Interview Paru le 11 juin 2024
Le CAUE Alsace s’investit auprès des élus et des particuliers

Carole Pezzoli, Directrice générale du CAUE Alsace

La notoriété et la compétence du CAUE Alsace (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement) font consensus. Il en découle une augmentation des adhésions et des sollicitations de la part des citoyens. Vision prospective de la commune, gestion des espaces naturels, réhabilitation... Les demandes de conseils sont diverses ! À la direction générale de cette association : Carole Pezzoli. Elle nous fait part des actions menées, et des évolutions en cours.

Carole Pezzoli, Directrice générale du CAUE Alsace

Quels sont les adhérents du CAUE Alsace ?

Carole Pezzoli, directrice du CAUE Alsace, et référente de l’antenne de Strasbourg : Le CAUE Alsace compte actuellement 84 adhé­rents (contre 79 en 2022). Ce sont principalement des communes ou communautés de communes. 10 organismes fidèles viennent compléter l’association comme l’ADEUS (Strasbourg), l’ADIL du Bas-Rhin (Strasbourg) et du Haut-Rhin (Colmar), ATMO Grand-Est (Schiltigheim), la Fondation du Patrimoine-Alsace (Strasbourg), L’Évasion (Sélestat), Le Vaisseau (Strasbourg), le SDEA (Schiltigheim), la SERS (Strasbourg), l’Union des Architectes Alsace (Strasbourg).

Il est utile de préciser que, pour une commune adhérente, les concitoyens disposent gratuitement de l’intervention des ser­vices techniques et culturels de l’équipe, en matière de conseil et d’accompagnement à la maîtrise d’ouvrage. Ceux-ci peuvent aussi bénéficier des sensibilisations, informations et formations sur l’architecture, l’urbanisme et l’environnement, et disposer des brochures et publications du CAUE.

Quelles sont vos ressources financières ?

C. P. : La structure est sous forme associative avec des statuts types approuvés en conseil d’État. Les ressources pour l’année 2023 sont issues essentiellement de la taxe d’aménagement et de subventions, mais aussi des cotisations des membres et des contributions volontaires des Collectivités adhérentes.

Quels sont les chiffres annuels, concernant l’intervention du CAUE Alsace ?

C. P. : Le CAUE Alsace, en 2023, recense 1 265 conseils aux particuliers, 77 dossiers traités à la demande des communes et 3 272 jeunes sensibilisés à l’architecture, au patrimoine et à l’en­vironnement.

Ainsi, l’année dernière, l’association a consacré 744 jours (ce qui représente 45 % de sa mission) à promulguer des conseils aux collectivités et 589 jours (soit 36 % de son activité) à accompagner les particuliers dans leurs projets. En parallèle, 18 % de l’activité de la CAUE Alsace ont été dédiés aux actions de sensibilisation et à l’information-communication auprès des différents interlocuteurs. Les formations dispensées représentent pour le moment 1 % de l’emploi du temps de la structure. Les actions de sensibilisation se déclinent sous différents aspects : intervention en milieu scolaire pour l’essentiel, mais aussi participation aux événements, conférences, expositions, visites, publications, création de fiches conseils...

Quel est le profil des salariés en charge des dossiers de demande d’accompagnement ?

L’équipe, constituée de salariés aux profils divers (architectes, urbanistes, gestion administrative, documentaire et géo-référence­ment), apportent leurs compétences dans la gestion des demandes d’aménagement. De nombreux domaines sont couverts : analyser et comprendre les architectures et le paysage, l’aménagement paysager... Les salariés se forment régulièrement, pour suivre l’évolution des réglementations, mais aussi pour améliorer leurs méthodes de sensibilisation des publics.

Le suivi d’une demande, sollicitée par une collectivité ou un par­ticulier, peut prendre 6 mois à deux ans, selon l’envergure et la complexité du projet.

Sur quelles types d’accompagnement est intervenu le CAUE Alsace ?

