Pouvez-vous nous détailler un peu ces Assises de l’immobilier ?
- Franck Job : « Nous en sommes déjà à la sixième édition. Bon an, mal an, malgré les vicissitudes nous organisons ces rencontres annuelles à l’Arsenal de Metz. Elles ont été initiées par Cédric Lavaud, vice-président de la FNAIM Moselle et président national du Fichier AMEPI (ndlr : association créée en 2004 par la profession pour servir les intérêts des agents immobiliers). C’est un projet commun entre la FNAIM Moselle et l’AMEPI. C’est une co-organisation de l’évènement. Nous faisons venir des intervenants de la profession. Cette manifestation est ouverte aux professionnels, mais pas seulement. Elle est accessible à tous ceux qui ont un intérêt et une curiosité pour la conjoncture économique, pour l’immobilier. »
- Mais la tonalité de la première édition était sûrement bien différente de celle qui s’annonce cette semaine ?
- F.J. : « Certainement. Pour la première édition nous avions occupé à l’Arsenal, deux petites salles annexes, alors que cette fois l’ensemble de l’Arsenal est utilisé, l’auditorium. Cela valorise la profession, les intervenants, les patrons de réseaux seront là, lors de l’ouverture le maire de Metz prendra la parole, en clair l’évènement va rejaillir positivement sur la ville de Metz. C’est certes un événement professionnel, mais qui va au-delà. Le grand public est le bienvenu, il suffit de s’inscrire. Ne va pas venir quelqu’un qui n’a pas d’appétence pour la profession. Ce n’est pas uniquement dédié aux professionnels. Celui qui est intéressé aura accès à la manifestation en s’inscrivant au préalable. Le particulier viendra pour trouver des réponses à ses questions sur l’immobilier. Beaucoup d’exposants, comme les notaires, les banquiers, peuvent pendant ces deux journées, éclairer les particuliers. Et puis il y a les nombreux plateaux, les tables rondes qui donnent lieu à des débats. »
« Faire passer des ondes positives »
- La thématique est le droit au logement ?
- F.J. : « C’est une thématique assez large. Nos intervenants viennent de partout, et ils trouveront à s’exprimer pendant les deux journées. On commence la veille, le 18 septembre à 18h30 par une conférence dans le grand auditorium de Michaël Aguilar qui s’appelle Mental Monumental. Il est expert dans la vente et la motivation liée à la vente. En clair, ça ne concerne pas que l’immobilier mais le domaine plus large du commerce. Ensuite nous aurons deux médaillés olympiques, dont Lisa Barbelin qui a remporté une médaille de Tir à l’arc et Thomas Chirault, également archer de l’équipe de France. Le but de ces assises c’est de faire passer des ondes positives : on entend que l’immobilier reprend, que la période est meilleure. C’était intéressant de flirter avec tout le côté positif des Jeux Olympiques, avec la régionale de l’étape. Le lendemain, des tables rondes et plateau d’échanges seront consacrés à l’immobilier. »
- Le droit au logement est d’actualité. On parle de plus de 2 millions de personnes en quête d’un logement pour cette rentrée ?
- F.J. : « Ce n’est pas surprenant. Dans le droit au logement il y a un aspect politique. Aujourd’hui nous sommes dans une incertitude politique. Or le droit au logement est à peine évoqué, alors que c’est un sujet qui est une des priorités de n’importe quel gouvernement. Nous avons du reste convié le ministre démissionnaire Guillaume Kasbarian. S’il est encore en place il ne pourra pas venir, sinon on l’a convié en tant que député. En attendant, le droit au logement ça veut dire donner du droit à la construction, rebooster le neuf. De fait, le droit au logement passe aussi et d’abord par la construction de nouveaux logements. »
« Une volonté politique »
- Le neuf est en chute libre ?
- F.J. : « Tant qu’il n’y aura pas une volonté politique, une aide de l’État aussi bien d’ordre fiscal, que juridique ou financier, ça restera sclérosé ! Le neuf est dépendant d’une incitation fiscale. Or aujourd’hui on va vers la fin des incitations pour l’investissement locatif comme le Pinel, ça se termine. Qu’est ce qui motive celui qui veut occuper un logement, la cible des promoteurs c’est aussi l’investisseur. Aujourd’hui s’il n’y pas d’avantages à investir dans le neuf… Or l’investissement se fait plutôt dans l’ancien. On voit dans nos agences les prémices d’une reprise de la demande des biens destinés à la location dans l’ancien, parce qu’il y a moyen de défiscaliser les travaux, mais ce n’est pas suffisant. Le droit au logement passe aussi par les bailleurs sociaux. Ils essaient, ils rament pour jouer leur rôle. En fait, c’est toute une chaîne qui devrait donner le droit au logement, mais elle est incomplète. »
- Comment se porte le marché immobilier ? Il est impacté par le taux des crédits ?
