Interview Paru le 29 juillet 2022
CHAMBRE DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE DE MOSELLE

Fabrice Genter : « Le sujet majeur reste la valorisation

Fabrice Genter, président de la CPME 57 est président de la CCI de Moselle depuis 2016, alors que d’aucuns en cette période voulaient remplacer la CCI mosellane par une CCI Lorraine. Il n’en a rien été grâce à la détermination de Fabrice Genter et les siens qui sont allés jusqu’au Conseil d’État pour obtenir le maintien de la CCI 57. Reconduit en 2021, il évoque dans une interview aux Affiches d’Alsace et de Lorraine un premier bilan de six mois de mandature.

Fabrice Genter président de la CCI de Moselle
Fabrice Genter président de la CCI de Moselle

- Les Affiches : Vous avez une majorité totale. Pourquoi ne pas avoir fait la fusion avec l’UE 57 (ex Medef) ?

- Fabrice Genter : « Le Medef a préféré faire sa propre liste. De notre côté nous avons voulu bâtir une équipe très soudée et élargie avec tous les métiers du BTP, de l’industrie, des services et les associations de commerçants de la Moselle, pour faire» Ensemble pour nos PME de Moselle». Cela nous paraissait essentiel vu le contexte. Et sur les 6 premiers mois de la mandature, nous voyons comment cette stratégie fonctionne bien

- Sur quel plan ?

- F.G. « Prenez toute l’activité liée à l’automobile, elle est très forte sur le Grand Est, mais en pleine mutation. Nous avons travaillé à l’échelon de la Grande Région européenne Sarre , Grand Est , Rhénanie-Palatinat Belgique . Cela s’est traduit par ces Rencontres Tomorrow in Motion à Metz ce mois de juin. La Grande Région est la première région automobile en Europe si l’on considère l’espace transfrontalier. Cela représente 2000 entreprises et 450 000 emplois pour une production annuelle de 2 millions de véhicules. L’activité automobile à l’échelle de cet espace transfrontalier avec ces 5 pays incarne une certaine idée européenne. C’est dire toute l’importance de l’industrie à l’échelle transfrontalière. Nous ne devons surtout pas renoncer à la réindustrialisation. »

« La Moselle a toute sa place au sein de la CCI Grand Est »

- Il y a cependant un bémol pour la CCI 57, la gestion des ports de la Moselle ?

- F.G. «La CCI de Moselle a géré les ports de Metz et Thionville pendant 50 ans en les modernisant. Metz est aujourd’hui un très bel outil opérationnel tri-modal. Le fait d’avoir à gérer maintenant 11 ports alors que nous n’en gérions que 3 est d’une autre dimension. Cette décision de la Région et de VNF est intervenue alors que les chambres consulaires ont subi une baisse de leurs dotations de l’ordre de 38% sous les gouvernements successifs. Il faut savoir que cette réorganisation va induire des investissements considérables. Aujourd’hui une gouvernance provisoire avec Rhenus a été mise en place en attendant le choix définitif des membres de la société d’économie mixte en charge de ce dossier. »

- Comment fonctionne la CCI Grand Est ?

- F.G. « Aujourd’hui la CCI Grand Est fonctionne comme une forme de fédéralisme avec ses 9 départements. Nous avons des territoires différents, gérés en proximité et qui apportent toutes leurs complémentarités. Il y a vraiment une bonne entente. La Moselle, en tant deuxième département sur le plan économique avec ses 39 000 entreprises derrière le Bas-Rhin y a toute sa place et occupe la 1ère Vice-Présidence.2

- Vous comptez en devenir président ?

- F.G. : « Pas du tout. Je me consacre à notre territoire mosellan tout en ayant une mission à l’échelle transfrontalière qui va jusqu’en Sarre, au Luxembourg et en Rhénanie-Palatinat. »

- Comment faites-vous avancer les projets ?

- F.G. : « C’est bien sûr à la Région, aux élus de faire avancer les choses. Nos CCI doivent mener leurs actions dans une logique de projets, de services aux entreprises afin qu’elles améliorent leurs performances. Et de nombreux sujets nous interpellent : la question du transport, le coût du transport, la sobriété énergétique, la question des mobilités etc. »

« La question du changement climatique est essentielle »

- Aujourd’hui il n’y a pas de majorité à l’Assemblée nationale. Craignez-vous une paralysie de l’action gouvernementale ?