Reconversion, extension de mairies, annexes, salles des fêtes, ancienne école, bâtiments provisoires, garages, édifices légués ou préemptés... Chaque commune possède et doit gérer un important patrimoine foncier bâti ou non bâti, avec des moyens techniques ou financiers souvent réduits. La volatilité récente et massive des coûts des énergies s’ajoute à l’évolution des normes – thermiques ou d’accessibilité – et des usages. De plus, la charge symbolique d’un édifice public, le besoin de rationaliser l’entretien (types de combustibles, de mobilier, de consommables, le contrôle d’accès) renforcent les difficultés. De même que le devoir de préservation et de dynamisation des centres anciens, ainsi que la limitation de l’étalement urbain, peuvent faire de la gestion de ce patrimoine un sujet complexe pour les collectivités.

De fait, les élus nous sollicitent essentiellement pour des études urbaines, des équipements périscolaires, des salles multifonc­tionnelles ou équipements scolaires. Plus accessoirement, leurs demandes portent sur le logement, l’équipement sportif, l’étude paysagère, la mairie et l’équipement religieux. L’an dernier, la commune de Scherwiller nous a sollicités pour définir une stratégie de gestion et de valorisation du patrimoine bâti communal, avec une demande prioritaire concernant les dépenses énergétiques, la restructuration de la mairie devenue inadaptée et de la salle des fêtes vieillissante. Le CAUE Alsace a également travaillé sur le projet de réaménagement des espaces extérieurs du jardin du Vaisseau, centre de culture scientifique, technique et industrielle de la Collectivité européenne d’Alsace à Strasbourg. L’objectif ? Réaffirmer l’identité de cet espace complémentaire des expositions intérieures, et valoriser les potentialités écologiques, ludiques, pédagogiques du lieu.

Ces deux dossiers sont des exemples, parmi d’autres, du type de conseils que nous pouvons apporter.

Les particuliers ont-ils des demandes de conseil spécifiques ?

C. P. : Le particulier trouve au CAUE un lieu de parole et d’écoute précieux pour tout ce qui touche au cadre de vie, à l’habitat et à la construction. Il trouve ici une réponse neutre. Les thèmes abordés sont variés et récurrents, même si nous entendons aujourd’hui plus de demande sur la qualité d’exécution des travaux, ou de décep­tion au vu de la consommation après l’installation d’une pompe à chaleur. Sur les travaux en cours ou sur l’existant, ce sont des problèmes techniques, des défaillances de mise en oeuvre, des désordres et recours aux règles de construction qui sont abordés dans le cadre du conseil. La rénovation thermique, par exemple, est un thème qui pose beaucoup de questions, notamment en ce qui concerne la technique adaptée au bâti existant. Les craintes liées au voisinage, la compréhension des règles d’urbanisme, l’explica­tion des demandes d’autorisation de construire, la clarification des dessins et pièces qui doivent accompagner ces demandes sont en bonne place des sujets pour lesquels les particuliers viennent nous solliciter. Enfin, beaucoup viennent avant de se lancer dans un projet : les intentions, les motivations et le contexte sont ana­lysés, aux fins de vérifier leurs cohérences. Ainsi, avant l’achat d’un terrain, la question est posée de définir ce qu’il est possible d’y construire, en fonction des règles d’urbanisme. Ou dans le cas d’un bien à rénover, quels espaces pourrait-il accueillir, quel coût de rénovation ou transformation faut-il prendre en compte ? Les réponses apportées aux problèmes posés, sont élaborées ensemble. Le demandeur quitte alors le rendez-vous avec une meilleure conscience de ce à quoi il s’engage en tant que maître d’ouvrage, et une réelle conscience du rôle de l’architecte.

Quelle valeur ajoutée apporte le CAUE Alsace, dans le cadre de ses formations ?

