a fonctionné à Metz jusqu’en 1859, date de son transfert à Paris, où elle est toujours active rue Vauquelin.

En 1842, l’ancienne synagogue est fermée et il est décidé d’en construire une nouvelle plus grande pour répondre aux besoins de la population juive de Metz. Réalisée dans un style néo-roman entre 1848 et 1850, l’actuelle synagogue consistoriale de Metz mesure 40 m de longueur et 20 m de largeur.

Là encore, au cours de la Seconde Guerre mondiale, la synagogue de Metz a été profanée et dégradée mais n’a pas été détruite, contrai­rement à celle de Strasbourg. Ainsi, le grand rabbin Netter rouvrit les lieux fin 1944 et la synagogue fut inscrite aux monuments historiques en 1984.

La synagogue consistoriale de Metz fait l’objet d’importants travaux de restauration. La façade sera restaurée en raison de l’aggravation des altérations de la pierre de Jaumont dont certains blocs se sont détachés. De même, les marches en pierre, ayant subi des mouvements de descellement, seront remises en état.

À l’intérieur, la pierre de Jaumont des piliers sera à nouveau apparente grâce au décapage des diverses couches de peinture et les fissures seront traitées. Les parquets, décors intérieurs, plafond, baies et vi­traux seront restaurés, de manière à retrouver les couleurs d’origine.

L’inauguration est prévue pour octobre 2025.

Par ces actions, la Fondation du Patrimoine souligne son engagement en faveur du patrimoine religieux. Tous ces édifices sont autant de points d’ancrage pour notre mémoire commune mais sont aussi des vecteurs de cohésion sociale.

La Synagogue consistoriale de Metz après la première tranche de travaux © Consistoire israélite de Moselle

À propos de la fondation EDMOND J. SAFRA

Il y a plus de 25 ans, Edmond J. Safra a créé la fondation qui porte son nom pour pérenniser ses engagements philanthropiques. Active dans le monde entier, la Fondation Edmond J. Safra agit dans les domaines éducatif, culturel et religieux, avec une attention constante portée à la mémoire juive. La Fondation Edmond J. Safra s’est rapprochée de la Fondation du patrimoine pour mettre en place un programme destiné à la conservation et à la restauration du patrimoine remarquable lié à l’histoire juive en France. Ce partenariat s’inscrit dans la continuité d’édifices patrimoniaux déjà accompagnés par la Fondation Edmond J. Safra : la Maison Sublime de Rouen, la Maison Rachi de Troyes ou encore la synagogue Beit Yacov de Clermont-Ferrand.

La Rédaction