- F.G. : « A l’évidence cela va changer les choses. Il y aura forcément moins de verticalité. Mais il faudra saisir cette opportunité d’avancer de façon plus participative. Nous n’avons pas le choix. Et si l’on observe nos voisins allemands, ils ont l’habitude de cette pratique. »

- Quels sont les questions à traiter d’urgence ?

- F.G. : « La question du changement climatique est essentielle. Nous sommes un des plus mauvais élèves en la matière. Il faut prendre en compte le coût de l’énergie, la question des transports, de la qualité des logements. Nous devons accompagner cette transformation visant à utiliser moins d’énergie, faire mieux avec moins. Pour ce qui est de la question du pouvoir d’achat, je ne crois pas que distribuer des chèques soit une solution de long terme, nous devons utiliser ces transformations en cours, investir pour que nos concitoyens vivent positivement le futur. »

- Pour l’énergie vous remarquerez qu’on va rouvrir la tranche au charbon de la Centrale thermique Emile-Huchet, alors qu’on a fermé la centrale nucléaire de Fessenheim ?

- F.G. : « Le nucléaire c’est bien, pour autant il faut que ça marche, alors que bon nombre de réacteurs sont à l’arrêt ou en révision. Le recours au charbon ne saurait être que provisoire. Il faut naturellement, pour répondre au défi énergétique, consommer autrement. »

« La mondialisation n’apporte pas toutes les solutions »

- Dans le même temps, on subit des risques de pénurie dans les matières premières, les composants. Et les entreprises ont de leur côté du mal à recruter. Comment répondre à tous ces problèmes ?

- F.G. : « Nous vivons avec la guerre en Ukraine, après la pandémie, une période qui nous met à l’épreuve. Et le capitalisme libéral, la mondialisation n’apporte pas toutes les solutions. Et pourtant nous avons des solutions très concrètes sous les yeux. Je prends l’exemple de ce que nous avons engagé à la CCI, pendant ces 6 premiers mois de notre mandat avec une campagne très tonique @tonmetiertonavenir qui propose sur les réseaux sociaux à travers une quarantaine de vidéos des formations dans toutes les filières par l’apprentissage. C’est un sujet majeur que celui de la formation. Une campagne dans l’air du temps qui change des classiques forum emploi formation. Avec cette campagne nous avons capté l’attention sur des choses positives. »

- Avec le remboursement des PGE ne redoutez-vous pas une augmentation du nombre de défaillances d’entreprises ?

- F.G. : « Nous avions engagé au moment de la crise sanitaire une opération Allo PME qui avait permis de toucher 2700 d’entre elles afin qu’elles puissent franchir le cap au mieux. Nous sommes toujours présents pour accompagner nos entreprises afin de les aider à sortir par le haut, de leur donner des pistes pour avancer. On peut malgré tout craindre une augmentation des défaillances dans les mois qui viennent. »

Des actions de la CCI 57

La CCI 57 a procédé à quelques actions très ciblées pendant ces 6 premiers mois de la mandature. Le plus spectaculaire est celui qui redéfinit l’image de la formation version chambre de commerce. Elle porte désormais le nom de CCI CAMPUS Moselle, de quoi attirer davantage les jeunes et aussi celles et ceux qui veulent changer de métiers

Le souci des entreprises est au coeur de l’action d’une autre campagne de valorisation des métiers pour répondre aux besoins des entreprises. Opération menée avec les fédérations de BTP 57, de l’UIMM Lorraine, de la FNAIM et de l’UMIH.

La campagne menée sur les réseaux sociaux sur le thème des filières @tonmetiertonavenir qu’a évoquée Fabrice Genter cible les jeunes pour les inciter à se former notamment par l’apprentissage afin de parvenir aux diplômes du CAP à celui d’ingénieur.

Par ailleurs, la mise en place de l’Euroaccélérateur ouvre de belles perspectives pour les entreprises transfrontalières

Enfin en juin Tomorrow in Motion est une opération organisée par la CCI 57 sous forme de Rendez-vous des acteurs de l’industrie automobile.

Voir aussi www.moselle.cci.fr

Recueillis par Bernard KRATZ