C. P. : La formation est inscrite dans les missions des CAUE par la loi sur l’architecture de 1977. Les programmes de formation CAUE sont construits à partir des connaissances, des compétences et des expériences de terrain du CAUE Alsace. Ils s’adressent aux acteurs du cadre de vie : professionnels des secteurs privés et administra­tions publiques, acteurs du domaine associatif, de l’enseignement, etc. L’offre de formation de notre association s’adapte aux besoins des territoires et aux publics auxquels elle s’adresse, en termes d’objectifs, contenus, formats, modalités pédagogiques, outils, et suivis. À ce jour, le CAUE Alsace a développé des programmes de sensibilisation des élus sur la reconversion des corps de ferme, sur le devenir des friches industrielles, sur les possibilités de ré­investissement des zones pavillonnaires, ainsi que dans le cadre des schémas de cohérences territoriaux (ScoT). Ainsi, une matinée technique a été proposée sur le thème des îlots de chaleur et de fraîcheur urbains, et un stage est proposé aux enseignants sur la « sensibilisation à l’architecture ».

Par ailleurs, le cadre législatif a initié l’introduction d’une sensibi­lisation à l’architecture pour tous les niveaux de l’enseignement. Les architectes-conseillers du CAUE interviennent sur demande, dans toutes les structures d’enseignement et de formation : écoles, collèges, lycées, associations... Nos actions de sensibilisation sont importantes, car les enfants d’aujourd’hui devront être les acteurs du climat, de l’environnement, des ressources, de l’énergie, et à leur tour de la transmission. En 2023, le CAUE Alsace est intervenu auprès de 90 enfants d’école maternelle, de 1 535 enfants d’école élémentaire, de 842 collégiens, de 695 lycéens, de 90 post-bac, et de 20 extrascolaires.

Quelle est la tendance actuelle concernant le « Comment bien habiter chez soi ? »

C.P. : L’évolution actuelle de la société s’oriente résolument vers l’écologie et l’économie. Ces deux points impactent beaucoup les jeunes générations. D’une part, ils sont convaincus qu’il est essentiel de promouvoir l’adaptation au changement climatique, en développant l’utilisation des modèles de production et d’ap­provisionnement économes en ressources naturelles. Et d’autre part, ils subissent l’augmentation des coûts de l’habitat, liée aux normes environnementales et à la crise du logement. Avec une maturité nouvelle, certains estiment que l’accès à la propriété se fera sous une autre forme : l’habitat participatif (appelé aussi habitat groupé). Cette forme d’habitation permettant de partager des pièces mutualisées (grande salle permettant d’accueillir une réception familiale ou une animation, buanderie, jardin partagé…), et ainsi de disposer d’un logement fonctionnel à moindre coût. De fait, l’enjeu majeur de la transition écologique, qui nécessite une approche globale, équitable et concertée, permettra de préserver une qualité de vie dans l’habitat.

Il nous appartient d’accompagner ces évolutions, de les anticiper et de les promouvoir comme valeur d’exemple.

Et quels sont les projets à court terme ?

C.P. : Nous allons axer l’année 2024 sur le réaménagement de nos locaux, afin de les rendre plus fonctionnels et renouveler le regard du grand public sur ce lieu partagé avec l’ Agence Départementale d’Information sur le Logement du Bas-Rhin, la Maison Européenne de l’Architecture Rhin Supérieur, la Fondation du Patrimoine Alsace, l’ordre des architectes du Grand-Est dans Strasbourg.

Le CAUE Alsace

CAUE Alsace - Site internet : www.caue-alsace.com

Antenne de Strasbourg : 5 rue Hannong – 67000 Strasbourg – Tél : 03 88 15 02 30

Antenne de Colmar : 16A, Avenue de la Liberté – 68000 Colmar – Tél : 03 89 23 33 01

Permanences à Benfeld, Bennwhir, Masevaux : prendre contact avec les mairies

Pour prendre RDV avec un architecte-conseiller du CAUE Alsace, téléphoner au 03 89 23 33 01, ou compléter le formulaire en ligne, sur le site : www.caue-alsace.com/particuliers/prendre-rdv

 

Le fonds documentaire

Le CAUE dispose d’un fonds documentaire riche de plus de 6 000 ouvrages et d’une dizaine d’abonnements à des revues spécialisées, réparti sur l’antenne de Colmar et de Strasbourg. Celui-ci est à la disposition de l’équipe pluridisciplinaire de l’as­sociation, mais aussi du public extérieur (particulier, étudiant, enseignant, élu local, personnel communal...). Les documents sont consultables sur place et la plupart sont disponibles à l’emprunt.

CH. BE