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Interview Paru le 19 avril 2024
CLAIRE MERLIN, DIRECTRICE GÉNÉRALE DU PORT AUTONOME DE STRASBOURG

« Nous prévoyons 200 M€ d’investissements sur les 10 prochaines années »

En 2023, le Port Autonome de Strasbourg (PAS) a connu un léger reflux de son activité principalement explicable par le ralentissement de l’activité économique. Cela n’a pas empêché de très lourds investissements qui se poursuivront dans les prochaines années. Explications en détail.

© Accent visuel

Quel est le bilan d’activité du Port Autonome de Strasbourg (PAS) en 2023 ?

Claire Merlin : Malgré une année économique relativement mo­rose pour l’ensemble de l’économie, nous nous en sortons plutôt bien. Le transport massifié de marchandises (fer + fleuve) s’élève à 7,18 millions de tonnes, soit un léger retrait de 2,5 %. Nous faisons plutôt mieux que d’autres ports fluviaux. En revanche, le trafic ferroviaire est repassé sous la barre de 1 million de tonnes, à 966 000 tonnes, soit une chute de 20 % : cette baisse importante s’explique principalement par les grèves du premier trimestre. Du côté des conteneurs, nous terminons l’année avec 342 000 EVP (équivalents-vingt-pieds) en recul de 14,3 % par rapport à 2022. En revanche, 2023 a été une excellente année pour les croisières rhénanes : 306 000 passagers ont débarqué à Strasbourg, soit une hausse de 70 %. Ceci s’explique en partie par la fermeture du pont de Kehl, mais nous observons une très belle dynamique de l’activité croisière, que nous accompagnons par nos investisse­ments sur la gare fluviale. Enfin Batorama a connu une croissance de 14 %, avec 740 000 passagers. J’en profite pour rappeler que nous avons reçu, au début de cette année, notre premier bateau 100 % électrique : le « Strasbourg ».

Quels ont été vos grands projets d’investis­sement ?

C. M. : En 2023, nos investissements ont presque atteint 10 M €, soit un doublement en un an. Nous avons notamment étendu notre réseau ferroviaire et acheté un nouveau reachtaker. Nous avons poursuivi notre programme de décarbonation du territoire : le réseau de chaleur R-Pass, qui récupère la chaleur fatale de deux entreprises de la zone portuaire (Blue Paper et TREDI) et la restitue sur le port et vers la ville de Strasbourg, a été agrandi de 4 km. Cela permet d’économiser 15 000 tonnes de CO2 par an. L’an dernier le PAS a également été labellisé ZIBaC (Zone Industrielle Bas Carbone) par l’ADEME : cela nous permet de faire financer nos études du programme de décarbonation à hauteur de 50 % de leur montant.

Un nouveau projet stratégique en juin

Quelles sont vos perspectives pour 2024, qui s’annonce encore plus difficile que 2023 ?

C. M. : Nous ne cédons pas à la morosité ambiante. Cette année, nos investissements vont atteindre les 13 M €. Par ailleurs nous continuons notre travail de concertation sur le nouveau projet stratégique 2024-2028 du port, qui s’appuiera sur une nouvelle trajectoire financière à 10 ans. Le projet stratégique s’articule au­tour de quatre axes : faire du port de Strasbourg un acteur majeur de la décarbonation du territoire, améliorer notre performance sur la multimodalité fer + fleuve, investir dans le développement du territoire, le tout porté par un collectif agile, expert et engagé. Le projet devrait être signé en juin prochain. Sur les dix prochaines années, nous prévoyons 200 M€ d’investissement, dont une moitié pour l’entretien des infrastructures, qui seront largement cofinancés dans le cadre du contrat de plan État Région. Par ailleurs quelques investissement lourds sont en cours à Lauterbourg, avec le dévelop­pement de la capacité du terminal à conteneurs et la finalisation de la ZAC, où nous nous apprêtons à accueillir une usine de raffinage de lithium. Sur le terminal à conteneurs sud, nous continuons de travailler sur le projet de hub ferroviaire, qui doit nous permettre d’absorber le doublement du trafic ferroviaire prévu sur le port de Strasbourg. Les travaux devraient commencer en 2026 ou 2027. Enfin nous avons aussi plusieurs projets à Marckolsheim : réno­vation de la voie ferrée et développement de la zone du Kohlholtz pour implanter un projet de décarbonation.

Vous venez d’installer un Conseil consultatif de développement des ports de Strasbourg. À quoi cela sert-il ?

C. M. : Le Conseil réunit quatre collèges : la place portuaire, y compris les entreprises du port, les salariés, l’État et les collecti­vités territoriales et un certain nombre de personnalités qualifiées de l’Université, de la SNCF, de VNF, de l’ADIRA, d’Atmo Grand Est... Il est présidé par Jean-Luc Heimburger, président de la CCI Alsace Eurométropole. Cela nous permet de discuter des projets structurants sur l’avenir du port avec l’ensemble des acteurs. Dès ce printemps, il sera par exemple consulté en mode atelier, pour avis, sur notre projet stratégique.

Quid des accès routiers ?

« Aujourd’hui, la route représente 50 % des volumes transportés via le port, le fer 25 % et le fleuve 25 %, rappelle Claire Merlin, directrice générale du Port Autonome de Strasbourg. Le sujet des accès routiers est une question sensible pour le port et pour la ville. Nous disposons d’un double accès : depuis le sud et le pont Pflimlin, qui est l’accès le plus emprunté, et depuis l’ouest par l’avenue du Rhin. Je précise que tous les camions qui se rendent au port passent par le sud pour des raisons évidentes de sécurité. »

« Il est pour nous indispensable de conserver ce double accès. Nous discutons avec la Ville de Strasbourg et l’Eurométropole au sujet de l’avenue du Rhin. L’enjeu, c’est le développement harmonieux de la ville et du port. »

Jean de MISCAULT