- F.J. : « On voit tout de même baisser les taux. (Ndlr: la BCE a baissé son taux directeur ce 12 septembre en le ramenant à 3,50%). Il redevient à nouveau intéressant. »
- L’Insee parle d’une timide reprise. Les transactions sont tombées à un peu plus de 700 000 en décembre. Qu’espérez-vous ?
- F.J. « Oui c’est ça. Si on parvient fin 2024 à 800 000 ou 850 000, on pourra être satisfait. Il faut se dire que les années où nous avons dépassé le million de transactions en France, étaient exceptionnelles. Il n’y a pas si longtemps, à la sortie du Covid on était sur des ratios très élevés. C’était en baisse l’an dernier, cette année on a de meilleures prévisions : c’est un rééquilibrage. On attend de voir l’évolution de l’offre, des vendeurs, de la demande, des acheteurs. »
- On a appris la fermeture de 3000 agences immobilières depuis un an, sur les 32000 en France, selon les données de la Chambre nationale des agents commerciaux en immobilier. C’est important ?
- F.J. : « Oui c’est beaucoup. Ce n’est pas si surprenant : les charges sur le plan économique reviennent régulièrement, les compromis chez nous durent trois à six mois. Si vous vous retrouvez un mois sans faire de transaction, ça devient compliqué pour certaines agences. Parfois elles ne sont pas armées en matière d’outils de promotion, de marketing et c’est un marché d’acquéreurs très concurrentiel. »
- Qu’en est-il des prix ? Ils ont baissé ?
- F.J. : « Non pas tant que ça. Du point de vue national on est sur une moyenne qui devrait tourner autour de 5% selon la FNAIM. Au niveau local on devrait être autour de 1%. Le marché de la location se sclérose, peu de biens qui se libèrent pour être mis sur le marché. Le seul levier qu’ont les professionnels pour réguler le marché, c’est la baisse des prix, mais cela passe par une volonté du vendeur, car on ne peut pas influencer le taux du crédit, le plan de financement. Les vendeurs restent réticents à baisser leur prix. »
« On est revenu à la réalité »
- Existe-t-il toujours ce mouvement de la clientèle vers le rural ?
- F.J : « Non ce phénomène ne perdure pas. On en est revenus. Il y avait une volonté d’aller vers l’extérieur de la ville par rapport au Covid… On est revenu à la réalité : les commodités, les distances en voiture. La demande ayant été forte, les prix ont augmenté sur les périodes d’après Covid, et pour certains ils n’ont pas baissé. On en revient au pragmatisme de la ville, à ce qu’elle apporte comme facilités. L’engouement pour le rural n’a duré qu’un temps. »
- Vous êtes optimistes pour la conjoncture à venir ?
- F.J. « Complètement. Concrètement, on s’attend à une reprise de dynamisme pour 2025. Aujourd’hui, on travaille. Il n’y a pas un dynamisme mirobolant, mais on travaille. Il y a de quoi faire. »
- Qu’en est-il des enjeux de la rénovation énergétique ? Est-ce que ça joue sur le climat des affaires ?
- F.J. : « Aujourd’hui les biens qui sont mal classés en termes de DPE, le diagnostic de performance énergétique, en F ou en G, sont devenus très compliqués à vendre. Dès à présent le DPE est pris en compte. Les biens énergivores ont du mal à trouver preneur. Le gouvernement veut que les bâtiments soient mis aux normes, mais pour le faire, il faut qu’il en donne les moyens. Il faudrait des aides, des incitations… mais ce n’est pas suffisant. »
- Quel est l’état du marché immobilier en Moselle ?
- F.J. : « La Moselle conserve l’attrait au niveau des frontières. Ceux qui travaillent au Luxembourg choisissent de se loger côté français. Thionville reste un secteur dynamique. La Moselle tire son épingle du jeu, on n’est pas les plus mal lotis. Le marché à Metz est concurrentiel. Pour le marché de l’ancien, je veux faire passer le message à celui qui veut vendre : c’est le bon moment car les banques prêtent à nouveau, les taux sont maîtrisés. Pour l’acquéreur en fonction de son plan de financement, il y aura peut-être encore quelque m2 en moins pour coller à son pouvoir d’achat. En tout cas, 2025 est prometteur. Le niveau d’avant, avec des taux de crédit de 1 ou 1,5%, c’était exceptionnel. On ne s’en rendait pas compte. On est revenu à des choses normales. »
- Est-ce que ces assises de l’immobilier peuvent changer votre approche de ce métier ?
- F.J. : « Les intervenants qui sont des patrons de gros groupes ou des décideurs dans l’immobilier, ne viennent pas chercher des solutions. Mais ils alimentent les échanges. C’est le cas entre le président de la FNAIM et le responsable de Century 21 avec des responsables de maisons des mandataires qui sont des indépendants. Or ce sont des modèles économiques complètement différents. Il y a là un intérêt pour la profession, afin de savoir quel modèle économique peut convenir le mieux, sachant que les indépendants n’ont pas la carte d’agent immobilier. Cela peut faire réfléchir les gens du métier. »